Revue de presse du 18 avril 2019

Revue de presse

Voir notre chronique d’hier.




  • Cordier (Solène), « Le gouvernement souhaite améliorer le système d’adoption », Le Monde, nº 23101, 19 avril 2019, p. 9.

  • Cordier (Solène), « Les inégalités de genre restent un frein pour l’activité des femmes », Le Monde, nº 23101, 19 avril 2019, p. 13.

Voir notre revue de presse du 15 avril dernier



  • Pochic (Sophie), et alii, L’égalité professionnelle est-elle négociable ? Enquête sur la qualité et la mise en œuvre d’accords et de plans égalité femmes-hommes élaborés en 2014-2015, Paris, Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques, collection « Document d’études » (volume 1 : nº 231 ; volume 2 : nº 232), 18 avril 2019.

Commandée par la Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques en 2015, cette étude qualitative vise à éclairer les effets de la « négociation administrée » de l’égalité professionnelle, sous menace de sanctions depuis 2012. Elle explore plus précisément le processus d’élaboration, le contenu, la mise en œuvre et le suivi d’accords spécifiques et de plans unilatéraux en matière d’égalité professionnelle élaborés en 2014 et 2015, et mis en œuvre entre 2014 et 2017, juste avant les récentes évolutions législatives donnant davantage d’autonomie à la négociation collective d’entreprise.

Document d’études, nº 231, 18 avril 2019Le premier volume de cette étude explore ce que produit cette « égalité négociée » en entreprise, à partir d’une analyse de contenu d’un corpus de 186 textes élaborés entre 2014 et 2015, extraits de la base de données D@ccords de la Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques et de la direction générale du Travail, recensant les textes déposés dans les directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi. La construction d’un échantillon raisonné relativement représentatif de l’activité de négociation collective dans ce domaine, au regard du secteur d’activité, de la taille d’entreprise et du type de texte (accord ou plan), a été réalisée en concertation avec la Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques.

La première partie analyse comment le langage du droit du travail, qui infuse les textes, se mélange avec d’autres registres de justification : la rhétorique managériale des bénéfices de la diversité pour la performance, et un horizon plus politique de « représentation équilibrée » des sexes. L’inspection du travail, des experts, différents guides de « bonnes pratiques » et des exemples d’accords glanés sur internet ou collectés par voie syndicale jouent un rôle majeur dans la mise en conformité face à un droit en constante évolution, au prix cependant d’un certain conformisme. Si l’accord de branche est rarement cité comme source directe d’inspiration, la négociation d’entreprise s’avère influencée par d’autres niveaux, dont en premier lieu celui du groupe auquel appartient l’entreprise.

La seconde partie met l’accent sur l’usage des chiffres dans cette négociation unique par son impératif de quantification. L’étude souligne que ce diagnostic chiffré est souvent partiel et parfois partial ; les objectifs chiffrés portent en général sur les moyens, plus rarement sur les résultats, et les indicateurs de suivi ne permettent pas d’évaluer l’amélioration de la situation relative des femmes à moyen terme. Une attention particulière est portée par cette étude à la mesure des écarts de rémunération, souvent relativisés au regard du secteur ou d’un périmètre restreint de calcul. L’étude montre que l’analyse des écarts s’avère souvent frustre, même « sophistiquée » par des logiciels, car elle n’est ni dynamique, ni structurelle et n’interroge jamais les possibles biais discriminants des conventions collectives ou des outils de gestion des ressources humaines.

La troisième partie se concentre enfin sur les types d’actions préconisées par les accords et plans étudiés, afin de saisir les éventuels innovations et mimétismes entre entreprises et secteurs d’activité. L’égalité professionnelle est souvent interprétée de manière restrictive comme synonyme de mixité ou de parité, en négligeant la notion d’égalité des chances, et certains domaines d’action sont priorisés : articulation des temps, formation continue, promotion aux postes à responsabilités et recrutement. L’étude montre l’attention accrue portée à l’objectivation et à la transparence des processus « ressources humaines », à la sensibilisation des managers au risque de discriminations et à l’implication des hommes et des pères, tout en regrettant que l’égalité soit souvent pensée à bas coûts. Néanmoins, si l’égalité femmes-hommes paraît être désormais investie comme un enjeu de business par des grandes entreprises, notamment pour les plus dotées et dans les secteurs en croissance comme la finance et le numérique, l’égalité négociée apporte encore peu de réponses aux soucis des travailleuses du bas de l’échelle, employées et ouvrières (bas salaires, carrières plates, pénibilité du travail, précarité d’emploi et temps partiels imposés).

