Procréation médicalement assistée pour toutes : quelle filiation pour la femme qui n’accouche pas ?

Communiqué de presse des Juristes pour l’enfance

Juristes pour l’enfance

Les députés ont adopté hier l’article 1er du projet de loi bioéthique qui ouvre l’accès à la procréation médicalement assistée aux femmes célibataires et aux couples de femmes.

Notre association exprime son désaccord avec cette mesure car, en dépit de l’amour promis à l’enfant et qui lui sera prodigué, nul n’en doute, elle signifie de facto l’absence de père pour l’enfant.

Cependant, alors qu’arrive la discussion de l’article 4 consacré à la filiation, Juristes pour l’enfance souhaite signaler que le droit offre un moyen d’établir la maternité de la seconde femme tout en préservant les droits de l’enfant et en évitant de bouleverser le droit entier de la filiation.

Il est en effet possible d’établir la maternité de la seconde femme au moyen de l’adoption simple.

  • L’adoption simple est une filiation à part entière, et la femme ainsi déclarée mère ne sera pas moins mère.
  • L’adoption correspond à la réalité de la situation puisqu’elle a pour objet l’établissement d’une filiation en marge du lien biologique.
  • L’adoption simple, surtout, présente l’immense avantage de ne pas fermer à l’enfant toute possibilité d’avoir une lignée paternelle : si l’enfant devenu majeur noue un lien avec le donneur et que tous les deux souhaitent consacrer juridiquement ce lien, la double filiation maternelle n’y fera pas obstacle. De même, la seconde maternité ne sera pas remise en cause par un possible lien entre l’enfant et le donneur puisque les deux pourront co-exister.

L’adoption simple par la seconde femme laisse ainsi la porte ouverte à une éventuelle paternité du donneur si celle-ci était recherchée et réclamée par tous les protagonistes, l’enfant, le donneur mais aussi les mères de l’enfant. Cette hypothèse n’est pas une supposition irréelle ; des demandes dans ce sens sont déjà rapportées à l’étranger mais aussi en France et venant de donneurs notamment : pourquoi dans ce cas s’opposer à la consécration d’une relation vécue, fondée sur un lien biologique et réclamée par tous les protagonistes ? Il y aurait là certainement une atteinte disproportionnée à leur vie familiale, car il n’y a aucune raison de s’opposer à cette demande et par ailleurs le droit offre l’outil qui le permet, à savoir l’adoption simple pour désigner la femme qui n’a pas accouché comme mère.

Enfin, l’établissement de la seconde maternité au moyen de l’adoption laisserait intacte la filiation de droit commun, alors que la reconnaissance conjointe des deux femmes introduit une fragilité pour toutes les familles : en effet, si la loi détache la filiation de droit commun (non adoptive) de la réalité charnelle pour la fonder sur la seule intention, elle donne un fondement légal à la contestation de leur paternité par des hommes qui refusent l’enfant issu de leurs œuvres sous prétexte qu’ils n’avaient pas de projet parental (voir la tribune d’Aude Mirkovic hier : « Ils ne veulent pas être pères, et le projet de loi bioéthique leur donne raison »).

Pour toutes ces raisons, nous demandons de remplacer la reconnaissance conjointe des deux femmes devant notaire par le consentement conjoint à l’adoption simple donné dans les mêmes conditions.

Remarque. Afin de permettre l’adoption simple y compris dans un couple de femmes non marié, ces amendements prévoient des adaptations de la procédure (tout en sachant que la condition de mariage est en passe d’être supprimée par la proposition de loi relative à l’adoption en cours d’examen) :


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