L’utilisation du barème de pension alimentaire par les cours d’appel alors que la Cour de cassation a censuré cette pratique : un avatar du biais sexué

Euros (© D.R.)

En mars 2012, une étude statistique du ministère de la Justice montrait que les juges d’appel tendaient à appliquer le barème du ministère de la Justice pour fixer le montant de la contribution à l’entretien et l’éducation de l’enfant, dite pension alimentaire. Les auteurs écrivaient :

« Il apparaît donc au total que la table de référence indicative est à plusieurs égards validée par cette analyse des pratiques antérieures des juges d’appel. »

Or, la table de référence (ou barème) du ministère de la Justice définit un montant de pension alimentaire étant en contradiction avec la loi, en ne s’appuyant que sur les trois critères suivants :

  • les revenus mensuels nets du parent débiteur (avant prélèvement de l’impôt),
  • le type de droit de visite et d’hébergement (réduit, classique ou alterné),
  • le nombre d’enfants concernés.

Ce barème n’a pas de valeur juridique contraignante (bien au contraire) et souffre de plusieurs écueils, violant l’article 371-2 du code civil. En effet, selon cet article :

« Chacun des parents contribue à l’entretien et à l’éducation des enfants à proportion de ses ressources, de celles de l’autre parent, ainsi que des besoins de l’enfant. »

Il y a donc trois critères :

  • les ressources du parent débiteur,
  • les ressources du parent créancier,
  • les besoins de l’enfant.

À cet égard, le 23 octobre 2013, soit un an et demi après la publication de l’étude, la Cour de cassation allait censurer l’utilisation du barème pour fixer une pension alimentaire, précisément parce que ce barème ne prenait en compte ni les besoins de l’enfant ni les facultés contributives des deux parents (qui dépendent en outre des charges).

En somme, nous avons là un paradoxe d’une grande ironie : voici une preuve statistique officielle du ministère de la Justice que les revenus du parent créancier, les charges des parents et les besoins de l’enfant ne sont pas suffisamment ou pas du tout pris en compte dans la fixation de la pension alimentaire par les cours d’appel appliquant le barème de ce même ministère de la Justice, en contradiction avec la jurisprudence de la Cour de cassation et le code civil.

Il convient de garder à l’esprit les disparités sexuées en matière de pension alimentaire : en 2012, quand l’enfant réside chez la mère suite à un divorce, le versement d’une pension alimentaire prédomine dans 84 % des cas alors que ce chiffre n’est que de 50 % lorsqu’il s’agit des « pères résidents [1] ». Dans la même veine, 97 % des parents débiteurs sont des pères [2].

Nous allons donc examiner de plus près ce biais judiciaire statistiquement documenté, le biais des chercheurs ayant réalisé l’étude et le biais du ministère de la Justice qui persiste à diffuser ce barème, par ailleurs promu par des juristes, notamment des avocats.

L’utilisation du barème du ministère de la Justice est illicite selon la Cour de cassation

Le juge de cassation affirme dans sa jurisprudence :

« Attendu que, pour condamner M. X… à verser une contribution à l’entretien et à l’éducation de l’enfant, l’arrêt énonce, d’une part, que la table de référence “indexée” à la circulaire du 12 avril 2010 propose de retenir pour un débiteur, père d’un enfant, disposant d’un revenu imposable de 1 500 euros par mois et exerçant un droit d’accueil “classique” une contribution mensuelle de 140 euros, d’autre part, que l’exercice d’un droit d’accueil restreint augmente, de façon non négligeable, les charges du parent au domicile duquel l’enfant réside ;

« Qu’en fondant sa décision sur une table de référence, fût-elle annexée à une circulaire, la cour d’appel, à laquelle il incombait de fixer le montant de la contribution litigieuse en considération des seules facultés contributives des parents de l’enfant et des besoins de celui-ci, a violé, par fausse application, le texte susvisé. »

Le biais judiciaire mis en évidence par l’étude

Les auteurs de l’étude écrivent :

« Une analyse statistique des pratiques des juges en appel valide largement le choix des critères retenus pour le barème. L’application de ce barème aboutit à des montants moyens et médians proches de ceux des juges en appel. »

Sayn (Isabelle), Jeandidier (Bruno), Bourreau-Dubois (Cécile), op. cit., p. 1.