Document d’études, nº 232, 18 avril 2019Le second volume de cette étude replace les textes dans le contexte de leur élaboration et de leur mise en œuvre grâce à la réalisation de vingt monographies de négociation d’entreprise en matière d’égalité professionnelle réalisées en 2016 et 2017. Cette approche qualitative localisée permet d’évaluer, pour chaque entreprise choisie, la qualité des textes produits et de reconstituer l’ensemble du processus de production et d’application du texte, en confrontant les points de vue des principales personnes impliquées. Les monographies portent sur six secteurs d’activité, dont deux secteurs à prédominante masculine, deux secteurs mixtes et deux secteurs de services ayant une main-d’œuvre majoritairement féminisée (secteurs absents des précédentes études sur le sujet). L’échantillon final permet de faire varier la couverture ou non par un accord de branche, l’implantation géographique, la taille d’entreprise, le taux de féminisation et le type de texte signé (accord ou plan).

La première partie explore la délicate question de la « qualité » de l’accord ou du plan unilatéral, pour montrer les limites d’une approche par la conformité des textes au regard du respect des critères légaux. L’enjeu principal est plutôt la consistance et la pertinence du texte au sens d’actions élaborées en adéquation par rapport aux enjeux spécifiques dans cette entreprise. Le jugement sur la « qualité » du texte varie d’ailleurs suivant les personnes interrogées, leur appréciation de la situation relative des femmes et des hommes, leur expérience personnelle et leur sensibilisation aux questions d’égalité, et enfin leur avis sur les marges de manœuvre des employeurs pour éliminer les inégalités constatées.

La seconde partie s’intéresse au processus de négociation collective et montre comment le contexte local joue sur le contenu final du texte. Elle analyse l’« écosystème » de la négociation de l’égalité professionnelle, qui intègre des acteurs internes et externes à l’entreprise, et leurs interactions. Est soulignée l’influence souvent sous-estimée dans la négociation des consultants et experts, mais aussi des fédérations syndicales (et dans une moindre mesure patronales), et des inspecteurs et inspectrices du travail, chaque acteur ayant un cadrage cognitif et des logiques d’action distinctes. Si certains syndicalistes sont désormais mobilisés et mieux formés sur les questions d’égalité, notamment dans les secteurs mixtes ou à prédominance masculine, ils déplorent que le dialogue social soit souvent instrumentalisé. Les négociations sont souvent menées au pas de charge, en information incomplète et régulées par le siège du groupe financier auquel appartient l’entreprise, ce qui laisse peu de place aux propositions émanant des représentants syndicaux.

La dernière partie se focalise sur la question de la mise en œuvre, et propose une typologie de configurations, souvent reflet de la qualité du dialogue social en général au sein d’une entreprise. Certains textes restent des « accords de papier », notamment dans les petites ou moyennes entreprises et les secteurs de services à prédominance féminine. D’autres textes impulsent quelques actions (notamment sur l’égal accès à la formation, la mixité du recrutement et la parentalité), mais celles-ci s’inscrivent dans une politique sociale patronale, ou un dialogue social managérial, au sens où les représentants du personnel ont peu de prise tant sur son suivi que sur son bilan. Ces deux types de configurations peuvent générer des conflits ou tensions avec les syndicalistes présents, particulièrement lors des renégociations. Seule une minorité d’accords s’inscrivent dans une politique d’égalité négociée et participative, où tous les acteurs et actrices internes, directions comme représentants du personnel, s’accordent sur un diagnostic partagé et s’engagent pour faire vivre l’accord dans tous les actes de gestion et de manière cumulative dans la durée.


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