Que reste-il de cet amour père-fils ou la rancœur posthume d’une mère ?
« Cancer, dis-moi quand c’est, qui est le prochain ? », d’après la chanson de Stromae. Cette maladie encore plus terrible que le présent virus a eu raison de notre ami Olivier Michottey, qui nous a quittés le 23 mai à l’âge de cinquante-six ans, après trois années de combat. Il n’y avait pas que cette maladie qui le rongeait, mais aussi le chagrin d’avoir perdu son fils unique Pierre le 7 août 2015, à l’âge de dix-sept ans et demi, dans des circonstances terribles.
Personnellement, j’avais été contacté par Olivier en mai 1998, quelques mois après la naissance de son fils, car la maman avait voulu mettre un terme à leur relation d’environ cinq années. Il l’avait rencontrée en Bourgogne alors qu’il suivait une formation à Étang-sur-Arroux, en Saône-et-Loire, dans le but d’obtenir le certificat de spécialisation en commerce international du bois.
Olivier était à l’époque gérant de société ; il avait une solide formation dans le domaine du commerce international. Il parlait anglais, allemand et espagnol après avoir fait des séjours en Amérique latine.
Très vite, j’ai vu qu’Olivier avait des qualités d’écoute et de compréhension du système socio-judiciaire. Il avait été animateur, éducateur durant deux ans, et conseiller d’éducation durant trois ans.
D’ailleurs, l’enquêtrice sociale qui avait été diligentée par le tribunal de grande instance de Mâcon, avait souligné que « M. Michottey est décrit comme un homme ayant beaucoup de qualités (notamment humaines) mais est en outre un père qui a envie de remplir son rôle, d’être présent auprès de son fils pour l’aider à grandir et devenir adulte. Il est clair qu’il ne capitulera pas dans sa quête. » Ce propos révèle deux choses :
- Que le système incite les pères à capituler, c’est-à-dire à lâcher prise, car seules les mamans sont considérées légitimes et aptes à élever leurs enfants.
- Qu’Olivier n’était pas quelqu’un de nature à capituler, autrement dit qu’il faisait partie de cette catégorie de personnes qui résistent encore et toujours à l’adversité, autrement dit qu’il était, comme il le disait lui-même, « un guerrier ». Il ne faut pas oublier qu’Olivier, même s’il était né à Paris dans le quatorzième arrondissement, avait des origines bretonnes. Alors résister toujours et encore à l’adversité était dans ses gènes, comme les personnages d’Uderzo et Goscinny. D’ailleurs, sa devise préférée était : « Seule la passion permet à la compétence de s’épanouir. »
C’est pourquoi Olivier, qui n’avait plus d’attaches en Bourgogne et qui donc était retourné en Bretagne auprès des siens, avait proposé que son fils prenne l’avion à Lyon jusqu’à Rennes un weekend par mois et durant les vacances scolaires à partir de ses quatre ans, en payant les billets aller-retour. C’est ce qui sera mis en place durant des années.
Et puis un jour, Pierre a exprimé sa volonté de vivre auprès de son père. Il en avait sans doute assez des vols aller-retour pour voir ce père qui lui manquait : « Papa où t’es ? », pour citer à nouveau Stromae.
Je crois que c’était en 2010 ou 2011 car nous avions, ma compagne Catherine et moi, eu la chance de le voir un jour d’août 2011, alors que nous étions en vacances dans la région. Olivier nous avait gentiment reçus avec sa compagne de l’époque. Ils habitaient à Trégunc, près de Concarneau. Nous avions mangé sur la terrasse et nous avions passé un agréable moment.
Nous échangions par téléphone de temps en temps car il s’était porté volontaire pour être le délégué pour la Bretagne de l’association Le Parti des Enfants du Monde. C’est grâce à lui et à un de ses contacts que nous avions fait connaissance du juge Marc Juston, président du tribunal de grande instance de Tarascon…
En 2014, Olivier était devenu gérant de l’entreprise Breizh Bois Bioclimat Ingenierie.
C’était un an avant le « suicide » de son fils, dont Olivier s’est toujours senti responsable en l’ayant autorisé à aller à cette rave party où il a été piégé. Indigné et révolté par les circonstances de la mort de son fils, Olivier avait monté l’association Pierre & Pix pour que d’autres jeunes gens ne soient plus les proies des marchands de mort.
Mais Olivier n’était pas au bout de ses peines. Après la cérémonie à Lorient, la maman a ramené en Saône-et-Loire l’urne de Pierre et y a fait graver son seul nom, effaçant ainsi toute trace du père. Possessivité ? Vengeance par rapport au fait que Pierre ait voulu vivre auprès de son père ou que celui-ci n’ait pas su le protéger ?
Toujours est-il qu’elle a fait en sorte qu’il ne reste rien de cette relation père-fils.
- Le Parti des Enfants du Monde
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Article paru dans Ouest-France le 3 février 2016 archivé au format PDF (30 Ko, 2 p.).