En d’autres termes, les juges d’appel validaient, dans leur pratique, un barème violant la loi aux dires même du juge de cassation !

Les auteurs montrent en substance, avec leur tableau 1 où figurent les résultats de quatre modèles de régression statistique permettant de mesurer le lien entre des facteurs explicatifs et le montant de la pension alimentaire, que les facteurs déterminants dans la fixation de la contribution par les cours d’appel sont avant tout – et de très loin – les revenus du parent débiteur, puis le mode de résidence et de droit de visite et d’hébergement et le nombre d’enfants, mais l’on peut voir « ns », c’est-à-dire statistiquement « non significatif », pour le revenu du parent créancier, ce qui est en contradiction avec l’article 371-2 du code civil, comme nous l’avons déjà vu. Ces rédacteurs issus du monde académique le confirment : « Ainsi, les juges d’appel ne semblent pas tenir compte du revenu du parent créancier [3]. »

Le fait que le parent débiteur perçoive des revenus du capital est aussi statistiquement significatif.

Il en va de même pour les charges (surtout) du créancier : on peut lire « ns », c’est-à-dire « non significatif », quant à la fixation de la pension alimentaire ! De la même façon, le fait de vivre en couple ne compte guère, alors que ce facteur devrait influencer le montant dû puisque, dans ce cas de figure, les charges sont partagées au sein du ménage, par convention par moitié. Les universitaires écrivent ainsi :

« En outre, l’information peut-être la plus importante de cette deuxième régression tient à la faible augmentation du coefficient d’ajustement (R² ajusté) : la prise en compte d’informations objectives additionnelles apporte peu à la compréhension de la variance des montants de CEEE, ce qui conforte le choix de la table de référence de se limiter à seulement quatre paramètres. »

Sayn (Isabelle), Jeandidier (Bruno), Bourreau-Dubois (Cécile), op. cit., p. 2.

Les besoins de l’enfant ne sont même pas pris en compte dans le modèle statistique, en contradiction avec la jurisprudence de la Cour de cassation !

Fait intéressant, dans le modèle 3, l’on constate un biais sexué, les pères étant pénalisés : à caractéristiques comparables, le fait d’être un père débiteur amène les cours d’appel à fixer un montant de pension alimentaire plus élevé d’une cinquantaine d’euros. Mais ce biais disparaît dans le modèle 4 dès lors que les parties ont fait des propositions quant au montant de la pension alimentaire.

Le biais des chercheurs ayant réalisé l’étude

Contrairement à ce qui a été déjà expliqué quant au caractère illicite de l’application de ce barème, les trois chercheurs ne formulent aucune critique sur ce point, mais au contraire vont jusqu’à prétendre :

« La construction de la table de référence repose sur l’article 371-2 du code civil, sur quelques principes économiques et juridiques et sur la volonté de proposer un outil facultatif et simple d’utilisation, de manière à ce qu’il soit facilement mobilisable.

« Les besoins de l’enfant (frais d’entretien et d’éducation) sont évalués à partir du concept économique de coût de l’enfant, celui-ci correspondant au revenu supplémentaire dont doit disposer une famille avec enfants pour avoir le même niveau de vie qu’une famille sans enfant. »

Sayn (Isabelle), Jeandidier (Bruno), Bourreau-Dubois (Cécile), op. cit., p. 1.

Or, non seulement nous avons vu que les besoins de l’enfant ne sont ni pris en compte dans le barème ni dans la jurisprudence des cours d’appel analysées par ces trois auteurs, mais surtout la table de référence ne repose pas sur l’article 371-2 du code civil mais le viole, comme l’a dit la Cour de cassation.

Certes, au moment de la rédaction de leur article, les chercheurs n’avaient pas connaissance de cet arrêt, qui allait paraître seulement l’année suivante, mais ils pouvaient réaliser par la simple lecture de l’article 371-2 du code civil que le barème (mais aussi les juges d’appel) ignorait les revenus du parent créancier, ne procédait pas à une analyse des ressources et des charges et de plus ne procédait à aucune évaluation chiffrée explicite des besoins de l’enfant [4].

