Question sur l’interruption volontaire de grossesse

Assemblée nationale

Elimas (Nathalie), Question au gouvernement nº 1795 sur l’interruption volontaire de grossesse [Journal officiel de la République française, édition « Débats parlementaires – Assemblée nationale », nº 32 A.N. (C.R.), 21 mars 2019, pp. 2734-2735].

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Elimas.

Nathalie Elimas (© D.R.)

Nathalie Elimas (© D.R.)

Mme Nathalie Elimas. Madame la ministre des solidarités et de la santé, la semaine dernière, le Syndicat national des gynécologues et obstétriciens de France a appelé ses adhérents à « faire scandale et être prêts à arrêter la pratique des IVG »…

Mme Sylvie Tolmont. C’est une honte !

M. Erwan Balanant. Scandaleux !

Mme Nathalie Elimas. …utilisant cette menace comme un moyen de faire pression sur votre ministère sur un tout autre sujet.

En France, pays de Simone Veil où l’IVG est un droit garanti par la loi, on ne saurait laisser place à un tel chantage. (Applaudissements sur les bancs des groupes MODEM, LaREM, UDI-Agir, SOC, FI et GDR, ainsi que sur plusieurs bancs du groupe LR.)

Vous avez d’ailleurs dénoncé, madame la ministre, une « prise en otage des femmes ». Je suis totalement d’accord avec vous.

Je veux rappeler que l’IVG constitue un acquis majeur et a marqué une étape essentielle dans la conquête de la liberté la plus fondamentale pour les femmes, celle de disposer librement de leur corps. (Applaudissements sur les bancs des groupes MODEM, LaREM, UDI-Agir, SOC, FI et GDR.)

Simone de Beauvoir avait dit : « N’oubliez jamais qu’il suffira d’une crise politique, économique ou religieuse pour que les droits des femmes soient remis en question. » Quarante-quatre ans après la loi Veil, cette mise en garde est plus que jamais d’actualité, tant les attaques visant à remettre en cause l’IVG demeurent en France, en Europe et dans le monde. Il est donc essentiel de ne jamais baisser la garde et de toujours protéger la liberté de choix donnée aux femmes.

Madame la ministre, pouvez-vous nous indiquer quelles suites le Gouvernement compte donner à cette affaire et quelles sanctions sont ou pourraient être envisagées pour condamner fermement cette prise de position absolument inacceptable ? (Applaudissements sur les bancs des groupes MODEM, LaREM, UDI-Agir, SOC, FI et GDR, ainsi que sur plusieurs bancs du groupe LR. – Mmes et MM. les députés des groupes MODEM, LaREM, UDI-Agir, SOC, FI et GDR se lèvent, de même que M. Bernard Deflesselles.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre des solidarités et de la santé.

Agnès Buzyn (© UNAF)

Agnès Buzyn (© UNAF)

Mme Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé. Comme vous, madame la députée, je juge évidemment ce communiqué [1] du Syndicat national des gynécologues et obstétriciens de France totalement scandaleux. Il menace d’un refus spécifique d’un acte – c’est déjà rare –, et pas n’importe lequel ! L’interruption volontaire de grossesse est un acte militant, un acte signifiant. Ce n’est pas digne d’un syndicat. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, MODEM, SOC et GDR, ainsi que sur plusieurs bancs du groupe UDI-Agir.)

Dès que j’en ai eu connaissance, j’ai dénoncé le caractère inadmissible de ces menaces destinées à « se faire entendre » – je cite le communiqué [1]. Vous l’avez dit, ces menaces vont à l’encontre du respect inconditionnel du droit à l’IVG garanti dans notre pays. Je regarde s’il peut s’agir juridiquement d’un délit d’entrave.

M. Erwan Balanant. Très bien !

Mme Agnès Buzyn, ministre. Ces nouvelles déclarations sont inacceptables de la part d’un syndicat qui entend représenter les gynécologues obstétriciens. Cette profession se doit d’être au plus près des souffrances des femmes et d’accompagner ces dernières, notamment dans ce moment très difficile et très douloureux qu’est l’interruption volontaire de grossesse. En aucun cas une telle prise en otage des femmes ne servira de levier de négociation avec mon ministère. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, MODEM, SOC et GDR, ainsi que sur plusieurs bancs des groupes LR, UDI-Agir et FI.) En aucun cas une telle prise en otage des femmes ne peut non plus servir à la médiatisation d’un dossier. En tout cas, si médiatisation il y a eu, elle ne met pas à l’honneur ce syndicat ni les professionnels qu’il représente. Je le regrette très sincèrement. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, MODEM, SOC, FI et GDR, ainsi que sur plusieurs bancs des groupes LR et UDI-Agir.)

Note de P@ternet
  1. Il ne s’agit pas d’un communiqué mais d’un article de Jean Marty (ancien président du Syndicat national des gynécologues obstétriciens de France) publié dans une newsletter adressée aux 1 600 adhérents du syndicat le mardi 12 mars dernier, dont on trouvera un extrait ci-dessous. On peut lire les explications de l’auteur dans l’entretien qu’il a accordé le lendemain au magazine Causette : Cuxac (Anna), « Le Syngof prend en otage les femmes qui ont besoin d’une IVG », Causette, 13 mars 2019.

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