Question sur l’exclusion de l’extension de la PMA du projet de loi relatif à la bioéthique

Journal officiel de la République française, édition « Débats parlementaires – Assemblée nationale », nº 31 A.N. (Q), 30 juillet 2019

Ménard (Emmanuelle), question écrite nº 21950 au ministre de la justice sur l’exclusion de l’extension de la PMA du projet de loi relatif à la bioéthique [Journal officiel de la République française, édition « Débats parlementaires – Assemblée nationale », nº 31 A.N. (Q), 30 juillet 2019, p. 7049].

Emmanuelle Ménard (© D.R.)

Emmanuelle Ménard (© D.R.)

Mme Emmanuelle Ménard attire l’attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur le projet de loi relatif à la bioéthique qui annonce l’ouverture de la PMA (procréation médicalement assistée) aux couples de femmes et l’établissement de la maternité de ces deux femmes à l’égard de l’enfant issu de l’AMP. Si le projet de loi est adopté, une telle double filiation maternelle ab initio (non adoptive) aura des conséquences retentissantes sur le droit de la filiation qui s’applique à 18 millions de familles : c’est pourquoi la recherche d’un mode d’établissement de cette double filiation maternelle ne relève pas de la loi de bioéthique mais d’une loi sur la filiation. La PMA non thérapeutique (pour les femmes mais aussi pour les couples fertiles comme l’indique le projet de loi) ne devrait donc pas être discutée dans le cadre de la loi de bioéthique mais exige un projet de loi spécial modifiant le code civil : si, en 1994, la PMA impliquait des techniques médicalement innovantes, l’insémination de femmes fertiles par des donneurs fertiles n’engage aujourd’hui aucune innovation médicale ni même la médecine tout court. L’adoption par deux femmes ou deux hommes, introduite par la loi du 17 mai 2013, n’a pas eu d’impact sur le titre 7 du code civil relatif à la filiation de droit commun. Au contraire, la PMA pour les femmes introduirait une double filiation maternelle ab initio, engageant le droit de la filiation en général : alors que la filiation de droit commun est fondée sur l’engendrement de l’enfant, au moins vraisemblable (article 320 du code civil), la double filiation maternelle détacherait la filiation de ce fondement pour la construire sur la volonté, l’intention d’être parent. Un exemple permettra d’envisager la portée de cette évolution : comment maintenir l’action en recherche de paternité exercée contre un homme sous prétexte qu’il a engendré l’enfant, alors que la volonté et le projet parental sont promus par ailleurs comme fondement de la filiation ? La présence dans le projet de loi relatif à la bioéthique de cette question de l’extension de la PMA est préjudiciable à la qualité du travail législatif. Puisque d’une part, cette question elle-même engage le droit de la filiation et mérite à ce titre une réflexion d’ensemble et une étude d’impact spécifique. Et d’autre part, pour les véritables questions de bioéthique (modifications génétiques, l’intelligence artificielle, neurosciences), qui risqueraient de passer en second plan des débats alors qu’elles méritent elles aussi toute l’attention du Parlement. Elle lui demande donc s’il ne serait pas opportun de supprimer la question de l’extension de la PMA de la loi de bioéthique, afin de permettre des débats à la hauteur des enjeux en cause.


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