Mais, les rédacteurs de l’article statistique prétendent que la table de référence a intégré implicitement le coût de l’enfant à partir des échelles d’équivalence estimé par l’Institut national de la statistique et des études économiques, à partir de l’échelle d’équivalence dite de l’OCDE modifiée [5]. Mais ces échelles d’équivalence sont critiquées dans la littérature pour leur manque de réalisme [6]. Les dépenses réelles au profit d’un enfant supplémentaire dans le ménage ne correspondent pas forcément à la valeur d’usage dont le rejeton bénéficie, en raison du redéploiement des ressources mais aussi de l’existence de biens collectifs au sein du ménage : une salle de bureau peut être transformée en chambre, le gaspillage alimentaire peut être réduit, de même que des consommations de luxe ou de loisirs (restauration, voyages), partager des biens préexistants tels qu’un jardin, un véhicule ou un jardin n’ajoutent pas de coût monétaire supplémentaire malgré le coût d’opportunité dans le cas du bureau [7]. Aux États-Unis, l’estimation du surcoût de dépenses annuelles réelles pour un enfant des ménages avec enfant par rapport à d’autres ménages serait bien en-dessous des estimations par échelle d’équivalence, soit deux à trois fois moindres [8].

Sayn, Jeandidier et Bourreau-Dubois confirment ainsi que la pension alimentaire calculée par le barème dépend surtout des revenus du « parent non résident » :

« Sachant que, dans la table de référence, le coût relatif de l’enfant ne varie pas selon le niveau de revenus des parents, il suffit, pour calculer sa CEEE, d’appliquer le taux correspondant aux revenus (nets du montant du RSA, pour s’assurer que le débiteur ne soit pas mis dans une situation financière insoutenable) du seul parent débiteur. Le montant obtenu est ensuite adapté en fonction du mode d’hébergement (droit de visite classique ou réduit, résidence alternée). »

Sayn (Isabelle), Jeandidier (Bruno), Bourreau-Dubois (Cécile), op. cit., p. 1.

Le trio ayant rédigé l’article plaide même pour ne pas complexifier le barème, autrement dit pour une pratique illicite, en se limitant à ses trois critères auxquels ils ajoutent l’âge de l’enfant :

« Les paramètres de la table de référence sont effectivement mobilisés par les juges, complexifier la table par l’ajout de paramètres additionnels n’est pas opportun, il existe bien des sources d’iniquité qu’un barème est de nature à réduire. »

Sayn (Isabelle), Jeandidier (Bruno), Bourreau-Dubois (Cécile), op. cit., p. 3.

Plaidant ainsi pour une pratique illégale selon la Cour de cassation, ces chercheurs révèlent leur motivation : utiliser le barème de la pension alimentaire du ministère de la Justice pour réduire de prétendues iniquités.

Le biais du ministère de la Justice

Dix ans après l’arrêt de la Cour de cassation, le barème du ministère de la Justice demeure accessible en ligne sans aucun avertissement.

Le 6 avril 2023, le site officiel gouvernemental Service-Public.fr a publié un simulateur de pension alimentaire présenté dans un article intitulé « Pensions alimentaires : un simulateur pour savoir combien vous devez verser », titre trompeur puisque le simulateur reprenant le barème de pension alimentaire du ministère de la Justice est contraire à la loi et à la jurisprudence (cf. plus haut) en ne s’appuyant que sur les trois critères suivants :

  • les revenus mensuels nets du parent débiteur (avant prélèvement de l’impôt),
  • le type de droit de visite et d’hébergement (réduit, classique ou alterné),
  • le nombre d’enfants concernés.

