Question sur le recrutement des femmes pilotes de l’air

Journal officiel de la République française, édition « Débats parlementaires – Sénat », nº 41 S (Q), 17 octobre 2019

Isabelle Raimond-Pavero (© D.R.)

Isabelle Raimond-Pavero (© D.R.)

Raimond-Pavero (Isabelle), Question écrite nº 10744 à la ministre des armées sur le recrutement des femmes pilotes de l’air [Journal officiel de la République française, édition « Débats parlementaires – Sénat », nº 23 S (Q), 6 juin 2019, p. 2917].

Mme Isabelle Raimond-Pavero interroge Mme la ministre des armées sur le recrutement des femmes pilotes de l’air.

L’association internationale [sic – lire : française] des femmes pilotes se mobilise pour encourager les candidatures féminines en lançant une tournée dans plusieurs collèges de France. En effet, le constat est qu’elles représentent aujourd’hui un peu moins de 5 % de la profession et moins de 2 % pour les commandants de bord.

Une double problématique s’instaure : la formation et le recrutement. Certaines compagnies aériennes se sont pourtant fixé des objectifs (+ ou – 20 % pour l’année 2020) afin de féminiser les rangs dans une profession majoritairement masculine.

Aussi, elle lui demande quels efforts peuvent être fait [sic] en matière de formation et de recrutement des femmes pilotes de l’air et dans une plus large mesure dans le secteur des métiers aériens.


Réponse du ministère des Armées publiée dans le Journal officiel de la République française, édition « Débats parlementaires – Sénat », nº 41 S (Q), 17 octobre 2019, pp. 5253-5254.

Florence Parly (© Jette Carr)

Florence Parly (© Jette Carr)

