Malhuret (Claude), question écrite nº 15361 à la ministre de la justice sur les risques de contournement des héritiers réservataires par l’assurance vie [Journal officiel de la République française, édition « Débats parlementaires – Sénat », nº 16 S (Q), 16 avril 2020, p. 1770].
M. Claude Malhuret attire l’attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur les risques de contournement des héritiers réservataires par l’assurance vie.
Aujourd’hui l’assurance vie occupe, et tant mieux, une place importante dans la composition du patrimoine des épargnants et en conséquence dans la transmission d’un capital décès constitué de l’épargne accumulée non consommée.
Les assurés sont libres d’attribuer ce capital décès aux personnes de leur choix, le plus souvent au conjoint, parfois au détriment des héritiers réservataires. Les juges de la Cour de cassation ont affirmé et répété que l’assurance vie ne saurait être un instrument de contournement de la réserve et, pour protéger la réserve, ils ont recommandé le recours aux primes manifestement exagérées sur le fondement de l’article L. 132-3 [sic – lire : 132-13] du code des assurances.
Pendant très longtemps on a pu se satisfaire de l’absence d’une définition précise de la notion de primes manifestement exagérées permettant aux héritiers réservataires d’agir pour protéger leurs droits réservataires lors du dénouement d’un contrat d’assurance vie. On s’est contenté de la décision des juges, d’autant plus facilement que les situations conflictuelles n’étaient pas fréquentes ou parce que les sommes en jeu n’étaient pas très significatives. Ce n’est plus le cas.
Or, il n’existe aucune disposition législative précisant les conditions de l’exagération. Est-il admissible que les capitaux susceptibles d’échapper aux héritiers réservataires dépendent de l’interprétation que fera le juge de la notion d’exagération, reposant sur l’appréciation de l’utilité du contrat au jour de sa souscription ? On constate des décisions d’autant plus divergentes que les juges doivent apprécier l’utilité du contrat sans pouvoir faire référence à son utilisation, devant se situer au jour du paiement des primes et non au jour du dénouement du contrat.
Il lui demande s’il ne serait pas opportun d’inviter le législateur à fournir des éléments d’appréciation de « l’exagération » sur lesquels pourront s’appuyer les juges du fond pour écarter ou au contraire pour valider les prétentions d’héritiers réservataires craignant d’être privés de leurs droits.
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