Le biais du collectif de sociologues et celui du Sénat valorisant l’utilisation du barème pourtant illicite

En 2015, une vive polémique a opposé France Stratégie à des sociologues, cette controverse portant sur les contributions (et inégalités) entre « parents gardiens » et « parents non-résidents ». Tandis que France Stratégie soutenait, à partir de simulations, qu’à partir du barème de pensions alimentaire du ministère de la Justice, les « parents non-résidents » étaient excessivement sollicités sur le plan financier, leur contribution étant disproportionnée par rapport à celle des « parents gardiens [9] », des sociologues, en désaccord avec la méthode et les conclusions, rappelèrent que les « parents résidents » sont pour la plupart du temps des mères, les parents débiteurs d’aliments étant le plus clair du temps des pères [10].

Par ailleurs, ce collectif de sociologues contredit indirectement le rapport du Sénat ci-dessous dans leur critique des travaux de France Stratégie s’appuyant sur le barème de pension alimentaire du ministère de la Justice :

« Effectivement, la simulation suppose que les juges respectent le barème des pensions alimentaires défini par le ministère de la Justice, alors qu’en réalité, concèdent les auteurs, “le montant fixé par le juge est en moyenne légèrement inférieur à celui qui découlerait du barème”. »

Le rapport du Sénat de 2014 consacré à la justice familiale mentionne bel et bien que ce barème unifie les pratiques des juges :

« Conformément à l’une des recommandations du rapport de la commission sur la répartition des contentieux, le ministère de la justice a, dès 2010, publié annuellement une table de référence indicative des montants des pensions alimentaires, en fonction des revenus du parent débiteur de la pension alimentaire, du nombre d’enfants et de l’amplitude du droit de visite et d’hébergement qui lui est reconnu […]. Ce barème est un référentiel, c’est-à-dire qu’il transcrit la jurisprudence².

« Bien qu’uniquement indicative, cette table de correspondance a permis d’unifier les pratiques suivies par les juridictions en cette matière, tout en réservant, si nécessaire, la libre appréciation du juge. Elle est aussi utilisée par les parties, notamment en matière de divorce par consentement mutuel, pour proposer des montants raisonnables. »

« ² Une étude du ministère de la justice a d’ailleurs mis en évidence la conformité de cette table aux pratiques en matière de fixation de montant de pension alimentaire observées au sein des cours d’appel (Isabelle Sayn, Bruno Jeandidier et Cécile Bourreau-Dubois,La fixation du montant des pensions alimentaires : des pratiques et un barème”, Infostat Justice, mars 2012, nº 116). »

Corriger les biais présents au niveau à la fois exécutif, législatif, judiciaire et de la recherche, malgré la jurisprudence du juge de cassation et l’article 371-2 du code civil

Le parent titulaire d’un droit de visite et d’hébergement, s’il l’exerce de façon classique et régulière, assume des dépenses au profit de son enfant qu’il voit 25 % du temps, dépenses à prendre en compte. Ce « parent non-résident » participe parfois, en outre, à des frais exceptionnels ou assume des frais de trajet pour éloignement géographique. Le « parent résident » assume 75 % des dépenses, ce qui justifie le versement d’une pension alimentaire à proportion des ressources des parties.

Par exemple, si le parent débiteur gagne 5 000 euros mensuels et si les ressources après déduction des charges telles que l’impôt sur le revenu sont de 3 000 euros pour le parent débiteur et de 2 000 euros pour le parent créancier alors qu’avant déduction des charges son revenu s’élève à 3 000 euros, le pourcentage respectif de ressources de chacun dans l’ensemble des ressources du couple est respectivement de 60 % (3 000 / (3 000 + 2 000)) et 40 % (2 000 / (3 000 + 2000)). Si le « parent non-résident » gagne 60 % des ressources du couple parental mais assume déjà directement 25 % des dépenses, il manque donc 35 % (= 60 % − 25 %) à verser au « parent résident ». Il faut évidemment adapter ce pourcentage en fonction des situations.

