Question sur l’application par la France du droit à un procès équitable prévu par la Convention européenne des droits de l’homme

Journal officiel de la République française, édition « Débats parlementaires – Sénat », nº 15 S (Q), 15 avril 2021

Christine Lavarde (© Sénat)

Christine Lavarde (© Sénat)

Lavarde (Christine), question écrite nº 19316 au ministre de la Justice sur l’application par la France du droit à un procès équitable prévu par la Convention européenne des droits de l’homme [Journal officiel de la République française, édition « Débats parlementaires – Sénat », nº 48 S (Q), 19 novembre 2020, p. 5676].

Mme Christine Lavarde attire l’attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur l’application par la France du point 1 de l’article 6 relatif au droit à un procès équitable de la Convention européenne des droits de l’homme.

Elle souhaiterait disposer d’un bilan annuel depuis 2010 retraçant le nombre de saisines à ce sujet concernant la France, le nombre de condamnations de la France, le montant cumulé des condamnations ainsi que les transactions opérées.

Elle l’interroge par ailleurs sur les mesures qu’il entend prendre afin de faire cesser ces condamnations onéreuses. Le respect de l’article 6.1 susmentionné permettra d’améliorer le service public de la justice dans l’intérêt du justiciable.


Réponse du ministère de la Justice publiée dans le Journal officiel de la République française, édition « Débats parlementaires – Sénat », nº 15 S (Q), 15 avril 2021, p. 2525.

Éric Dupond-Moretti (© D.R.)

Éric Dupond-Moretti (© D.R.)

Entre le 1er janvier 2010 et le 1er décembre 2020, la France a été condamnée, sur le fondement de l’article 6 paragraphe 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales, 60 fois, dont 46 pour des faits relevant du ministère de la justice et 14 pour des faits relevant de l’action d’autres ministères. Au total, le montant cumulé de ces 60 condamnations (comprenant indemnisations et transactions) s’élève à la somme de 628 975,35 euros. Dans le détail, les condamnations rendues contre la France sur ce fondement étaient au nombre de 10 en 2010 et 2011, 7 en 2012, 5 en 2013, 2 en 2014, 9 en 2015, 3 en 2016, 1 en 2017, 2 en 2018, 7 en 2019, et 4 en 2020. Pour les 46 condamnations impliquant le ministère de la justice, leur montant s’élève à la somme de 428 003,40 euros comprenant la somme de 46 800 euros au titre des transactions opérées. Sur les 14 condamnations relevant de la compétence d’autres ministères, leur montant s’élève à la somme de 200 971,95 euros comprenant la somme de 22 990 euros au titre des transactions opérées. Parmi les 46 condamnations rendues contre la France, relatives à l’article 6 paragraphe 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales, et relevant du ministère de la justice, force est de constater, en sus des moyens – humains notamment, mis en place, une adaptation continue de la loi et des jurisprudences permettant de prendre en compte les exigences de cet article et ainsi d’éviter de nouvelles condamnations. À titre d’exemple, plusieurs réponses en matière d’exécution ont été apportées dans les trois thèmes suivants : sur les condamnations pour délai déraisonnable en matière de procédures collectives, un revirement de jurisprudence a été opéré par la Cour de cassation avec son arrêt en date du 16 décembre 2014 (pourvoi nº 13-19.402), dans lequel elle a déclaré recevable une action du débiteur demandant une indemnité pour une durée excessive de la procédure de faillite. De ce fait, la question de l’irrecevabilité des actions du débiteur en responsabilité de l’État dans les procédures de liquidation judiciaire n’est plus posée ; sur les condamnations relatives aux modalités d’une garde-à-vue (accès à l’avocat, droit de garder le silence), la jurisprudence de la Cour de cassation a évolué à la suite de la décision nº 2010-14/22 du 30 juillet 2010 du Conseil constitutionnel qui a censuré les conditions de la garde à vue de droit commun conformément à la jurisprudence de la CEDH. Ce revirement de jurisprudence a entraîné une réforme législative qui est entrée en vigueur avec la loi nº 2011-392 du 14 avril 2011, avec de nouveaux amendements introduits en 2014 (loi nº 2014-535 du 27 mai 2014), 2016 (loi nº 2016-731 du 3 juin 2016) et 2019 (loi nº 2019-222 du 23 mars 2019). L’article 63-1 du code de procédure pénale prévoit depuis novembre 2016 que les personnes placées en garde à vue doivent être immédiatement informées de leur droit de ne pas répondre aux questions ou de leur droit à l’assistance d’un avocat dès le début de la garde à vue ; sur la motivation des décisions de justice, et plus particulièrement des arrêts d’assises, la loi nº 2011-939 du 10 août 2011 relative à la participation des citoyens au fonctionnement de la justice pénale a considérablement modifié la composition et le fonctionnement de la cour d’assises. Au nombre de ces modifications, la motivation des arrêts rédigée par le président ou l’un des assesseurs désigné par lui, laquelle, en cas de condamnation, consiste dans l’énoncé des principaux éléments à charge qui, pour chacun des faits reprochés à l’accusé, ont convaincu la cour d’assises. La loi prévoyant expressément que ces éléments sont ceux qui ont été exposés au cours du délibéré, il n’est ainsi nullement porté une atteinte majeure au secret de la délibération.


Faire un don

Totalement indépendant, ne bénéficiant à ce jour d’aucune subvention publique et ne vivant que de la générosité privée, P@ternet a besoin du soutien de ses lecteurs pour continuer, et se développer. Si cet article vous a intéressé, vous pouvez soutenir P@ternet grâce à un don ponctuel en cliquant sur l’image ci-dessous.

helloasso

Laissez un commentaire (respectez les règles exposées dans la rubrique “À propos”)

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.