Question sur les mariages blancs

Journal officiel de la République française, édition « Débats parlementaires – Sénat », nº 50 S (Q), 20 décembre 2018

Savin (Michel), Question écrite nº 4957 à la ministre de la justice sur les mariages blancs [Journal officiel de la République française, édition « Débats parlementaires – Sénat », nº 20 S (Q), 17 mai 2018, pp. 2317-2318].

Michel Savin (© D.R.)

Michel Savin (© D.R.)

M. Michel Savin attire l’attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice sur les suspicions de mariages blancs qui s’imposent à de nombreux maires, en amont de la célébration de ceux-ci, l’un des contractants se situant en situation irrégulière.

Malgré la mise en œuvre d’une procédure pour situation irrégulière, les élus sont déboutés dans leur action auprès du tribunal, le procureur rappelant que le seul fait qu’un des futurs époux soit en situation irrégulière ne justifie pas de surseoir, ni de s’opposer au mariage.

Lorsque le défaut d’intention conjugale est suspecté, l’enquête diligentée en amont de ces mariages est illusoire car celui-ci est consacré entre deux personnes majeures, consentantes, dont l’une des deux peut être sincère.

Le Conseil constitutionnel a, certes, estimé que le respect du principe de la liberté fondamentale du mariage s’opposait à ce que le caractère irrégulier du séjour fasse obstacle, par lui-même, au mariage, cependant, devant une immigration croissante, difficilement contrôlée, que le Gouvernement a pour objectif de maîtriser, il lui demande quelles mesures il compte prendre, afin de dissuader les agissements de ceux qui visiblement contractent mariage à la seule fin d’obtenir un titre de séjour ou de faciliter l’acquisition de la nationalité française.


Réponse du Ministère de la justice publiée dans le Journal officiel de la République française, édition « Débats parlementaires – Sénat », nº 50 S (Q), 20 décembre 2018, p. 6632.

Nicole Belloubet (© Guillaume Paumier)

Nicole Belloubet (© Guillaume Paumier)

Le ministère de la justice est sensibilisé à la lutte contre les mariages contractés à des fins étrangères aux droits et obligations matrimoniaux énoncés aux articles 212 et suivants du code civil, mariages classiquement qualifiés de « simulés » ou « de complaisance » ou encore couramment de « mariages blancs » ou « mariages gris ». Les maires, adjoints au maire et autres officiers de l’état civil, ont en cette matière un rôle central à jouer en amont. Ils sont en effet les seuls à pouvoir détecter certains indices, au cours de la constitution du dossier ou encore lors de l’audition des époux et saisir le procureur de la République afin qu’une enquête soit diligentée. La jurisprudence rendue en matière de mariages simulés ainsi que l’expérience de certains parquets et de certaines communes permettent de lister un certain nombre d’indices ou d’indicateurs de simulation du mariage très divers tels que l’indication d’une adresse fausse, les retards répétés et non justifiés pour produire des pièces du dossier de mariage, les projets de mariages successivement reportés ou annulés, la présentation du dossier de mariage et accomplissement des diverses formalités par un seul époux sans que l’autre n’y soit jamais associé, l’existence de projets de mariages de couples différents comportant les mêmes témoins, l’intervention dans plusieurs dossiers de mariage d’une même personne servant d’intermédiaire voire d’interprète, l’existence de divorces et remariages multiples dissouts par divorce à des dates rapprochées pour l’un des conjoints. L’examen du dossier de mariage et l’enquête éventuellement diligentée sont ainsi indispensables et permettent, s’il y a lieu, au procureur de la République de s’opposer à la célébration du mariage, dans le respect de la convention européenne des droits de l’homme et de notre Constitution. Le dispositif légal mis en place s’attache donc à concilier les deux impératifs que sont la liberté fondamentale du mariage et la lutte contre les mariages frauduleux.


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