  • Rp : revenus du « parent non-résident » (5 000 euros)
  • Rm : revenus du « parent résident » (3 000 euros)
  • Ip : impôts du « parent non-résident » (800 euros)
  • Im : impôts du « parent résident » (50 euros)
  • Cp : charges du « parent non-résident » (1 200 euros)
  • Cm : charges du « parent résident » (950 euros)
  • Ap : aides sociales du « parent non-résident » (0 euro)
  • Am : aides sociales du « parent résident » (0 euro)
  • Dp : dépenses directes au profit de l’enfant par le « parent non-résident » (175 euros)
  • Dm : dépenses directes au profit de l’enfant par le « parent résident » (525 euros)
  • Tp : frais de trajet lié à l’éloignement géographique à la charge du « parent non-résident » (0 euros)
  • Tm : frais de trajet lié à l’éloignement géographique à la charge du « parent résident » (0 euros)
  • P : pension alimentaire

On note bien que les ressources du « parent non-résident » une fois les charges déduites sont :

Rp − Ip − Cp + Ap = 5 000 − 800 − 1 200 + 0 = 3 000

On note bien que les ressources du « parent résident » une fois les charges déduites sont :

Rm − Im − Cm + Am = 3 000 − 50 − 950 + 0 = 2 000

Le ratio de ressources après déduction des charges est égal à 3 000 / 2 000 = 1,5 ou 60 % / 40 % = 1,5.

Les besoins de l’enfant sont par exemple pour un enfant de trois ans :

Dp + Dm = 175 + 525 = 700

RR : ratio de ressources du « parent non-résident » par rapport au « parent résident »

RR = (Rp − Ip − Cp + Ap) / (Rm − Im − Cm + Am)

RC : ratio de contribution du « parent non-résident » par rapport au « parent résident »

RC = (Dp + Tp + P) / (Dm + Tm − P)

r : ratio d’équilibre égalisant les ratios RR et RC tel que r = RR = RC

On cherche P dans l’équation tel que :

r = (Rp − Ip − Cp + Ap) / (Rm − Im − Cm + Am) = (Dp + Tp + P) / (Dm + Tm − P) = RC = RR

L’idée ici est que pour un euro de ressources du « parent résident », le « parent non-résident » a r euros de ressources. Par conséquent, pour un euro de dépenses du « parent résident » au profit de l’enfant, le « parent non-résident » doit dépenser r euros au profit de l’enfant.

La solution de cette équation est tout simplement :

P = (r × Dm + r × Tm − Dp − Tp) / (1 + r)

C’est ainsi qu’on peut calculer la juste pension alimentaire respectant le ratio de ressources des parents.

On calcule d’abord r grâce à RR :

r = RR = (Rp − Ip − Cp + Ap) / (Rm − Im − Cm + Am)

RR = ((5 000 − 800 − 1 200 + 0)) / ((3 000 − 50 − 950 + 0)) = 1,5

r = 1,5

Puis on en déduit la pension alimentaire P :

P = (r × Dm + r × Tm − Dp − Tp) / (1 + r)

P = (1,5 × 525 + 1,5 × 0 − 175 − 0) / (1 + 1,5)

P = 245

La pension alimentaire s’élève à 245 euros pour des besoins de l’enfant, qui sont dans cet exemple : Dp + Dm = 175 + 525 = 700

Dans cet exemple le ratio noté r est égal à 1,5 = (3 000 / 2 000).

Avec le barème du ministère de la Justice, le parent débiteur aurait payé 594 euros de pension alimentaire alors qu’on voit qu’après déduction des charges et à proportion des ressources il ne doit que 245 euros mensuels.

