Communiqué de presse des Juristes pour l’enfance
Audition par le Comité des droits de l’enfant des Nations unies (CRC-ONU) de la branche Jeunes de Juristes pour l’enfance
Le groupe Nous Enfants, branche Jeunes de Juristes pour l’enfance, a été reçu hier mercredi 8 septembre 2021 en visio par le Comité des droits de l’enfant (CRC) des Nations unies.
Le Comité était représenté par Madame Suzanne Aho Assouma, rapporteure pour la France.
Elle a entendu les jeunes pendant une heure, dans le cadre de la sixième procédure d’examen (voir encadré ci-dessous) par le Comité de la situation des droits de l’enfant en France.
Le groupe était représenté par Anna, quinze ans, et Victor, dix-sept ans, qui ont abordé trois des thèmes soulevés dans le rapport de quarante-huit pages adressé par les jeunes au Comité des droits de l’enfant en juin 2020.
Ravages de la pornographie chez les enfants et les jeunes
Anna et Victor ont déploré le défaut de protection effective des enfants et des jeunes contre l’accès à la pornographie.
Victor a rapporté que, dans le questionnaire diffusé auprès des jeunes entre dix et dix-huit ans, « certains font état de leur détresse en relatant qu’eux-mêmes ou leurs amis se sentent détruits par la pornographie » et que « 75,9 % des jeunes interrogés disent que la première exposition à la pornographie a été par des images pop-up, qui s’affichent sur internet sans qu’on les veuille ».
Il a relevé le « lien entre l’exposition toujours plus précoce à la pornographie et l’augmentation de la violence sexuelle chez les mineurs ou entre mineurs ».
Selon Anna, « le CRC demande à la France de protéger les enfants des images sexualisées d’enfant. C’est déjà bien mais nous ce qu’on voudrait c’est être protégés de toutes les images sexuelles en général et pas seulement celles qui mettent en scène des enfants. »
La rapporteure qui a travaillé pendant de nombreuses années pour lutter contre les abus sexuels et les violences commises à l’égard des enfants, a acquiescé et confirmé que le questionnement du Comité des droits de l’enfant sur ce point avait été trop superficiel.
Inadéquation de « l’éducation à la sexualité » et atteinte au respect des opinions et convictions des enfants dans le cadre scolaire
Anna : « Les adultes dans ces cours-là ne nous apprennent pas du tout à aimer les autres, à être aimé, ils nous apprennent juste à optimiser le plaisir sexuel et nous ça nous choque car ils s’immiscent complètement dans notre vie privée. On a l’impression d’être trahis dans notre désir de vouloir aimer, d’avoir une relation saine avec quelqu’un. Ils nous apprennent juste à avoir des relations sexuelles, à faire des choses dans tous les sens. »
Ils ont dénoncé la violation de leur intimité par les questions déplacées des adultes : « il y a beaucoup de jeunes dans notre questionnaire qui ont été dégoutés et traumatisés par les interventions parce que ça ne respectait pas du tout leur maturité » (Anna).
Ils ont souligné le fait que nombre d’entre eux étaient choqués par des « exercices pratiques » comme placer un préservatif sur un faux sexe ou encore illustrer le thème de l’avortement en crevant un ballon de baudruche placé sous un T-shirt.
La rapporteuse du Comité des droits de l’enfant s’est dite fort intéressée et combien il était important d’avoir leur vision, celles des enfants et des jeunes. Elle a déploré les gestes traumatisants qui pouvaient être imposés à des jeunes car, « si c’est uniquement pour montrer le geste, ce n’est pas la peine, nous sommes des êtres humains, on a des sentiments qui soutiennent chacun des actes que nous posons ».
La complicité hypocrite de la France vis-à-vis de la gestation pour autrui
Anna et Victor ont enfin pointé le double jeu de la France qui interdit la gestation pour autrui sur son territoire mais ferme les yeux sur le démarchage des Français et facilite le retour de ceux partis à l’étranger pour obtenir un enfant. Ils ont dit combien ils étaient choqués par l’exploitation de jeunes femmes pauvres pour la gestation pour autrui en Afrique par exemple dans des baby-farms.
Victor : « Nous les jeunes nous sommes complètement horrifiés par ce marché où les femmes sont traitées comme des animaux de production et les bébés sont remis à ceux qui les ont commandés contre de l’argent. »
Anna : « Nous en tant qu’enfant on sait que c’est pas du tout ça qu’on aurait aimé avoir, on se met à la place des enfants qui naissent de GPA, on ne veut pas du tout que ce soit comme ça. »
Ils aimeraient des sanctions fortes pour les entreprises qui démarchent des Français, et pour dissuader les Français de se rendre à l’étranger pour faire des gestations pour autrui.
Le groupe Nous, Enfants à Genève en juin prochain ?
Pour conclure, Anna et Victor ont réitéré leur vif souhait de pouvoir participer à la réunion des enfants à Genève au mois de juin prochain.
Madame Suzanne Aho Assouma les a encouragés pour finir : « Tout ce que j’ai entendu, ce n’est pas quelqu’un qui vous l’a dit, c’est vous. Je trouve cela fantastique. Franchement, je vous dirai “il faut continuer dans cette lancée”, si vraiment vous êtes décidés à protéger les enfants avec eux et pour eux, franchement il faut continuer. Félicitations. »
- Procédure de sixième examen par le Comité des droits de l’enfant de la situation des droits de l’enfant en France
- Le Comité des droits de l’enfant (Committee on the rights of the child : CRC) de l’Organisation des Nations unies, situé à Genève, est chargé de surveiller l’application de la Convention relative aux droits de l’enfant dans les pays qui l’ont ratifiée. Pour cela, il procède tous les cinq ans à un « examen » des pays qui ont ratifié la Convention.
Le sixième examen de la France a débuté en juin 2020 par l’envoi par des organisations de la société civile, dont le groupe Nous Enfants de Juristes pour l’enfance, d’un rapport sur les atteintes aux droits des enfants qu’elles constataient.
Après consultation de ces rapports, quatre rapporteurs du Comité des droits de l’enfant désignés pour la France – parmi lesquels Madame Suzanne Aho-Assouma – ont adressé à la France une liste de questions préalables (List of Issues Prior to Reporting) lui demandant d’apporter des réponses aux atteintes dénoncées.
Une fois reçues les réponses de la France (au plus tard à la fin du mois de février 2022), les organisations de la société civile pourront adresser au Comité des droits de l’enfant des observations complémentaires via une nouvelle contribution écrite.
Ces échanges écrits seront suivis par une pré-session et une réunion des enfants à Genève qui devrait se tenir en juin 2022.
Quelques semaines plus tard sera organisée la session de dialogue entre le Comité et la France.
Le processus d’examen se clôturera avec les observations que le Comité des droits de l’enfant adressera à la France.
Communiqué archivé au format PDF (427 Ko, 3 p.).
Rapport archivé au format PDF (3.91 Mo, 48 p.).