Question sur la situation des enfants en cette période de confinement

Journal officiel de la République française, édition « Débats parlementaires – Sénat », nº 44 S (Q), 5 novembre 2020

Détraigne (Yves), question écrite nº 15239 au secrétaire d’État auprès du ministre des solidarités et de la santé sur la situation des enfants en cette période de confinement [Journal officiel de la République française, édition « Débats parlementaires – Sénat », nº 16 S (Q), 16 avril 2020, p. 1784].

Yves Détraigne (© D.R.)

Yves Détraigne (© D.R.)

M. Yves Détraigne souhaite appeler l’attention de M. le secrétaire d’État auprès du ministre des solidarités et de la santé sur la situation des enfants en cette période de confinement.

Alors qu’ils sont particulièrement vulnérables et qu’une attention particulière devrait leur être accordée, ils semblent être en réalité les grands oubliés.

En cette période de crise, les rôles et places de chacun des acteurs, tant en protection de l’enfance qu’en matière pénale, sont brouillés tant et si bien que ces missions pourtant essentielles ne sont parfois plus assurées au mieux des intérêts des enfants et des adolescents.

Malgré les ordonnances prises dans le domaine de la justice, en matière civile comme pénale, s’agissant de la protection de l’enfance, les situations sont disparates selon les départements et dans nombre d’entre eux, les priorités ne sont plus en mesure d’être assurées : les services de prévention et de protection de l’enfance, que ce soit dans le cadre administratif ou judiciaire, fonctionnent essentiellement par téléphone alors même que ce seul contact par téléphone apparaît insuffisant…

La crise sanitaire conduit également de nombreux foyers à fermer, certains enfants doivent alors retourner à leur domicile dans des conditions mal préparées et sans aucun accompagnement éducatif effectif, ou bien sont brutalement réorientés vers d’autres structures.

En outre, en cette période où l’école ne joue plus son rôle habituel de détection des situations de danger, les inquiétudes sont nombreuses quant aux capacités collectives de détecter d’éventuels problèmes et d’apporter une protection effective aux enfants concernés.

En conséquence, il lui demande de quelle manière il entend intervenir afin de remédier à ces situations délicates qui mettent en danger des enfants.


Réponse du Secrétariat d’État auprès du ministre des Solidarités et de la Santé, chargé de l’Enfance et des Familles publiée dans le Journal officiel de la République française, édition « Débats parlementaires – Sénat », nº 44 S (Q), 5 novembre 2020, pp. 5112-5113.

Adrien Taquet (© Gérald Garitan)

Adrien Taquet (© Gérald Garitan)

