Détraigne (Yves), question écrite nº 14808 au ministre de l’intérieur sur les violences à l’issue de la manifestation féministe du 7 mars 2020 [Journal officiel de la République française, édition « Débats parlementaires – Sénat », nº 12 S (Q), 19 mars 2020, p. 1319].
M. Yves Détraigne souhaite appeler l’attention de M. le ministre de l’intérieur sur les heurts qui se sont déroulés à l’issue de la manifestation féministe et pacifiste du 7 mars 2020 à Paris, à l’occasion de la Journée internationale pour les droits des femmes.
Il semblerait que, juste avant la fin du parcours déposé, à savoir la Place de la République, les forces de l’ordre aient fait preuve d’une grande brutalité machiste contre les femmes présentes alors même que la manifestation se déroulait comme prévu.
De nombreuses vidéos montrent des jeunes femmes gazées sans sommation, attrapées par les cheveux, frappées, traînées dans le métro ; certaines ont même terminé en garde à vue sans raison valable. Le motif de leur interpellation (manifestation non-autorisée) ne tient pas, le préfet de police de Paris ayant confirmé que cette manifestation avait été déclarée dans un communiqué du 8 mars.
Considérant que de tels événements n’ont pas leur place dans un État de droit comme la France, il lui demande quelles actions il entend entreprendre afin de faire toute la lumière sur cet événement malheureux et s’assurer que ça ne se reproduise plus.
Réponse du ministère de l’Intérieur publiée dans le Journal officiel de la République française, édition « Débats parlementaires – Sénat », nº 36 S (Q), 10 septembre 2020, p. 4145.
La manifestation du 7 mars 2020, organisée à l’occasion de la journée internationale pour les droits des femmes, a fait l’objet d’une déclaration en préfecture. Toutefois, les services de police déplorent ne pas avoir eu de réponse des organisateurs de la manifestation à leur demande de prise de contact au début du rassemblement. Le cortège devait partir de la place des Fêtes et rejoindre la place de la République via les rues du Pré Saint Gervais, de Belleville et du Faubourg du Temple. La fin de l’événement était fixée à 22 h 00. Les forces de police ont été mobilisées pour prévenir tout incident et ont été employées dans le cadre d’une manœuvre permettant d’orienter et de canaliser les manifestants tout au long de l’itinéraire, tout en disposant d’une capacité d’intervention rapide pour faire face à d’éventuels groupes violents. C’est au moment de la dispersion de la manifestation que des tensions sont survenues. 200 à 300 personnes se sont couchées au sol rue de Malte et rue du Faubourg du Temple. Par ailleurs, à plusieurs reprises, de nombreux manifestants se sont dirigés vers l’est de la place de la République, notamment vers les quais du canal Saint-Martin et ont refusé de se disperser, en contradiction avec les termes de la déclaration préalable qui prévoyait la dispersion sur la place. Les forces de l’ordre ont bloqué ces tentatives et ont dirigé les manifestants vers le centre de la place afin que ces derniers puissent emprunter le métro et quitter le secteur. Peu avant minuit, un groupe d’une cinquantaine de personnes a décidé de bloquer l’accès au métro en se positionnant en haut des marches. Afin d’éviter le risque d’une bousculade à l’aplomb des marches, les manifestants les plus récalcitrants ont été accompagnés par les effectifs de police. Cette manœuvre a été réalisée sans violence et aucun blessé n’est à déplorer. Une dizaine d’individus a poursuivi ce blocage et ces derniers ont finalement été dispersés à 00 h 15. Il convient de souligner qu’aucune interpellation n’a été effectuée pour le motif d’une manifestation non déclarée, mais uniquement pour des faits de violences ou de dégradations : une manifestante a été interpellée pour violences volontaires sur agent de la force publique et six autres personnes pour dégradations sur un taxi. Au cours de la soirée, et à chaque fois que nécessaire, des sommations ont été réalisées et les appels à dispersion, qui n’ont pas été suivis d’effet, ont été nombreux. L’emploi très restreint de gaz lacrymogène a été nécessaire, uniquement pour mettre fin aux jets de projectiles qui visaient les fonctionnaires de police. Les forces de l’ordre ont ainsi fait face au cours de leurs opérations, à une foule parfois hostile, véhémente, n’hésitant pas à faire usage de projectiles et à proférer des insultes ; certains n’ont pas hésité à blesser des policiers, dont un à la tête au moyen d’un projectile. Enfin, le ministre de l’intérieur rappelle, que si la mission de la préfecture de police est de garantir à Paris le droit de manifester, ce qui dans un État de droit, constitue un principe essentiel, cette dernière est aussi habilitée en cas de nécessité à faire usage de la force, de manière strictement proportionnée, afin de faire cesser tous troubles à l’ordre public. Cet emploi est toutefois strictement encadré et tout manquement de la part des forces de sécurité intérieure chargées d’assurer l’ordre public, peut faire l’objet, après saisine du procureur de la République, d’une enquête diligentée par les inspections générales pouvant déboucher le cas échéant, à des sanctions disciplinaires.
Question archivée au format PDF (214 Ko, 2 p.).