Notes
  1. Cf. Belmokhtar (Zakia), « La contribution à l’entretien et l’éducation de l’enfant, deux ans après le divorce », Infostat Justice, nº 141, 22 avril 2016.
  2. Cf. Belmokhtar (Zakia), « Une pension alimentaire fixée par les juges pour deux tiers des enfants de parents séparés », Infostat Justice, nº 128, 22 mai 2014.
  3. Sayn (Isabelle), Jeandidier (Bruno), Bourreau-Dubois (Cécile), « La fixation du montant des pensions alimentaires : des pratiques et un barème », Infostat Justice, nº 116, mars 2012, p. 2.
  4. Cf. Cour de cassation, Chambre civile 1, 1er février 2012, pourvoi nº 10-26894 ; Cour de cassation, Chambre civile 1, 4 novembre 2015, pourvoi nº 14-25600 ; Cour de cassation, Chambre civile 1, 4 juillet 2018, pourvoi nº 17-20281.
  5. Cf. Hotte (Rozenn), Martin (Henri), « Mesurer le coût de l’enfant : deux approches à partir des enquêtes Budget de famille », Dossiers solidarité et santé, nº 62, 1er juin 2015.
  6. Cf. Ben Jelloul (Mahdi), Cusset (Pierre-Yves), « L’étude “Comment partager les charges liées aux enfants après une séparation” en débat », France Stratégie, 30 juillet 2015.
  7. Cf. Comanor (William S.), « Dr. Venhor’s Minnesota Report: a Brief Response », 7 avril 2017.
  8. Cf. Comanor (William S.), Sarro (Mark), Rogers (R. Mark), « The Monetary Cost of Raising Children », in : Collectif, Economic and Legal Issues in Competition, Intellectual Property, Bankruptcy, and the Cost of Raising Children, Bingley, Emerald, collection « Research in Law and Economics » (vol. 27), 23 novembre 2015, pp. 209-251.
  9. Cf. Ben Jelloul (Mahdi), Cusset (Pierre-Yves), « Comment partager les charges liées aux enfants après une séparation ? », La note d’analyse, nº 31, 18 juin 2015.
  10. Cf. Collectif, « L’appauvrissement des mères après une séparation n’est pas simulé ! », Le Monde, 25 juin 2015.

Bibliographie

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helloasso

2 commentaires

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  1. La vision du « coût supplémentaire de l’enfant » est à mon sens biaisé. Vous l’estimez par rapport à une situation de couple déjà existante. Or l’immense majorité des enfants sont en famille monoparentale. Il existe donc un effet de seuil à passer entre une situation de célibataire (qui pourrait très bien vivre en studio) et une situation de parent solo (deuxième chambre, charges proportionnelles etc.).
    Un autre aspect du rôle de la pension est occulté par votre article : celui de lisser le niveau de vie de l’enfant entre les deux domiciles des parents. Si chez un des parents c’est caviar (ou vacances aux Antilles) et l’autre coquillettes (et pas de vacances) ça crée une distorsion importante pour l’enfant avec un des parents qui peut « acheter » beaucoup et une culpabilité vis-à-vis de son autre parent.
    Il est faux de dire que les petits enfants d’ailleurs ne le ressentent pas.
    Enfin, bien souvent dans les jugements et les calculs de pension alimentaire, le juge estime que chacun des parents prend sa part de charge liée aux vêtements, etc. Là encore, c’est occulter que, plutôt que de diviser par deux ce type de coûts, la séparation les multiplie par deux (surtout en cas de conflit des parents) ou à la charge du parent qui anticipe le plus les besoins de son enfant. Exemple : votre enfant aura certainement des vêtements, pyjamas, pantoufles, chaussures, équipement pour le sport scolaire, brosse à dents, équipement d’hygiène, jeux, livres chez chaque parent plutôt que chez un seul d’entre eux. Là encore le parent célibataire va subir ces dépenses à 100 % comme si il ou elle élevait seul son gamin.
    Pour terminer l’article plaint le parent débiteur en occultant le fait que les statistiques montrent que le parent récepteur (souvent la mère) est celle qui perd le plus financièrement dans le cadre d’une séparation et que ça conduit une grosse partie des familles monoparentales (souvent féminines donc) à passer sous le seuil de pauvreté. On est loin de la vision biaisée de « trop grosses pensions versées » communiquées par des lobbys de papa.
    J’ajoute que bien souvent (car malheureusement la vie professionnelle s’adapte mal au système scolaire), la mère se met à temps partiel pour se rendre plus disponible pour l’éducation des enfants, renonçant à salaire plus important et cotisations. Cette dimension temporelle est complètement absente des jugements et de la prise en compte des calculs de pensions et des aides sociales. Il y a des parents qui n’ont pas la garde et donc qui paient beaucoup MAIS qui choisissent de privilégier leur vie pro (et leurs cotisations) à leur vie familiale. Aucune sanction n’apparaît dans ce cadre pour cette personne qui a fait un enfant mais qui ne se libère pas de temps pour s’en occuper pour privilégier SON travail, SES revenus et SON patrimoine et SES cotisations retraite. Dans ce cadre, il est juste de verser au parent receveur qui se voit imposer de renoncer à une carrière pro un surcroît de revenus pour s’occuper de son enfant et lui apporter une stabilité affective sans que toute la famille ne perde en niveau de vie. Même dans ce cadre d’ailleurs le parent receveur qui se sera libéré du temps aura moins travaillé ses propres revenus et cotisations pendant des années et présentera des risques de pauvreté à la fin de sa vie. Là encore il y a des études en la matière.
    La vérité c’est qu’une séparation appauvrit l’ensemble des parties (ou tout au moins fait baisser le niveau de vie), mais que l’enfant doit rester au cœur des attentions pour garder un niveau de vie convenable et une enfance heureuse.

