Petite chronique de jurisprudence : droit de visite et d’hébergement, enlèvement parental

Cour de cassation

Lors de son audience publique de ce 8 juillet 2021, la Cour de cassation a rendu deux arrêts qu’il nous paraît intéressant de signaler à l’attention de nos lecteurs.

Droit de visite et d’hébergement d’un tiers

En l’espèce, une femme avait donné naissance à une petite fille en novembre 2014. L’enfant avait été reconnue par le compagnon de la mère deux jours plus tard. Un ancien compagnon de la mère avait alors assigné le couple en référé d’heure à heure devant un juge aux affaires familiales pour obtenir un droit de visite et d’hébergement à l’égard de l’enfant sur le fondement de l’article 371-4 du code civil. Il avait également saisi le tribunal de grande instance de Grasse aux fins de voir annuler la reconnaissance de paternité du compagnon de la mère.

La cour d’appel d’Aix-en-Provence ayant accordé en octobre 2019 un droit de visite et d’hébergement « classique » (une fin de semaine sur deux et la moitié des vacances scolaires) à l’ancien compagnon, le couple avait formé un pourvoi en cassation et l’arrêt avait été cassé en février 2020. L’affaire et les parties avaient été renvoyées devant la cour d’appel de Montpellier, laquelle avait décidé en mars dernier que l’ancien compagnon rencontrerait l’enfant deux fois par mois dans un espace de rencontre, les dates et horaires étant à déterminer par ledit espace. Le couple avait alors formé un nouveau pourvoi en cassation, arguant notamment que c’était au juge de déterminer la durée et la périodicité des rencontres.

Le pourvoi a été rejeté aujourd’hui par la première chambre civile de la Cour de cassation :

« 10. D’une part, l’article 371-4 du code civil ne précise pas les modalités selon lesquelles le droit de visite et d’hébergement du tiers peut s’exercer.

« D’autre part, si l’article 1180-5 du code de procédure civile dispose que, lorsque le juge décide que le droit de visite de l’un des parents s’exercera dans un espace de rencontre, en application des articles 373-2-1 ou 373-2-9 du code civil, il fixe la durée de la mesure et détermine la périodicité et la durée des rencontres, ce texte n’est pas applicable aux relations entre les enfants et un tiers.

« 11. C’est sans méconnaître l’étendue de ses pouvoirs que la cour d’appel a fixé la durée de la mesure, le lieu et la périodicité des rencontres entre [l’ancien compagnon] et [l’enfant]. »

Références
Cour de cassation
Chambre civile 1
Audience publique du 8 juillet 2021
Nº de pourvoi : 21-14035

Enlèvement parental

En l’espèce, une petite fille naquit en Allemagne en août 2018. Le père la reconnut et souscrivit avec la mère une déclaration d’exercice conjoint de l’autorité parentale auprès de l’état civil allemand. La mère s’étant installée en France avec l’enfant en août 2019, le père déposa le mois suivant une demande de retour de l’enfant auprès de l’autorité centrale allemande.

Le procureur de la République assigna la mère devant un juge aux affaires familiales en février 2020 pour voir ordonner le retour de l’enfant sur le fondement des dispositions de la Convention de La Haye du 25 octobre 1980 sur les aspects civils de l’enlèvement international d’enfants et du Règlement (CE) nº 2201/2003 du Conseil du 27 novembre 2003 relatif à la compétence, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière matrimoniale et en matière de responsabilité parentale.

Saisi parallèlement, le tribunal de la famille de Königstein-am-Taunus transféra provisoirement la résidence de l’enfant chez la mère le mois suivant, mais le père interjeta appel de cette décision. La cour d’appel de Toulouse ayant ordonné le retour de l’enfant en Allemagne en novembre 2020, la mère forma un pourvoi en cassation.

Le pourvoi a été rejeté aujourd’hui par la première chambre civile de la Cour de cassation :

« 8. En premier lieu, selon l’article 3 de la Convention de La Haye du 25 octobre 1980 précitée, le déplacement ou le non-retour d’un enfant est considéré comme illicite lorsqu’il a lieu en violation d’un droit de garde, exercé de façon effective ou qui aurait pu l’être, attribué par le droit de l’État dans lequel l’enfant avait sa résidence habituelle immédiatement avant son déplacement, ce droit de garde pouvant résulter d’une décision judiciaire ou administrative, d’une attribution de plein droit ou d’un accord en vigueur selon le droit de cet État.

« 9. En second lieu, aux termes de l’article 17, le seul fait qu’une décision relative à la garde ait été rendue ou soit susceptible d’être reconnue dans l’État requis ne peut justifier le refus de renvoyer l’enfant dans le cadre de cette Convention, mais les autorités judiciaires ou administratives de l’État requis peuvent prendre en considération les motifs de cette décision qui rentreraient dans le cadre de l’application de la Convention.

« 10. Ayant relevé que la résidence habituelle de [l’enfant] était située en Allemagne, que l’exercice de l’autorité parentale était conjoint en vertu du droit allemand et que [la mère], venue passer des vacances avec sa fille en France, y était demeurée avec elle après le 23 août 2019 malgré l’opposition du père, la cour d’appel, qui n’était pas tenue de procéder à une recherche inopérante concernant une décision relative aux modalités de la garde rendue ultérieurement, en a exactement déduit que le non-retour de l’enfant était illicite. »

Références
Cour de cassation
Chambre civile 1
Audience publique du 8 juillet 2021
Nº de pourvoi : 21-13556

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