Revue de presse du 1er février 2020

Revue de presse

  • « Une “concertation” sur le congé après la perte d’un enfant », Le Monde, nº 23348, 2 février 2020, p. 15.

Le Monde, nº 23348, 2 février 2020, p. 15


Cahier de recherche, nº 348, 1er février 2020Les termes de « fragilité » et « vulnérabilité » ont peu à peu pris une place grandissante dans les discours des médias et des pouvoirs publics pour désigner une multitude de situations : handicap, pauvreté, précarité professionnelle, relégation territoriale, etc. De nombreux travaux analysent ces phénomènes. À l’heure où une réflexion est entamée au niveau institutionnel sur une possible fusion et simplification de différents minimas sociaux, et alors que différents mouvements sociaux (Gilets jaunes, grèves relatives à la réforme des retraites) pointent les projecteurs sur différents types de difficultés, cette étude du Centre de recherche pour l’étude et l’observation des conditions de vie dresse un état des lieux des différentes fragilités vécues par la population française – deux Français sur trois souffrent d’au moins une source de vulnérabilité.

L’étude répertorie six causes de vulnérabilités :

  • handicap (participation limitée aux activités et à la vie en société) et santé dégradée (due notamment au vieillissement de la population et aux attentes des plus jeunes) ;
  • isolement social et solitude (isolement relationnel des chômeurs et des personnes âgées, notamment) ;
  • mal-logement (défauts de confort, peu d’offres, précarité énergétique, prix élevé) ;
  • pauvreté monétaire (niveau de vie du foyer) ;
  • précarité professionnelle (chômage, hausse du nombre des contrats courts et des travailleurs pauvres) ;
  • relégation territoriale – sentiment de vivre dans un territoire délaissé par les pouvoirs publics (absence d’équipements, par exemple).

L’étude propose une nouvelle analyse, transversale, qui souligne l’articulation et le cumul entre les différentes fragilités. Cette approche montre que deux tiers des Français sont vulnérables. L’enquête sur les conditions de vie a permis de comprendre comment les différentes fragilités se combinent entre elles, aggravant alors le mal-être des populations. Par exemple, la moitié des personnes ayant un état de santé dégradé (par rapport aux personnes du même âge) présentent aussi un handicap ou une maladie chronique (54 % contre 27 % dans l’ensemble de la population).

L’analyse des données recueillies a révélé six groupes de populations :

  • deux groupes ayant un unique problème lié soit à la santé (état de santé dégradé ou handicap) soit à un problème d’emploi (chômage, précarité ou sous-emploi) ;
  • quatre groupes présentant un cumul de difficultés :
    • isolement social, associé à la pauvreté, aux problèmes d’emploi ou de logement ;
    • mal-logement, souvent cumulé avec des problèmes d’emploi, de pauvreté ou de santé ;
    • pauvreté, parfois associée à des problèmes d’emploi ou de santé ;
    • relégation territoriale, fréquemment associée à la pauvreté, aux problèmes de logement et de santé.

Au-delà de cette classification des groupes fragiles, l’étude apporte également un éclairage sur les convictions politiques et les modes de vie propres à chaque catégorie de population. Ainsi, les personnes souffrant de problèmes de santé sont en majorité moins diplômées, plus âgées et plus propriétaires que la moyenne de la population. Elles ont aussi un certain niveau de confiance vis-à-vis du gouvernement et des institutions, elles sont préoccupées par leur alimentation et proches de leur famille.

À l’inverse, les Français concernés par des difficultés liées à l’emploi sont surtout des célibataires, jeunes, locataires et plus diplômés que la moyenne de la population. L’étude souligne que « 80 % des personnes qui présentent une fragilité sur le marché du travail pensent que la société a besoin de se transformer profondément » (p. 91) et comprennent les actions radicales telles que le blocage de lieux.

Les 11 % de Français confrontés à des fragilités liées à un isolement relationnel sont essentiellement des célibataires (60 %), femmes, sans enfants et ayant un niveau de vie très faible. Cette catégorie manifeste un repli sur soi alimenté par une méfiance en autrui et peu d’attachement aux différents domaines de la vie. Le sentiment d’être délaissé par les pouvoirs publics est très important.

La sur-représentation des femmes se retrouve au sein des groupes combinant des difficultés d’emploi, de mal-logement, de pauvreté ou de santé. Ces vulnérabilités touchent aussi beaucoup de couples avec enfants. Le sentiment de restriction budgétaire y est plus exacerbé que parmi la moyenne des Français. Ces populations sont également plus inquiètes, notamment quant au risque d’agression dans la rue et aux risques alimentaires. Cette souffrance se traduit par une confiance moindre en l’avenir et dans le monde politique.


  • Bordenet (Camille), « Le grand déplacement », Le Monde l’époque, nº 23348, 2 février 2020, pp. 2-3.

Consommation et modes de vie, nº 310, 1er février 2020L’image d’une société française « fracturée » revient à intervalles réguliers dans le débat public avec, d’un côté, des individus entrepreneurs d’eux-mêmes, autonomes, dynamiques et sans difficultés particulières et, de l’autre, des personnes « fragiles », publics des politiques sociales enferrés dans un chômage de longue durée, en prise avec des problèmes de santé, etc. L’enquête « Conditions de vie et Aspirations » du Centre de recherche pour l’étude et l’observation des conditions de vie (voir supra) bat en brèche cette vision dichotomique. Elle montre que les deux tiers de la population se trouvent confrontés à au moins une des six situations de fragilité étudiées dans l’enquête : difficultés de logement, handicap ou santé dégradée, isolement et solitude, pauvreté monétaire, précarité professionnelle, relégation territoriale. Et un tiers fait face à plusieurs de ces difficultés. Il n’existe donc pas d’un côté des personnes autonomes et de l’autre des publics fragiles, mais des accidents de parcours, des moments de vie qui peuvent faire basculer une personne dans une situation où l’écheveau des difficultés devient complexe à démêler. Plutôt que de mettre en place des politiques sociales conçues pour des personnes considérées comme intrinsèquement fragiles, et tenter d’amoindrir ou de réparer les difficultés qu’elles rencontrent, ces résultats invitent à davantage agir en prévention dans une logique d’investissement social qui bénéficiera au plus grand nombre.


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