Proposition de résolution relative à la prise en compte des droits de l’enfant dans les travaux de l’Assemblée nationale

Proposition de résolution relative à la prise en compte des droits de l’enfant dans les travaux de l’Assemblée nationale

Présentée par les députés membres du groupe La République en Marche et apparentés, une proposition de résolution (nº 2373) relative à la prise en compte des droits de l’enfant dans les travaux de l’Assemblée nationale a été enregistrée aujourd’hui à la Présidence de l’Assemblée nationale.

Exposé des motifs

Mesdames, Messieurs,

La France, patrie des Droits de l’Homme, porte au cœur de ses valeurs le respect des droits de l’enfant.

Son engagement prend racine dans le préambule de la constitution du 27 octobre 1946 qui dispose que « la Nation garantit à tous, notamment à l’enfant […] la protection de la santé, la sécurité́ matérielle, le repos et les loisirs. ».

Il se prolonge au plan international avec comme boussole la Convention internationale des droits de l’enfant (CIDE) adoptée par l’Assemblée générale des Nations unies, il y a bientôt 30 ans, le 20 novembre 1989.

Par cette convention, la France reconnaît que l’enfant est un être à protéger qui dispose de droits fondamentaux. Les droits qui lui sont reconnus considèrent l’enfant dans sa globalité́ : il s’agit de droits d’ordre civils, politiques, économiques, sociaux et culturels. À ce titre, l’article 4 stipule que « Les États signataires s’engagent à prendre toutes les mesures législatives, administratives et autres qui sont nécessaires pour mettre en œuvre les droits reconnus par la présente convention ».

Depuis le 25 septembre 2015, la France est signataire des 17 objectifs de développement durable tels que définis par les Nations unies à échéance 2030 qui l’engage à tout mettre en œuvre pour un monde plus juste et plus durable. Notre feuille de route fixe le cap pour une France entreprenante, solidaire et écologique qui ne vit pas au crédit de ses enfants, ni de leur environnement. Les manifestations de la jeunesse pour la préservation du climat, nous rappellent son droit à vivre dans un environnement sain et son droit à faire entendre sa voix dans le champ public.

À l’échelle du Conseil de l’Europe, la France s’engage dans la défense des droits de l’enfant depuis 1949. En la matière, la stratégie pour la période 2016-2021 du Conseil de l’Europe place l’éradication de toutes les formes de violence faites aux enfants parmi ses priorités. Elle se décline autour de cinq piliers :

  • l’égalité́ des chances pour tous les enfants ;
  • la participation de tous les enfants ;
  • une vie sans violence pour tous les enfants ;
  • une justice adaptée aux besoins de tous les enfants ;
  • les droits de l’enfant dans l’environnement numérique.

À ce titre, la commission des questions sociales, de la santé et du développement durable de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe (APCE) a produit un rapport, publié le 22 mai 2019, qui recommande aux « parlements nationaux [de] s’impliquer davantage dans la mise en œuvre et le suivi de la cible 16.2 des ODD qui lutte contre toutes les formes de violences faites aux enfants, en prévoyant […] la création d’une commission permanente sur les droits de l’enfant ».

En effet, en France, les chiffres [1] des violences faites aux enfants sont inquiétants :

  • 1 enfant est tué dans le cercle intrafamilial tous les cinq jours ;
  • 73 000 cas de maltraitances sont signalés chaque année à la police nationale et à la gendarmerie ;
  • 70 000 enfants restent handicapés à la suite de ces violences chaque année ;
  • 53 % des décès pour maltraitance interviennent entre 0 et 4 ans ;
  • 1 enfant est violé toutes les heures.

Le Comité́ des droits de l’enfant des Nations unies, qui évalue tous les cinq ans la bonne application de la CIDE par la France, a notamment dénoncé, en 2016, ces chiffres alarmants et a recommandé une meilleure coordination des acteurs pour l’application de la CIDE.

Conscient de ces enjeux, le Gouvernement a nommé le 28 janvier 2019 un secrétaire d’État auprès de la ministre des solidarités et de la santé, en charge de la protection de l’enfance. L’un des trois piliers de sa feuille route est la lutte contre toutes les formes de violences.

À la suite d’une large concertation inédite de l’ensemble des acteurs concernés, il a présenté une stratégie nationale de prévention et de protection de l’enfance de 2020 à 2022 qui vise à garantir à chaque enfant les mêmes chances et les mêmes droits. Elle repose sur quatre engagements :

  • agir plus précocement pour répondre aux besoins des enfants et de leurs familles ;
  • sécuriser les parcours des enfants protégés et prévenir les ruptures ;
  • donner aux enfants les moyens d’agir et garantir leurs droits ;
  • préparer leur avenir et sécuriser leur vie d’adultes.