Le recrutement et la formation des femmes pilotes de l’air et plus largement du secteur des métiers aériens répond d’abord à une logique de milieu, qu’il soit aérien, maritime ou terrestre. L’armée de l’air est, historiquement avec près de 23 % de personnel féminin, la plus féminisée des trois armées. Les femmes militaires de l’armée de l’air peuvent accéder à tous les métiers et tous les grades, sans limitation en volume, depuis 1996 (ouverture de la spécialité personnel navigant « chasse ») ; elles sont engagées en opérations intérieures et extérieures au même titre que les hommes. Les aviatrices représentent 15 % des officiers, 20 % des sous-officiers et 33 % des militaires du rang. L’armée de l’air compte aujourd’hui 106 femmes officiers pilotes ou navigateurs (dont 74 en unité opérationnelle sur 1 680 pilotes au total) et 59 femmes pilotes sont commandants de bord ou équivalent. À grade et responsabilité équivalents, les femmes ont le même niveau de rémunération. Le recrutement, la formation initiale et continue, les perspectives de carrière et d’avancement, sont identiques pour les hommes et pour les femmes. Pour le personnel navigant, l’adaptation physiologique est prise en compte (équipements adaptés aux morphologies féminines). La seule différence aujourd’hui réside dans les épreuves et barèmes des épreuves sportives (adaptés aux femmes), lors du recrutement comme lors des contrôles continus. Des actions sont menées pour entretenir une attractivité importante pour le personnel féminin, quelle que soit la spécialité. Elles sont menées dès le recrutement, via la communication qui met en avant la féminisation de l’armée de l’air et l’égalité hommes-femmes. Ainsi, le bureau recrutement est partenaire de l’opération « Féminisons les métiers de l’aéronautique 2019 », organisée par l’association « Airemploi ». Aujourd’hui, un candidat sur quatre au recrutement est une femme. Un recruteur sur deux est une femme capable d’accueillir et de renseigner les candidates potentielles. Cependant, le déficit de représentativité des femmes dans les filières scientifiques et techniques, qui constituent pourtant une part essentielle de la cible, impacte de manière significative leur recrutement dans nombre de métiers « Air ». Pour contrer cette tendance, l’armée de l’air vise à créer un partenariat avec l’éducation nationale et les associations de représentants des parents d’élèves, pour la promotion en amont des orientations post-collège des filières technologiques permettant un débouché dans l’armée de l’air auprès des collégiens – professeurs – conseillers d’orientation. La déclinaison « Air » du plan mixité du ministère des armées permettra de renforcer cette dynamique (intégration d’une femme dans chaque jury d’examen et concours par exemple). En ce qui concerne la marine nationale, le recrutement dans les filières aéronautiques connaît un taux de féminisation moyen similaire à celui de l’ensemble de l’institution (13 % en 2018). Malgré une volonté affirmée de féminiser davantage (communication, marraines aéronautes, promotion de l’ambition technique au féminin), la marine se heurte à des viviers trop faibles au sortir du système scolaire (10 % de féminisation dans les BAC PRO AERO). Pourtant, tous les leviers de promotion (influence Internet, marraines lycées-bases aéronavales, témoignages en forums, affectation de personnel féminin de spécialité aéronautique dans les centres d’information et de recrutement – CIRFA-M, campagnes de communication, relations avec des associations militantes) sont activés. Afin de féminiser davantage l’aéronavale dès le recrutement, il convient de s’attaquer aux causes sociales, individuelles et scolaires qui font des métiers techniques des relatifs déserts de féminisation. La formation des pilotes vise la mise en œuvre d’aéronefs complexes et onéreux dans des situations qui peuvent être particulièrement exigeantes. Les objectifs à atteindre sont les mêmes, pour les hommes comme pour les femmes. La féminisation de la filière est avant tout une problématique de recrutement et ensuite de gestion de carrière, mais pas de formation/transformation. En revanche, la marine entreprend un effort d’accompagnement au profit de chaque candidate en difficulté pour lui donner un maximum de chances de réussite dans sa formation. Au cours de leur carrière, une attention particulière est accordée à la gestion des personnels féminins afin de les encourager à poursuivre leur parcours au sein de la marine. Les bureaux de gestion étudient les affectations du personnel en prenant en compte la situation familiale, particulièrement pour les couples de militaires (61 % des femmes mariées le sont avec un militaire et marin dans 92 % des cas) pour lesquels ils s’assurent que les conjoints ne soient pas simultanément affectés dans des postes nécessitant une forte disponibilité et des longues absences. D’autres mesures, telles que la réorganisation du concours de l’École de guerre (pour les officiers) ou la possibilité pour les femmes décidant de prendre un congé pour convenances personnelles pour élever un enfant de moins de 8 ans de souscrire un engagement à servir dans la réserve (ESR), visent à donner plus de souplesse aux parcours professionnels pour les adapter aux contraintes personnelles et familiales. Enfin, certaines mesures actuellement à l’étude, telles que le maintien des droits à l’avancement pendant le congé parental ou le congé pour convenances personnelles pour élever un enfant de moins de 8 ans dans une limite de 5 ans, ou le développement de l’accompagnement des femmes via le mentorat ou la possibilité d’échanger au sein d’un réseau des femmes de la marine devraient contribuer à faire augmenter le taux de fidélisation de ces dernières. Enfin, au sein de l’armée de terre, féminisée à hauteur de 10,4 % (mai 2019), l’égalité de traitement est recherchée à tous les niveaux, les statuts posant un cadre légal fondé sur des critères opérationnels et sans aucune différenciation de quelque sorte. C’est ainsi que dans le recrutement, la gestion de carrière et la formation, la priorité est bien la recherche des compétences et des appétences. Cependant, le faible volume de femmes se présentant dans les centres de recrutement et aux concours militaires explique très largement les chiffes suivants : 9,42 % des officiers, 12,55 % des sous-officiers et 9,31 % des militaires du rang sont des femmes. Les métiers de l’aérocombat recouvrent plusieurs domaines de spécialité de l’armée de Terre. Concernant les officiers pilotes sous contrat (OSC/P), le volume annuel est très peu significatif (30 à 35 par an) et le taux de féminisation varie entre 6 et 18 % (entre 3 et 6 femmes pilotes), selon la réussite aux tests d’aptitude permettant l’agrément au métier de pilote, dont le taux d’échec, tant pour les hommes que pour les femmes, est élevé. Le faible nombre de candidatures explique en partie le taux de femmes dans la profession plus encore que l’exigence de la réussite à l’agrément. La chaîne recrutement de l’armée de terre a par ailleurs mis en œuvre une campagne de publicité au recrutement spécifiquement liée à la mixité en mars 2019, mettant notamment en avant une pilote d’hélicoptère Tigre. D’autres efforts, à l’étude et en faveur d’un recrutement féminin, pourraient passer par la promotion du métier et une communication ciblée, via l’exposition d’hélicoptères dans les grandes villes de France et la rencontre entre les jeunes français et les équipages mixtes. En parallèle, la mise en place du LAPL (Light Aircraft Pilot Licence), obligatoire pour tous les pilotes de drones tactiques SDT (système de drones tactiques), représente une opportunité de recruter plus de femmes et d’élargir le vivier. Enfin, dans un cadre plus général, des efforts sont effectués pour permettre aux femmes de mieux vivre leur métier militaire et les sujétions qui s’y rapportent et de les accompagner aux postes à haute responsabilité où elles sont encore minoritaires.


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