Question sur la réforme de la protection de l’enfance

Journal officiel de la République française, édition « Débats parlementaires – Sénat », nº 3 S (Q), 21 janvier 2021

Détraigne (Yves), question écrite nº 17532 au secrétaire d’État chargé de l’enfance et des familles sur la réforme de la protection de l’enfance [Journal officiel de la République française, édition « Débats parlementaires – Sénat », nº 45 S (Q), 6 août 2020, pp. 3444-3445].

Yves Détraigne (© D.R.)

Yves Détraigne (© D.R.)

M. Yves Détraigne souhaite appeler l’attention de M. le secrétaire d’État auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargé de l’enfance et des familles sur les récentes préconisations formulées par la Cour des comptes en matière de protection de l’enfance qu’elle juge actuellement peu efficace.

En effet, les sages considèrent que le pilotage national de la protection de l’enfance, qui associe de nombreuses instances, est jugé « insatisfaisant depuis longtemps ». S’étonnant du nombre important d’acteurs dans le pilotage de la compétence qui rend parfois difficile l’identification de l’interlocuteur ad hoc, ils ajoutent qu’en outre les différentes instances – conseil national de la protection de l’enfance (CNPE), groupement d’intérêt public enfance en danger (GIPED), observatoire national de la protection de l’enfance (ONPE), direction générale de la cohésion sociale (DGCS), agence Française de l’adoption (AFA)… – ne partagent pas les mêmes outils et échangent peu leurs données.

Ils préconisent de construire un cadre pour évaluer les établissements accueillant des enfants protégés, ainsi qu’un référentiel national sur l’évaluation des situations comme sur les modalités de prise en charge des enfants.

Enfin, les sages formulent cinq recommandations qui passent par une meilleure identification des acteurs, par la mise en place d’un organisme public national en charge de missions opérationnelles, notamment dans les deux domaines de l’adoption nationale et internationale, et la désignation au plan local, en matière de protection de l’enfance, d’un interlocuteur unique de l’État pour les conseils départementaux chargé de coordonner les différents services déconcentrés.

Considérant que la clarification et la simplification du pilotage de la politique de protection de l’enfance en supprimant et fusionnant des structures permettraient de gagner en efficacité dans des situations où, pourtant, l’implication des acteurs concernés est réelle, il lui demande de quelle manière il entend répondre à la juridiction financière.


Réponse du secrétariat d’État auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargé de l’enfance et des familles publiée dans le Journal officiel de la République française, édition « Débats parlementaires – Sénat », nº 3 S (Q), 21 janvier 2021, p. 428.

Adrien Taquet (© Gérald Garitan)

Adrien Taquet (© Gérald Garitan)

Dans son référé d’avril 2020 relatif à la gouvernance nationale de la protection de l’enfance, la Cour des comptes relève que, si la protection de l’enfance constitue incontestablement une politique décentralisée pour laquelle les départements sont chefs de file, elle n’en nécessite pas moins une étroite coordination avec d’autres politiques publiques non décentralisées, telles que celles gérées par les ministères de la justice, des solidarités et de la santé, et de l’éducation nationale. Par ailleurs, l’État conserve des responsabilités essentielles, notamment en matière de conception de cette politique publique et d’édiction de normes. Il lui appartient également de s’assurer de l’équité de traitement des enfants protégés sur l’ensemble du territoire. À cet égard, la Cour souligne l’imbrication des missions des différentes instances de pilotage national compétentes dans le champ de la protection de l’enfance, dont elle regrette qu’elles soient insuffisamment articulées entre elles. Elle estime que l’enchevêtrement des compétences et la dispersion des moyens font obstacle à la bonne mise en œuvre des missions confiées. Ces constats rejoignent ceux issus de la concertation nationale sur la protection de l’enfance menée par le Gouvernement à l’été 2019. C’est pourquoi la Stratégie nationale de prévention et de protection de l’enfance 2020-2022 présentée le 14 octobre 2019 par Adrien Taquet, secrétaire d’État chargé de la protection de l’enfance, prévoit une réforme de la gouvernance nationale et territoriale de la protection de l’enfance, notamment par une rationalisation des instances compétentes au niveau national : Conseil national de la protection de l’enfance (CNPE), groupement d’intérêt public Enfance en Danger (GIPED) et Agence française de l’adoption (AFA). Le 4ème comité interministériel de la transformation publique en date du 15 novembre 2019 a par ailleurs acté le regroupement de ces organismes avant fin 2022. Une mission a été confiée à l’inspection générale des affaires sociales (IGAS) au premier semestre 2020. Ses conclusions, rendues publiques en décembre 2020, vont dans le même sens que celles de la Cour des comptes, et confortent le Gouvernement dans sa volonté d’avancer sur ce sujet crucial. Divers scénarios restent en cours d’expertise dans ce cadre, notamment pour ce qui est de : confier la mission exclusive de production de données statistiques sur la protection de l’enfance à la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES) ; rapprocher le CNPE soit du HCFEA, soit du GIPED, dans le cadre d’un nouvel organisme national de gouvernance de la protection de l’enfance ; renforcer l’animation territoriale opérationnelle, l’appui aux conseils départementaux et la convergence des pratiques locales, y compris en matière d’adoption ; remobiliser les services de l’État et mieux articuler les acteurs au niveau territorial. À cet égard, la démarche de contractualisation préfet – agence régionale de santé – département portant sur la prévention et la protection de l’enfance, engagée dans 30 départements dès 2020, constitue un premier outil de coordination et de coopération interministérielle autour de l’aide sociale à l’enfance et du conseil départemental. Le secrétaire d’État chargé de l’enfance et des familles souhaite quant à lui qu’une proposition de réforme ambitieuse puisse être faite dans les meilleurs délais, afin de garantir la mise en œuvre du nouvel organisme au 1er janvier 2022.


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