Réforme de l’adoption : tentative d’enfumage du gouvernement

Communiqué de presse des Juristes pour l’enfance

Juristes pour l’enfance

Organismes autorisés pour l’adoption : tentative d’enfumage du gouvernement

L’examen à l’Assemblée nationale de la proposition de loi visant à réformer l’adoption commence aujourd’hui.

Alors que, sans explication, ce texte supprime l’activité en France des organismes autorisés pour l’adoption (et les cantonne à leur activité à l’international), le gouvernement tente d’étouffer le tollé que cette mesure incompréhensible a suscité en proposant, par amendement, d’insérer à l’article 11 la précision suivante :

« Art. L. 225-10-1-1. – Le président du conseil départemental peut faire appel à des associations pour identifier, parmi les personnes agréées qu’elles accompagnent, des candidats susceptibles d’accueillir en vue d’adoption des enfants à besoins spécifiques. »

Il prétend dans l’exposé des motifs que « les organismes concernés pourront continuer à exercer leurs missions de préparation et d’accompagnement des familles adoptantes au bénéfice notamment des enfants à besoins spécifiques », et « qu’ils pourront également contribuer à l’identification de familles adoptantes pour ces enfants ».

Le gouvernement tente de faire comme si rien n’allait changer (mis à part la fin du recueil des enfants par les organismes autorisés pour l’adoption, en soi essentiel) et que les organismes autorisés pour l’adoption allaient pouvoir continuer leur travail d’intermédiaires en vue de l’adoption, concrètement de mise en relation des familles et des départements : mais ce n’est pas vrai car les « organismes concernés » ne seront plus organismes autorisés pour l’adoption dès lors que la proposition de loi supprime le statut d’organisme autorisé pour l’adoption en France et réserve l’agrément des organismes autorisés pour l’adoption à leur activité internationale.

Quel sera donc le statut des associations concernées ? À quel titre les départements pourraient s’adresser à elles ? Sur quels critères ?

D’un côté n’importe quelle association pourra s’investir dans cette activité puisqu’aucune autorisation n’est nécessaire pour sensibiliser des familles et les préparer à l’adoption.

Mais du coup aucune association n’aura plus le statut d’organisme autorisé : les départements n’auront pas de critère objectif pour sélectionner leurs interlocuteurs, et aucune association ne pourra se poser en interlocuteur « autorisé ».

Cet amendement veut compenser par du bricolage la disparition de l’activité en France des organismes autorisés pour l’adoption : ce renvoi aux « associations » est imprécis, sans rigueur et sans cohérence avec le reste du texte.

Il convient donc de maintenir le statut d’organisme autorisé pour l’adoption en France.

Surtout, la fin du recueil d’enfants en France par les organismes autorisés pour l’adoption est une mesure incompréhensible et injustifiée :

  • L’exposé prétend que le but est que tous les enfants concernés bénéficient du statut de pupille de l’État, plus protecteur pour l’intérêt supérieur de l’enfant qu’une tutelle de droit commun exercée par des tiers à l’enfant. Ceci n’est pas exact car les organismes autorisés pour l’adoption qui recueillent un enfant organisent pour lui une tutelle, le juge des tutelles jouant ici son rôle habituel parfaitement protecteur des enfants. Ceci est en outre totalement contredit par les faits : tous les enfants confiés à des organismes autorisés pour l’adoption sont adoptés alors que 49 % des enfants confiés à l’Aide sociale à l’enfance ne le sont pas. Le statut de pupille n’est pas du tout plus protecteur.
  • Il n’y a aucune raison de priver les parents du choix de confier leur enfant à un organisme autorisé pour l’adoption, sachant que beaucoup de mères concernées par cette décision de confier leur enfant à l’adoption viennent elles-mêmes de l’Aide sociale à l’enfance et ne veulent pas confier leur enfant à l’Aide sociale à l’enfance.
  • En consentant à ce que leur enfant devienne pupille de l’État, les parents n’ont pas d’assurance que leur enfant sera adopté : d’abord, la décision d’adoptabilité est prise par le conseil de famille des pupilles, qui peut donc définir un autre projet de vie pour l’enfant que l’adoption. Ensuite, quand bien même le conseil des familles définit l’adoption comme projet de vie de l’enfant, 49 % des pupilles restent sans adoption.

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