Question sur la vidéoprotection à l’abord des collèges et lycées

Journal officiel de la République française, édition « Débats parlementaires – Sénat », nº 12 S (Q), 24 mars 2022

Duranton (Nicole), question écrite nº 21558 au ministre de l’Intérieur sur la vidéoprotection à l’abord des collèges et lycées [Journal officiel de la République française, édition « Débats parlementaires – Sénat », nº 11 S (Q), 18 mars 2021, p. 1747].

Nicole Duranton (© D.R.)

Nicole Duranton (© D.R.)

Mme Nicole Duranton souhaite interpeller M. le ministre de l’intérieur au sujet de l’effectivité de la vidéoprotection à l’abord des collèges et lycées.

Le 16 octobre 2020, à 15 h, un élève de 4ème au collège du Bois-d’Aulne à Conflans-Saint-Honorine attend que ses camarades sortent de cours pour les vacances de la Toussaint. Il traîne entre l’arrêt de bus, le parking qui jouxte le terrain de foot et l’entrée de l’établissement, juste devant. Un homme lui propose de l’argent, qu’il accepte. Cet homme, c’est l’assassin de Samuel Paty. Il vivait dans le quartier de La Madeleine à Évreux, dans le département de l’Eure.

L’abord des collèges est une zone particulièrement sensible, où de nombreux actes de harcèlement et d’autres délits, parfois des crimes, ont lieu.

Fontcarrade : un élève du collège âgé de 15 ans avait exhibé un couteau, lame déployée et menacé un autre élève avec. Champigny : deux blessés graves à la barre de fer et au couteau ; l’un âgé de 14 ans, l’autre de 16 ans. Ces violences de jeunes sont partout dans l’actualité.

Or, la vidéoprotection permet à la fois d’éviter un grand nombre de drames (dissuasion) et, en cas de crime ou de délit, permet aux enquêteurs d’identifier et de confondre leurs auteurs.

En effet, les caméras peuvent filmer l’extérieur de l’établissement afin de renforcer la sécurité de ses abords, des accès de l’établissement, des angles morts (flanc de bâtiment, parking) et des espaces de circulation.

Actuellement, dans un collège ou un lycée, la mise en place de caméras pour vidéoprotéger les abords et les accès d’un établissement relèvent d’une décision du chef d’établissement, après délibération du conseil d’administration compétent sur les questions relatives à la sécurité.

Évidemment, si les caméras filment les abords de l’établissement et en partie la voie publique, le dispositif doit être autorisé par le préfet du département. Les conditions de conservation et de traitement des images sont encadrées par la commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL). Le règlement européen sur la protection des données personnelles (RGPD), les articles L. 223-1, L. 251-1 et suivants du code de la sécurité intérieure, les articles 9 du code civil, R. 421 [sic – lire R421-20] du code de l’éducation, 226 [sic – lire 226-1] du code pénal, constituent une solide base légale garantissant la confidentialité des données et les libertés individuelles. La CNIL recommande aux chefs d’établissements concernés d’adopter une « charte d’utilisation de la vidéosurveillance » en impliquant l’ensemble des acteurs (administration, personnel, représentants des parents d’élèves).

Dans le département de l’Eure, le conseil départemental prend en charge à 100 % les frais afférents à l’installation et au fonctionnement quotidien des caméras à l’abord immédiat des collèges. Ce dispositif a été proposé aux 55 collèges du département et, en 5 ans, 45 collèges ont été équipés.

Dans les nouveaux collèges qu’il construit, les dispositifs de vidéoprotection sont désormais préinstallés mais leur activation reste à la main du chef d’établissement. C’est une difficulté, puisque certains conseils d’administration font de cet enjeu de sécurité publique pour les enfants comme pour les enseignants et personnels des établissements un débat politique.

En refusant l’installation ou l’activation du dispositif de vidéoprotection pourtant pris en charge à 100 % par le conseil départemental, ils décident donc de ne pas mettre tous les atouts de leur côté pour mettre davantage en sécurité les élèves et les personnels de leurs établissements.

Elle souhaite lui demander dans quelle mesure il est possible de permettre aux présidents de régions et de départements d’imposer l’installation de dispositifs de vidéosurveillance à l’abord des établissements scolaires dont ils ont la propriété.

Réponse du ministère de l’Éducation nationale, de la Jeunesse et des Sports publiée dans le Journal officiel de la République française, édition « Débats parlementaires – Sénat », nº 12 S (Q), 24 mars 2022, pp. 1592-1593.

