Sermier (Jean-Marie), question écrite nº 95996 au ministre de la Justice sur la réglementation de la garde des enfants en cas de parent décédé après divorce [Journal officiel de la République française, édition « Débats parlementaires – Assemblée nationale », nº 21 A.N. (Q), 24 mai 2016, p. 4387].
M. Jean-Marie Sermier attire l’attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice sur l’article 403 et suivants du code civil. Il s’interroge sur la garde d’enfant et l’exercice de l’autorité parentale en cas de décès du parent divorcé à qui elles avaient été confiées par décision de justice. Il se demande quelles sont les règles de droit à observer dans le cas où la mère d’un enfant, divorcé du père, n’a pas désigné de tuteur avant son décès (parce que celui-ci a été brutal et imprévisible). Il constate que dans une pareille situation, l’enfant peut être brutalement retiré à son environnement habituel, en particulier au foyer dans lequel il vivait au sein d’une famille recomposée, pour être confié au père avec qui il n’a eu jusque-là que des relations limitées. Il lui demande les marges de manœuvre dont bénéficient le juge des affaires familiales et le juge des tutelles pour préserver l’intérêt de l’enfant, éviter les ruptures brutales et maintenir un lien entre l’enfant et le foyer où il a vécu jusqu’au décès du parent.
Réponse du ministère de la Justice publiée dans le Journal officiel de la République française, édition « Débats parlementaires – Assemblée nationale », nº 42 S (Q), 18 octobre 2016, pp. 8719-8720.
En vertu de l’article 373-2 du code civil, si l’un des père et mère décède, l’autre exerce seul l’autorité parentale. Toutefois, afin d’assurer une stabilité des conditions de vie de l’enfant alors même que ce dernier n’aurait pas entretenu de relations avec son autre parent, différentes mesures peuvent être prises par le juge. Ainsi, le deuxième alinéa de l’article 373-3 prévoit que « le juge peut, à titre exceptionnel et si l’intérêt de l’enfant l’exige, notamment lorsqu’un des parents est privé de l’exercice de l’autorité parentale, décider de confier l’enfant à un tiers, choisi de préférence dans sa parenté. » Le juge peut être saisi par l’un des parents ou le ministère public, qui peut lui-même être saisi par un tiers, parent ou non. L’article 377 du même code prévoit également qu’en cas de désintérêt manifeste ou si les parents sont dans l’impossibilité d’exercer tout ou partie de l’autorité parentale, le tiers qui a recueilli l’enfant peut saisir le juge aux affaires familiales aux fins de se faire déléguer totalement ou partiellement l’exercice de l’autorité parentale. Ces deux conditions ne sauraient toutefois suffire s’il n’est pas démontré que la délégation est conforme à l’intérêt de l’enfant. L’action peut être portée devant le juge aux affaires familiales par le particulier qui a recueilli l’enfant ou par un membre de la famille. Cette délégation a pour effet de transférer à son bénéficiaire l’exercice de tout ou partie de l’autorité parentale. Il ne s’agit toutefois que de l’exercice de l’autorité parentale, le parent survivant restant titulaire de sa fonction. Par ailleurs, en vertu des articles 378 et 378-1 du code civil, les titulaires de l’autorité parentale peuvent se voir retirer totalement celle-ci en dehors de toute condamnation pénale lorsqu’ils mettent manifestement en danger la sécurité, la santé ou la moralité de l’enfant, soit par de mauvais traitements, soit par une consommation habituelle et excessive de boissons alcooliques ou un usage de stupéfiants, soit par une inconduite notoire ou des comportements délictueux, notamment lorsque l’enfant est témoin de pressions ou de violences, à caractère physique ou psychologique, exercées par l’un des parents sur la personne de l’autre, soit enfin par un défaut de soins ou un manque de direction. Le retrait total de l’autorité parentale est ainsi soumis à une double condition liée, d’une part, au comportement incriminé, et, d’autre part, à la caractérisation d’un danger en résultant pour l’enfant. L’action est portée devant le tribunal de grande instance soit par le ministère public, soit par un membre de la famille ou par le tuteur de l’enfant. Elle a pour effet de faire perdre au parent survivant tant l’exercice que la titularité de ses droits. En application de l’article 391 du code civil, le juge des tutelles peut décider, à tout moment et pour cause grave, d’office ou à la requête des parents, alliés ou du ministère public de transformer l’administration légale en tutelle. Cette tutelle ne concernera en principe que les biens du mineur, le parent demeurant titulaire de l’exercice de l’autorité parentale relative à la personne de son enfant. Enfin, s’il s’agit uniquement de préserver la relation entre le beau-parent et l’enfant, la personne qui a noué une relation étroite avec l’enfant du parent décédé peut solliciter du juge aux affaires familiales un droit de visite et d’hébergement sur le fondement des dispositions du deuxième alinéa de l’article 371-4 du code civil. Depuis la loi nº 2013-404 du 17 mai 2013, ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe, ce second alinéa vise désormais expressément le tiers qui a résidé de manière stable avec l’enfant et l’un de ses parents, a pourvu à son éducation, à son entretien ou à son installation, et a noué avec lui des liens affectifs durables.
Question archivée au format PDF (220 Ko, 3 p.).