Un agent de la SNCF père de trois enfants a droit à une retraite anticipée

Cour de cassation

Lors de son audience publique de ce 19 décembre 2019, la Cour de cassation a rendu un arrêt qu’il nous paraît intéressant de signaler à l’attention de nos lecteurs.

En l’espèce, un père ayant élevé trois enfants avait demandé en mars 2015 à la caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la Société nationale des chemins de fer français son admission à la retraite anticipée à effet du 15 février 2016. Le bénéfice de cet avantage lui ayant été refusé, il avait saisi d’un recours une juridiction de sécurité sociale et la cour d’appel de Bourges lui avait finalement donné raison en mars 2018.

L’arrêt a été confirmé aujourd’hui par la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, qui a rejeté le pourvoi formé par la caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la Société nationale des chemins de fer français :

« Attendu qu’il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE, 17 juillet 2014, C-173/13, époux G…), qu’une discrimination indirecte en raison du sexe est caractérisée lorsque l’application d’une mesure nationale, bien que formulée de façon neutre, désavantage en fait un nombre beaucoup plus élevé de travailleurs d’un sexe par rapport à l’autre ; qu’une telle mesure n’est compatible avec le principe d’égalité de traitement en matière de rémunération entre travailleurs féminins et travailleurs masculins, garanti par les dispositions de l’article 157 du TFUE, qu’à la condition que la différence de traitement entre les deux catégories de travailleurs qu’elle engendre soit justifiée par des facteurs objectifs étrangers à toute discrimination fondée sur le sexe ; que tel est le cas si les moyens choisis répondent à un but légitime de la politique sociale de l’État membre dont la législation est en cause, sont aptes à atteindre l’objectif poursuivi par celle-ci et sont nécessaires à cet effet ;

« Et attendu que, selon l’article 37-1, III, du décret nº 2008-639 du 30 juin 2008, dans sa rédaction issue du décret nº 2011-291 du 18 mars 2011, applicable au litige, les agents ayant accompli quinze années de services effectifs avant le 1er janvier 2017 et parents à cette date de trois enfants vivants ou décédés par faits de guerre, conservent la possibilité de liquider leur pension par anticipation au titre du régime spécial de retraite du personnel de la SNCF, à condition d’avoir, pour chaque enfant, interrompu ou réduit leur activité dans les conditions fixées au II de l’article 3 du même décret ; que le maintien, fût-ce à titre transitoire, du régime de la liquidation par anticipation des droits à pension avec entrée en jouissance immédiate qui résulte de ces dispositions, engendre une discrimination indirecte en matière de rémunération entre travailleurs féminins et travailleurs masculins, contraire à l’article 157 du TFUE en ce que s’il poursuit un objectif légitime de politique sociale tendant à compenser les désavantages subis dans le déroulement de leur carrière par l’ensemble des travailleurs tant féminins que masculins ayant interrompu celle-ci durant un certain laps de temps afin de se consacrer à leurs enfants, les modalités retenues par le dispositif, favorisant une fin anticipée de la carrière professionnelle, ne sont pas de nature à compenser, avec la cohérence requise, les désavantages de carrière résultant de l’interruption ou réduction d’activité professionnelle de deux mois en raison de la naissance, de l’arrivée au foyer ou de l’éducation de trois enfants ; qu’il en résulte que le droit à la liquidation de la pension ne saurait être subordonné, pour les agents compris dans le champ d’application des dispositions susmentionnées de l’article 37-1, à la justification de l’interruption ou de la réduction de leur activité dans les conditions auxquelles ce dernier renvoie ;

« Et attendu qu’ayant constaté que l’assuré avait accompli quinze années de services effectifs avant le 1er janvier 2017 et avait élevé trois enfants, la cour d’appel en a exactement déduit qu’il pouvait prétendre au bénéfice de la liquidation par anticipation de sa pension de retraite. ».

Références
Cour de cassation
Chambre civile 2
Audience publique du 19 décembre 2019
Nº de pourvoi : 18-16974

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