Congrès annuel 2020 de l’Association française d’études européennes (AFEE), 11 et 12 juin 2020, Université polytechnique Hauts-de-France (Valenciennes)
Le droit de la famille, dans sa dimension civiliste, fortement ancrée dans les cultures nationales des États membres, est une matière qui ne relève pas en principe du droit de l’Union européenne. Pourtant, il n’est plus possible d’affirmer que la matière échappe dans son entier au droit de l’Union. De nombreux aspects de la famille sont sous influence européenne, au point que l’on voit se dessiner les contours d’une « famille européenne ». En ce sens, le droit de l’Union contient une forme de « droit spécial » de la famille, partagé par les États membres, qui complète les droits nationaux de la famille.
Quels sont les sources et les contours de ce droit spécial de la famille et quels outils mobilise l’ordre juridique de l’Union pour le construire ? Comment apprécier ce mouvement d’européanisation de la famille au regard tant d’une approche civiliste et sociologique de la famille, que du sens de l’intégration politique et juridique de l’Union ? Et au-delà, quel avenir imaginer pour ce droit européen de la famille en construction ?
Autant de questions qui nécessitent un travail de recherche collective permettant de conduire une réflexion pluridisciplinaire (droit institutionnel et matériel de l’Union, droit civil de la famille, droit international privé, droit comparé, sociologie, histoire, sciences politiques…) sur l’élaboration progressive de ce droit spécial de la famille dans l’ordre juridique de l’Union.
Un appel à communication, complété par l’invitation de personnalités reconnues, permettra de réunir des chercheurs et praticiens d’horizons divers, porteurs d’éclairages renouvelés et innovants en droit européen de la famille. Un concours de la meilleure « Lettre à la famille européenne » consistant à proposer une vision européenne de la famille sera, par ailleurs, ouvert aux jeunes chercheurs.
Direction scientifique
- Elsa Bernard, Professeure de droit public, Université de Lille (elsa.bernard@univ-lille.fr)
- Marie Cresp, Maître de conférences de droit privé, Université de Bordeaux (marie.cresp@iut.u-bordeaux-montaigne.fr)
- Marion Ho-Dac, Maître de conférences HDR de droit privé, Université Polytechnique Hauts-de-France (marion.hodac@uphfr.fr)
Comité scientifique
- Pr. Elsa Bernard, Université de Lille
- Dr. Marie Cresp, Université de Bordeaux
- Pr. Marc Fallon, Université de Louvain (UCLouvain)
- Pr. Geoffrey Willems, Université de Louvain (UCLouvain)
- Dr. Marion Ho-Dac, Université Polytechnique Hauts-de-France (UPHF)
- Pr. Anastasia Illiopoulou, Université de Créteil (UPEC)
- Pr. Sandrine Sana, Université de Bordeaux, en délégation à l’Université de Polynésie française
I. Argumentaire
La recherche vise, dans un premier temps, à mettre en lumière l’acquis européen en matière de droit de la famille, dans ses aspects de droit matériel comme de droit international privé. Le droit de la famille de l’Union, comme droit spécial, à côté de la diversité des droits nationaux de la famille, doit ainsi être identifié. Dans un second temps, c’est l’essence d’un tel droit spécial de la famille qu’il faudra questionner : sa signification théorique et politique dans l’Union d’aujourd’hui, autant que son devenir dans l’Union de demain. Ce droit spécial de la famille a-t-il vocation à demeurer fragmentaire à côté des droits nationaux des États membres ou, au contraire, à se densifier pour offrir aux citoyens et résidents européens un droit commun de la famille ?
Deux axes de réflexion sont suggérés pour mener à bien la recherche ; ils pourraient utilement servir de repère pour les chercheurs proposant une communication, en mentionnant l’axe dans lequel ils entendent s’inscrire prioritairement.
1. Appréhender le droit de la famille de l’Union
La famille, dans sa dimension matérielle, échappe, en principe, au droit de l’Union dans la mesure où le droit civil de la famille ne relève pas des compétences européennes. Seules les règles de droit international privé permettent explicitement aujourd’hui au législateur de l’Union d’adopter des textes relatifs au droit de la famille « transfrontière » (article 81 TFUE). De telles règles existent ainsi en matière de désunion internationale et de droit patrimonial international de la famille. Pourtant, au fil des années, un constat s’est peu à peu imposé : les prémices d’un droit matériel de la famille, de source européenne, sont apparues.
1.1. Contenu
Ces éléments de droit européen de la famille, partagés par les États membres, complètent ainsi la multiplicité des droits nationaux. Ils jouent le rôle d’un droit spécial, à géométrie variable selon ses domaines d’interventions (libertés de circulation, fonction publique de l’Union, droit européen de l’immigration, droit social de l’Union, droit international privé…). L’objectif est alors, dans une perspective dynamique et comparative, de présenter son contenu et de mesurer non seulement son étendue et ses caractéristiques, mais aussi son degré d’originalité par rapport aux droits internes des États membres.
1.2. Outils
L’apparition de ce droit spécial de l’Union, encore parcellaire et éclaté, s’explique par la combinaison de plusieurs facteurs qu’il est proposé d’étudier. Le droit de l’Union recèle en lui-même une dimension familiale, en ce sens qu’il structure et réglemente de nombreux aspects de la vie des personnes sur un territoire donné. C’est ainsi, notamment, que les compétences traditionnelles de l’Union en matière économique ont rejailli sur la vie familiale des Européens. L’essor de la libre circulation des personnes et, plus globalement, de l’espace de liberté, de sécurité et de justice, n’a fait qu’accroître ce constat, de même que l’influence croissante des droits fondamentaux, à travers tant la jurisprudence de la Cour EDH que l’application plus récente de la Charte des droits fondamentaux de l’Union. Partant, les différents outils mis en œuvre par l’Union et ses différents acteurs contribuent, jour après jour, à façonner les contours de ce droit de la famille de l’Union.