La crise sanitaire a eu un impact majeur sur le fonctionnement de l’ensemble des institutions et des services publics, au premier rang desquels les établissements et services sociaux et médico-sociaux. Ainsi, les professionnels, les établissements et les services de la protection de l’enfance ont du s’adapter dans un contexte où les enfants protégés étaient de fait plus nombreux à être accompagnés en journée, avec la fermeture des écoles, collèges, lycées, et où eux-mêmes pouvaient avoir plus de difficultés à s’organiser du fait des mesures gouvernementales de lutte contre la progression de l’épidémie. Il convient en premier lieu de saluer leur forte mobilisation et leur engagement quotidien auprès des enfants protégés et de leurs familles. Pour les appuyer tout au long de cette période, puis dans le cadre du déconfinement progressif, le Gouvernement a engagé plusieurs actions. Pour accompagner au plus près les acteurs de la protection de l’enfance dans ce contexte de crise sanitaire, des recommandations relatives à la continuité d’activité et à l’organisation des structures ont été diffusées auprès des gestionnaires et services départementaux de la protection de l’enfance. Elles concernaient l’ensemble des enfants et des jeunes accompagnés en protection de l’enfance. Ces recommandations ont régulièrement été actualisée en fonction de la situation épidémique sur le territoire. Par ailleurs, la réserve citoyenne et les étudiants en travail social ont été mobilisés, notamment, pour venir en appui aux établissements et services sociaux et médico-sociaux, dont ceux de la protection de l’enfance. Enfin, les professionnels exerçant dans les établissements et services départementaux, publics et associatifs de protection de l’enfance et de protection maternelle et infantile ont fait partie, à compter du 23 mars 2020, des professionnels désignés prioritaires pour bénéficier de la garde d’enfants, de l’accès aux écoles et collèges, de l’accueil en crèche et de la scolarisation de leurs enfants. Comme beaucoup, le secteur avait abordé le confinement avec des doutes, des inquiétudes. Depuis, les remontées de terrain font entendre un son de cloche différent. Au sein des foyers et des institutions, c’est moins d’incidents, de fugues et de violences qui ont été recensés. Le confinement a eu l’avantage inattendu de permettre un recentrage inédit sur l’enfant et sur ses besoins. L’engagement sans faille des professionnels a permis une meilleure prise en charge du quotidien et un meilleur suivi éducatif en lien avec l’éducation nationale. L’opération « Des ordinateurs pour nos enfants » a permis de mettre à disposition du matériel informatique pour éviter les ruptures scolaires. Le Gouvernement entend s’appuyer sur ces réussites. Pendant toute la durée du confinement, un lien constant avec les acteurs de terrain a permis de partager les consignes sanitaires et d’adapter les dispositifs en fonction des contraintes. Cette méthode constructive a porté ses fruits et se poursuit. Le 30 novembre, un rapport du Conseil national de la protection de l’enfance sera remis au Gouvernement sur la gestion de la crise sanitaire, qui tirera des bilans précis. Le Gouvernement a très tôt porté une attention particulière sur la prévention et le repérage des violences faites aux enfants pendant et en aval de cette période. Ainsi, une campagne de communication a été mise en œuvre par le ministère des solidarités et de la santé mobilisant plusieurs chaînes de télévisions, ainsi que la radio, afin d’inciter nos concitoyens à contacter les professionnels du service national d’accueil téléphonique pour l’enfance en danger (SNATED) et en appelant le 119, en cas de doute sur la situation d’un enfant. Pour faire face à l’augmentation du nombre d’appels et continuer à assurer la prise en charge prioritaire des appels de mineurs, le plateau d’écoute du SNATED a, par ailleurs, été renforcé. De plus, des associations de promotion des droits de l’enfance se sont mobilisées pour décharger les écoutants du SNATED en prenant en charge certaines demandes relevant, notamment, du soutien à la parentalité ou de l’accompagnement juridique des victimes. Parallèlement, un formulaire permettant de joindre le SNATED par voie électronique a été déployé sur le site internet du 119, afin de diversifier les canaux de contact et d’en renforcer l’accessibilité, notamment, pour les enfants et les personnes en situation de handicap. Dans un courrier adressé à l’ensemble des présidents de conseil départemental, le secrétaire d’État chargé de la protection de l’enfance leur a demandé de veiller à maintenir certaines missions de façon prioritaire, notamment, l’activité des cellules de recueil et de traitement des informations préoccupantes. Dans le cadre d’un partenariat avec le ministère de l’éducation nationale, un soutien financier a été apporté à plusieurs associations, intervenant en milieu scolaire, pour renforcer la sensibilisation des professionnels au repérage des violences faites aux enfants et leur connaissance des ressources disponibles pour répondre à ce type de situations. Au sein des familles, des craintes avaient rapidement émergé du fait de la forte augmentation des appels à la plateforme 119 « Enfance en danger », + 80 % certaines semaines. S’il ne faut pas nier que des violences intrafamiliales ont sans doute eu lieu, il faut également retenir l’installation d’un véritable réflexe 119. Chacun a été attentif : la part des appels de voisins ou de camarades de classe a par exemple augmenté de près de 40 %. Le Gouvernement réunira l’ensemble des acteurs de la protection de l’enfance le 17 novembre, pour les États généraux de la lutte contre les violences. Cela sera l’occasion d’un véritable retour d’expérience, d’un premier bilan des mesures du plan de mobilisation contre les violences, qui pourront être complétées. D’autres actions sont par ailleurs menées pour continuer à œuvrer à la prévention et à la protection de l’enfance : des états généraux seront prochainement organisés pour compléter les 22 mesures prises au travers du plan de lutte contre les violences faites aux enfants, annoncé le 20 novembre 2019 ; un groupe de travail sur la prostitution des mineurs a récemment été mis en place ; les conclusions des travaux de la commission des 1 000 premiers jours nourrissent de nombreuses mesures en faveur de la prévention et de la protection de l’enfance.


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