Détraigne (Yves), Question écrite nº 14366 à la ministre de la justice sur la lutte contre les violences conjugales [Journal officiel de la République française, édition « Débats parlementaires – Sénat », nº 7 S (Q), 13 février 2020, p. 783].
M. Yves Détraigne souhaite appeler l’attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur la lutte contre les violences conjugales, et notamment sur l’éviction du conjoint violent.
La circulaire du 9 mai 2019 relative à l’amélioration du traitement des violences conjugales et à la protection des victimes émanant de la chancellerie est venue réaffirmer le caractère prioritaire de la lutte contre les violences conjugales et encourager l’ensemble des magistrats à poursuivre les efforts engagés au service d’une politique pénale de fermeté à l’égard des auteurs et d’accompagnement des victimes.
Ainsi, dans le but d’assurer l’effectivité de l’éviction du conjoint, la garde des sceaux a précisé que l’ensemble des parquets devaient se mobiliser, notamment dans le cadre des instances partenariales, afin que puisse être mise en place sur chaque ressort une solution d’hébergement de conjoints violents permettant une mise en œuvre de la mesure d’éviction.
Ces dispositions vont dans le sens du développement de protocoles locaux permettant notamment le développement du contrôle judiciaire socio-éducatif (CJSE) avec le prononcé d’une éviction ou dans le cadre du sursis avec mise à l’épreuve prononcé par jugement.
Le contrôle judiciaire s’avère la mesure la plus adaptée. Dans ce cas, chacun s’accorde à reconnaître l’efficacité particulière du CJSE, ordonné par le juge des libertés et de la détention (JLD) dans le cadre de la comparution par procès-verbal (CPPV), auquel sont associées les obligations liées à l’éloignement et à la prise en charge sanitaire sociale et psychologique.
Des dispositifs expérimentaux ont déjà été mis en place par plusieurs parquets, entre les services de l’État, les collectivités territoriales et les partenaires associatifs, afin de permettre l’hébergement du conjoint violent, le cas échéant, en urgence, tout en incluant un accompagnement social et sanitaire.
Considérant que ces expériences concrètes de terrain peuvent être une réponse à ajouter dans l’arsenal de lutte contre la violence conjugale, il lui demande de bien vouloir dresser un bilan exhaustif des dispositifs déjà mis en place par plusieurs parquets.
Réponse du ministère de la Justice publiée dans le Journal officiel de la République française, édition « Débats parlementaires – Sénat », nº 19 S (Q), 7 mai 2020, pp. 2135-2136.
La lutte contre les violences conjugales est une priorité d’action majeure du ministère de la justice comme en atteste la loi du 28 décembre 2019 visant à lutter contre les violences au sein de la famille et les deux circulaires récentes portant instructions de politique pénale en la matière : la circulaire relative à l’amélioration du traitement des violences conjugales et à la protection des victimes du 9 mai 2019 et la circulaire du 28 janvier 2020, qui souligne la nécessité d’évaluer au mieux la situation de danger de la victime afin d’adapter la réponse pénale et de protéger au mieux la victime. À l’occasion des travaux menés par le ministère de la justice dans le cadre du Grenelle des violences conjugales, les parquets généraux ont largement fait part à la direction des affaires criminelles et des grâces des dispositifs mis en œuvre sur leur ressort et des projets en cours, notamment sur les thématiques prioritaires de l’évaluation et de l’éviction du conjoint. Ces rapports ont fait l’objet d’une analyse de la part du bureau en charge de la politique pénale générale et d’une restitution à l’occasion de la réunion des parquets généraux du 9 janvier 2020. En parallèle, le ministère de la justice procède actuellement à une collecte des conventions ayant cours en matière de lutte contre les violences conjugales afin de valoriser ces dispositifs, qui sont mis en ligne sur l’intranet du ministère au fur et à mesure de leur collecte, après un examen attentif. En outre, chaque année, dans le cadre de l’élaboration du rapport annuel du ministère public prévu par l’article 35 du code de procédure pénale, le ministère de la justice recueille les rapports des parquets sur la mise en œuvre de la politique pénale en matière de violences conjugales, permettant ainsi de recueillir les bonnes pratiques et de nourrir les analyses effectuées dans le cadre des projets de réforme en la matière. Ainsi, en 2017, l’ensemble des parquets a été interrogé sur les dispositifs d’éviction du conjoint violent du domicile conjugal, ce qui a permis d’avoir une vision exhaustive des dispositifs déployés en la matière. Dans le cadre du questionnaire relatif au rapport pour l’année 2019, des questions spécifiques portent sur la mise en œuvre de la loi du 3 août 2018 et de la circulaire du 9 mai 2019 relative à l’amélioration du traitement des violences conjugales et la protection des victimes. Ces rapports seront prochainement exploités et synthétisés dans le cadre de la préparation du rapport annuel du ministère public, transmis au Parlement en application de l’article 30 du code de procédure pénale. Enfin, dans le cadre de l’adaptation des réponses judiciaires à la crise sanitaire du Covid19, le ministère de la justice et le secrétariat d’État chargé de l’égalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les discriminations ont mis en place une plateforme d’hébergement des auteurs de violences conjugales évincés du domicile familial par décision judiciaire, qui permet, en complémentarité avec les dispositifs locaux existants, de faciliter l’éviction pendant la durée du confinement. Cette plateforme, opérationnelle depuis le 6 avril 2020, permet aux procureurs et aux juges aux affaires familiales de disposer de places en urgence, sur l’ensemble du territoire national, y compris en Outre-Mer.
Question archivée au format PDF (220 Ko, 3 p.).