2. Apprécier le droit de la famille de l’Union
La famille n’est, à ce jour, saisie par le droit de l’Union que de manière ponctuelle et fragmentée. Il en résulte que le droit européen de la famille est aléatoire : son existence dépend des choix politiques des acteurs mettant en œuvre les outils européens. Il est également incomplet puisqu’il ne régit pas l’intégralité des réalités sociologiques et juridiques que recouvrent respectivement la notion et le droit de la famille. Il est, enfin, à géométrie variable car le contenu donné à ce droit n’est pas le même selon qu’il s’agit de la famille du citoyen européen, du ressortissant d’État tiers ou du travailleur, ou encore de la famille appréhendée par les mécanismes de droit international privé… Il en résulte par là même un questionnement relatif à l’articulation des normes et des méthodes, en matière familiale, au sein de l’ordre juridique de l’Union.
2.1. Sens
Dans ce contexte, se pose la question du sens, c’est-à-dire de l’utilité, du besoin mais aussi peut-être de l’efficience, de ce droit de la famille de l’Union en construction dans l’espace européen. Pour y répondre, il pourrait être nécessaire de préciser davantage la conception européenne de la famille ou des familles. L’analyse du sens du droit européen de la famille variera nécessairement selon le point de vue adopté : celui des peuples nationaux, des citoyens européens mobiles, des ressortissants d’États tiers vivant dans l’Union ou aspirant à y vivre, des États ou encore de l’Union… La question de la conciliation de ces points de vue s’ajoute alors à la réflexion.
2.2. Devenir
L’évolution future du droit de la famille de l’Union dans un sens quantitatif (élargissement de son domaine d’intervention, rapports avec les États), et peut-être surtout qualitatif (coordination, harmonisation, unification, rationalisation, articulation…) présenterait un certain nombre d’avantages. Dans le même temps, une telle tendance ne manquerait pas de se heurter à de sérieuses difficultés d’abord politiques, puis techniques. S’agissant d’un possible approfondissement du droit européen de famille, la recherche serait double : le contenu prospectif de la matière et son articulation avec les droits nationaux de la famille.
II. Modalités de soumission et de publication
Les chercheurs et praticiens du droit intéressés par ce projet de recherche sont invités à envoyer leur proposition de contribution aux membres de la Direction scientifique (v. adresses e-mails mentionnées ci-dessus). Seront accueillies avec un intérêt particulier les contributions collectives proposées par deux ou trois chercheurs de spécialités et/ou de culture juridique différentes.
Les contributions prendront la forme d’un résumé (max. 10 000 caractères, espaces compris) rédigé en français ou en anglais, présentant le thème retenu, les objectifs et l’intérêt de la contribution, le plan envisagé et les principales références (normatives, bibliographiques…) au cœur de l’analyse.
Les contributions reçues feront l’objet d’une sélection par le Comité scientifique après avoir été anonymisées par la Direction scientifique.
L’envoi de la contribution pourra, à titre facultatif, être accompagné d’une rapide présentation de leur auteur (max. 3 000 caractères espaces compris).
Les actes du colloque sont destinés à être publiés à l’automne 2020.
L’attention des contributeurs est attirée sur le fait que les contributions écrites devront être rédigées (en anglais ou en français) et envoyées aux membres de la Direction scientifique avant le congrès des 11 et 12 juin. Un bref délai sera laissé aux auteurs à l’issue du congrès pour, s’ils le souhaitent, apporter de légères modifications à leur contribution originale afin d’intégrer des éléments nouveaux mis en lumière par d’autres présentations ou lors des débats.
III. Calendrier
- Date limite d’envoi des propositions de contribution : 13 janvier 2020
- Réponse aux intervenants : semaine du 2 mars 2020
- Remise de la contribution écrite : 28 mai 2020
- Dates du colloque : 11 et 12 juin 2020
- Remise des contributions finales : 22 juin 2020
- Publication : automne 2020
IV. Jeune doctrine et concours
La jeune doctrine est invitée à apporter un regard neuf, critique et prospectif sur les relations entre Union européenne et famille. L’appel à communication est ainsi ouvert, aux mêmes conditions (v. ci-dessus), aux doctorants, docteurs et post-doctorants.
Un concours de la meilleure « Lettre à la famille européenne » est également lancé. Il s’agit de proposer un texte court (max. 6 000 signes, espaces compris) commençant par « Chère famille européenne », consistant à proposer une vision européenne de la famille. À l’heure où l’on ne cesse de s’interroger sur le sens de la construction européenne, penser la famille européenne pourrait offrir une voie de renouvellement politique pour l’Europe. Une lecture de la meilleure lettre, c’est-à-dire de la plus convaincante et originale, est prévue en clôture du colloque et la lettre sera publiée dans les actes du colloque.
Les lettres reçues seront soumises au processus de sélection par le Comité scientifique après avoir été anonymisées par la Direction scientifique.
Le même calendrier (v. ci-dessus) que pour les contributions au congrès s’applique et un même chercheur « jeune doctrine » peut proposer tout à la fois une contribution et une lettre.
Appel archivé au format PDF (437 Ko, 8 p.).