Jean-Michel Blanquer (© Jérémy Barande)

Jean-Michel Blanquer (© Jérémy Barande)

Dans une démarche initiée depuis plusieurs années, le ministère de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports (MENJS) n’a eu de cesse de s’engager sur les enjeux liés à la sécurisation des écoles et établissements scolaires eu égard à leur caractère sensible et ainsi de renforcer le niveau de sécurité. Les collectivités territoriales, propriétaires des bâtiments accueillant des établissements scolaires, se sont également fortement mobilisées pour la sécurisation de la communauté éducative face aux risques et menaces pesant sur ces établissements. À ce titre, de nombreux travaux de sécurisation de ces établissements ont été déployés sur l’ensemble du territoire national. En application de l’article R. 421-10 du code l’éducation, le chef d’établissement « en qualité de représentant de l’État au sein de l’établissement […] 3º Prend toutes dispositions, en liaison avec les autorités administratives compétentes, pour assurer la sécurité des personnes et des biens, l’hygiène et la salubrité de l’établissement ». L’article R. 421-20 du même code dispose que : « En qualité d’organe délibérant de l’établissement, le conseil d’administration, sur le rapport du chef d’établissement, exerce notamment les attributions suivantes : (…) 7º Il délibère sur : (…) c) Les questions relatives à l’hygiène, à la santé, à la sécurité (…) ». Afin que soient prises en compte toutes les formes de menace, le MENJS accompagne les chefs d’établissement scolaire dans la mise en œuvre d’une politique de sécurisation globale. Selon l’objectif recherché, les établissements doivent réaliser un diagnostic de sécurité complété par un diagnostic de mise en sûreté si nécessaire, ou encore un plan particulier de mise en sûreté « attentat-intrusion » (1). En complément de ces mesures, afin de lutter contre les violences au sein et aux abords des établissements scolaires, l’installation de moyen de vidéoprotection est fortement recommandée depuis 2009 (2) dans les établissements scolaires les plus exposés aux phénomènes de violence. Les chefs d’établissement mettent ainsi en œuvre toutes les mesures jugées utiles, en lien avec les forces de sécurité intérieure, les préfectures de département et les collectivités territoriales propriétaires des bâtiments, selon d’une part, les vulnérabilités identifiées et propres à chaque établissement et d’autre part, les préconisations priorisées découlant des différents audits. En outre, à la suite à l’attentat du 16 octobre 2020 perpétré contre le professeur Samuel Paty, les enjeux de sécurisation des écoles et des établissements scolaires ont été réaffirmés. Cela s’est traduit par le renforcement du travail partenarial entre les établissements scolaires, les équipes mobiles de sécurité, les services académiques, la police municipale, les forces de sécurité intérieure et les préfectures ainsi que par l’accompagnement et la protection des agents, facilités par une collaboration étroite avec les autorités administratives et judiciaires. La sécurisation des établissements scolaires s’appuie donc sur un panel de mesures associé à une forte approche partenariale. Aussi, eu égard aux compétences dévolues à chaque entité, bien que l’installation d’un moyen de vidéoprotection puisse être envisagée par une collectivité territoriale, sa mise en œuvre relève d’une décision de la part du chef d’établissement consécutive à une délibération du conseil d’administration ou de l’organe spécifiquement compétent sur les « questions relatives à la sécurité » en application des articles susvisés. Néanmoins, la sécurisation des personnes et des biens doit rester un enjeu majeur. Aucun territoire ne doit se sentir épargné. L’entretien d’un dialogue ouvert et nourri sur la mise en œuvre de la politique de sécurisation de chaque établissement scolaire avec l’ensemble des interlocuteurs, dont les collectivités territoriales, en est un des rouages essentiels. En tout état de cause, dès lors qu’un tel dispositif visionne les abords de l’établissement scolaire et la voie publique, une autorisation préfectorale doit être demandée pour les caméras correspondantes. Par ailleurs la Commission nationale de l’informatique et des libertés recommande aux chefs d’établissements concernés d’adopter une « charte d’utilisation de la vidéosurveillance » en impliquant l’ensemble des acteurs (administration, personnel, représentants des parents d’élèves) (3). (1) Instruction du 12 avril 2017 relative au renforcement des mesures de sécurité et de gestion de crise applicables dans les écoles et les établissements scolaires. (2) Circulaire du 14 octobre 2009 relative au déploiement d’équipements de vidéoprotection dans les établissements du second degré les plus exposés aux phénomènes de violence. (3) La vidéosurveillance – vidéoprotection dans les établissements scolaires (CNIL).


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