Question sur les nouveaux critères d’éligibilité à l’aide juridictionnelle

Journal officiel de la République française, édition « Débats parlementaires – Sénat », nº 13 S (Q), 1er avril 2021

Vaugrenard (Yannick), question écrite nº 20339 au ministre de la Justice sur les nouveaux critères d’éligibilité à l’aide juridictionnelle [Journal officiel de la République française, édition « Débats parlementaires – Sénat », nº 4 S (Q), 28 janvier 2021, p. 512].

Yannick Vaugrenard (© Clément Bucco-Lechat)

Yannick Vaugrenard (© Clément Bucco-Lechat)

M. Yannick Vaugrenard attire l’attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur les nouveaux critères d’éligibilité de l’aide juridictionnelle. L’objectif de cette dernière est de garantir un égal accès au droit et à la justice des citoyens, quelles que soient leurs ressources, quel que soit le contentieux. Depuis la loi nº 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020, la définition des plafonds annuels d’éligibilité à l’aide juridictionnel [sic] est fixée dans un décret du Conseil d’État. Le décret nº 2020-1717 du 28 décembre 2020 précise ainsi les nouvelles mesures relatives au calcul du plafond de ressources pour l’aide juridique (hors recours) et l’aide juridictionnelle. Ainsi, les conditions permettant aux intéressés de bénéficier de l’aide de l’État pour être assistés d’un avocat sont considérablement complexifiées. À la place du plafond de ressources (moins de 1 000 euros de revenus mensuels pour l’aide juridictionnelle totale), le revenu fiscal de référence est pris en compte (justifier de moins de 11 262 € par an pour une personne seule). En outre, il est exigé d’apporter la preuve de la valeur en capital de son patrimoine mobilier, comprenant la voiture, les meubles ou l’épargne (moins de 11 262 € pour une personne seule), ou immobilier (sauf résidence principale et biens destinés à l’usage professionnel, dont la valeur doit être inférieure à 33 780 € pour une personne seule). Aussi, sachant que les personnes les plus démunies renoncent à exercer leur droit à des aides lorsque les formalités sont trop complexes ou que les pièces justificatives exigées sont trop nombreuses, et dans le contexte de crise sanitaire actuelle, il lui demande dans quelle mesure les bénéficiaires du revenu de solidarité active (RSA) ou de l’allocation de solidarité aux personnes âgées, pourraient être exonérés de ces déclarations, leurs économies et leurs revenus étant déjà contrôlés et leur déclaration de patrimoine étant connue par la caisse d’allocations familiales. Enfin, il est prévu à compter du printemps 2021, de rendre la demande accessible en ligne afin que l’aide juridictionnelle soit numérisée. Le ministère a fait savoir que les personnes qui déposeront leur demande en ligne se verront dispensées de fournir de nombreuses informations et de nombreux justificatifs en application du principe « dites-le-nous une fois ». Il lui demande si des dispositions particulières seront mises en place pour les plus démunis ne disposant pas d’un accès numérique et dans quelle mesure ce principe « dites-le-nous une fois » peut s’appliquer également lorsque les demandes sont réalisées avec un formulaire d’aide juridictionnelle auprès d’un point d’accès au droit, d’une maison de la justice et du droit, ou des tribunaux.


Réponse du ministère de la Justice publiée dans le Journal officiel de la République française, édition « Débats parlementaires – Sénat », nº 13 S (Q), 1er avril 2021, p. 2222.

Éric Dupond-Moretti (© D.R.)

Éric Dupond-Moretti (© D.R.)

Les nouveaux critères d’éligibilité à l’aide juridictionnelle, en vigueur depuis le 1er janvier 2021, ont effectivement pour objectif d’améliorer la lisibilité du droit et de simplifier le travail des bureaux d’aide juridictionnelle. La loi nº 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique prévoit depuis l’origine que soit pris en compte le patrimoine mobilier et immobilier du demandeur à l’aide juridictionnelle, mais le décret d’application précédent n’avait fixé aucun plafond. Il en résultait une application très hétérogène sur le territoire, source d’insécurité juridique et d’inégalité devant la loi. S’agissant plus particulièrement du patrimoine immobilier, la loi dispose que « les biens qui ne pourraient être vendus ou donnés en gage sans entraîner un trouble grave pour les intéressés ne sont pas pris en compte dans le calcul du montant des ressources auquel s’appliquent les plafonds d’éligibilité » (art. 4). Par conséquent, ni la résidence principale, ni les biens utilisés pour une activité professionnelle par exemple, ne peuvent être pris en compte pour apprécier l’éligibilité du demandeur. Si les bénéficiaires du revenu de solidarité active ou de l’allocation de solidarité aux personnes âgées ne disposent d’aucun bien immobilier autre que leur résidence principale, le seul document faisant foi pour apprécier leurs ressources est l’avis d’imposition, ce qui constitue une formalité relativement simple. S’agissant de l’accessibilité en ligne du formulaire de demande d’aide juridictionnelle, les demandeurs pourront en effet prochainement déposer une demande d’aide juridictionnelle en ligne. En application du principe « dites-le-nous une fois », le formulaire d’aide juridictionnelle en ligne s’appuie sur le fournisseur d’identité France Connect. Les données d’identité et les données fiscales des demandeurs seront ainsi automatiquement récupérées auprès de la direction générale des finances publiques. Le bénéfice du principe « dites-le-nous une fois » s’applique aux demandeurs déposant une demande dématérialisée. Toutefois, pour les demandeurs ne disposant pas d’accès numérique, un recours au dispositif « Aidants Connect » développé par la direction interministérielle du numérique – DINUM – sera organisé, tout comme il est prévu de s’appuyer sur le dispositif « France services » pour accompagner les demandeurs dans cette démarche.


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