Un autre fléau touche encore trop d’enfants dans notre pays : la précarité. En effet, un enfant sur cinq vit sous le seuil de pauvreté, soit trois millions d’enfants concernés. Cette précarité qui exclut les enfants de notre société n’est pas seulement économique, elle est aussi sanitaire, alimentaire, éducative ou encore culturelle. Un enfant est davantage victime de la pauvreté qu’un adulte dans la mesure où les premières années de sa vie sont déterminantes pour son développement. On ne peut plus accepter ce cycle qui consiste à faire d’un enfant pauvre, un adulte qui vivra toute sa vie dans la pauvreté. C’est l’objectif du plan pauvreté doté de 8,5 milliards d’euros présenté en septembre 2018 par le Gouvernement pour contrer les inégalités de destin dès le plus jeune âge.

La représentation nationale abonde par ses travaux l’action du Gouvernement en se saisissant régulièrement de la question des droits de l’enfant. Cette année le Parlement a adopté une réforme majeure pour garantir le droit à l’éducation au travers du projet de loi pour une école de la confiance rendant ainsi l’instruction obligatoire pour tous les enfants à partir de 3 ans et prolongeant l’obligation de formation jusqu’à 18 ans.

L’adoption de la proposition de loi visant à l’interdiction des violences éducatives ordinaires ou la mission d’information sur l’aide sociale à l’enfance (ASE) dont le rapport a été rendu en juillet 2019, démontrent également cette volonté de prendre en compte l’intérêt supérieur de l’enfant.

Pourtant actuellement, le Parlement ne dispose pas d’organe unique sur lequel s’appuyer pour avoir une vision globale et contribuer aux politiques publiques menées. De nombreuses commissions sont saisies sur des sujets liés aux droits de l’enfant et des avancées sont faites par les commissions des lois, des affaires sociales ou encore des affaires culturelles et de l’éducation qui sont les principales garantes de la prise en compte de l’enfant à l’Assemblée nationale.

Pour éviter la fragmentation et viser une efficience propice à la protection des enfants, pour mettre fin aux violences, pour libérer la parole de l’enfant, pour pouvoir mener une réflexion sur le rôle de la famille, sur la justice chez les mineurs et sur tant d’autres sujets. Il nous faut systématiquement prendre en considération ses droits dans nos travaux parlementaires.

Le combat pour les droits de l’enfant est un combat toujours inachevé dont nous, députés, devons être collectivement les fantassins. Par cette résolution, nous venons réaffirmer notre volonté de préparer un avenir plus juste et durable pour tous les enfants dans le respect de leurs droits.

Proposition de résolution

Article unique

L’Assemblée nationale,

Vu l’article 34-1 de la Constitution,

Vu l’article 136 du règlement de l’Assemblée nationale,

Vu la Convention internationale des droits de l’enfant,

Considérant que le Préambule de la Constitution de 1946 garantit à l’enfant la protection de la santé, la sécurité matérielle, le repos et les loisirs ;

Considérant que la France est signataire de la Convention internationale des droits de l’enfant et qu’à ce titre elle s’est engagée à la respecter ;

Considérant que la France est signataire des objectifs de développement durable de l’Agenda 2030 des Nations unies et qu’à ce titre elle s’engage pour un monde plus juste et plus durable notamment pour les enfants ;

Considérant que l’article 36 du Règlement de l’Assemblée nationale ne mentionne nullement les droits de l’enfant comme une compétence exclusive d’une des commissions permanentes ;

Considérant que l’éradication de toutes formes de violences faites aux enfants est une des priorités de nos politiques publiques ;

Considérant que la lutte contre la précarité infantile et l’exclusion sociale est au cœur des politiques sociales ;

Considérant que les enfants sont des personnes à part entière jouissant de droits fondamentaux ;

Considérant le caractère transversal des politiques publiques en faveur de l’enfance ;

L’Assemblée nationale souhaite :

  • Que dans ses travaux législatifs, ses travaux de contrôle de l’action gouvernementale et d’évaluation des politiques publiques le respect des droits de l’enfant, tels qu’ils sont définis par la Convention internationale des droits de l’enfant, soit pris en compte ;
  • Que soient menés, sous l’impulsion de la Conférence des Présidents et des bureaux des commissions permanentes, toutes missions et travaux parlementaires nécessaires à la préservation des droits de l’enfant ;
  • Que soit garantie la prise en compte de l’intérêt supérieur de l’enfant comme socle de nos politiques publiques ;
  • Que soit réaffirmée la responsabilité de l’État envers tous les enfants résidants en France ;
  • Que soit favorisée la convergence des politiques de l’enfance et de la jeunesse qui sont menées au niveau national et local dans le respect du principe de libre administration des collectivités territoriales ;
  • Que soit mené un travail de réflexion sur l’engagement citoyen et la participation de la jeunesse à l’élaboration des politiques publiques ;
  • Que soient promus les droits de l’enfant dans la diplomatie parlementaire ;
  • Que soit organisé à l’initiative de l’Assemblée nationale un débat annuel sur les politiques publiques menées en faveur de l’enfance.
Note
  1. Source : Rapport de la mission sur les morts violentes d’enfants au sein des familles menés par les Ministères de la Justice, de l’Éducation nationale et des Solidarités et de la Santé de mai 2018.

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