  2. Cyrille Godonou

    L’objet de l’article n’est pas d’estimer le coût supplémentaire de l’enfant. Le but de l’article est de rappeler les critères de la loi pour fixer le montant de la pension alimentaire, en soulignant que la Cour de cassation a censuré l’utilisation du barème du ministère de la Justice. Or, ces pratiques illicites perdurent. S’agissant du calcul de la pension alimentaire, l’idée maîtresse de l’article est de dire si un parent détient x % des ressources parentales, alors il doit contribuer à x % des dépenses parentales au profit de l’enfant. Mais, l’article ne dit pas comment estimer ces dépenses parentales. Ce sujet est l’objet d’un autre article.

    http://paternet.fr/2023/03/31/la-statistique-permet-de-mesurer-le-cout-moyen-de-lenfant-pour-fixer-la-pension-alimentaire-conformement-au-code-civil-et-contrairement-au-bareme-du-ministere-de-la-justice/

    Par ailleurs, s’agissant de votre distinguo entre famille monoparentale et couple, il faut savoir que le coût de l’enfant est plus élevé en couple qu’en famille monoparentale selon l’étude de Vanessa BELLAMY.

    https://www.cairn.info/revue-informations-sociales-2007-1-page-46.htm?ref=doi

    Dans le tableau 2, les données sont annuelles pour l’enquête Budget de famille 2001 : en tenant compte de la hausse des prix entre 2001 et 2023 et en mensualisant les dépenses individualisables par enfant voici les résultats :
    Famille monoparentale avec un enfant de moins de 16 ans :
    181 euros par mois
    Famille monoparentale avec un seul enfant de moins de 4 ans :
    268 euros par mois
    Couple avec un enfant de moins de 16 ans :
    307 euros par mois
    Couple avec un seul enfant de moins de 4 ans :
    393 euros par mois

    La loi ne dit nulle part qu’il faut équilibrer les niveaux de vie des deux ménages des parents séparés. Cela reviendrait à une forme de prestation compensatoire déguisée. Ce serait aussi une façon de dire que les parents ne sont pas tout à fait séparés puisque l’un continuerait à entretenir l’autre, au prétexte que l’enfant doit avoir le même train de vie chez ses deux parents, et ce sans aucun droit de regard du débiteur sur les dépenses du parent résident. Par ailleurs, quand les grands-parents exercent aussi un droit de visite et d’hébergement avec ou sans jugement, nul ne suggère qu’il faille aussi équilibrer les niveaux de vie des parents et des grands-parents.

    Le reste de votre propos ne concerne pas non plus l’article mais des questions que je traite dans d’autres articles. Sur la prétendue perte de niveau de vie et pauvreté des familles monoparentales après la séparation, vous aurez des éléments de réponse les lisant.

    http://paternet.fr/2022/06/14/comment-fixer-le-montant-de-la-pension-alimentaire-une-simple-equation-pour-se-conformer-au-code-civil/

    Le premier biais de votre raisonnement est d’ignorer les aides sociales et fiscales : quotient familial, logement social en priorité dévolue aux familles dites monoparentales avec des frais de logement de 200 à 300 euros en-dessous du prix de marché, allocations familiales et prestations sociales entièrement versées au parent résident (en général les mères) alors que l’autre parent, vous le reconnaissez, a bon nombre de frais équivalents sans aucun avantage social ou fiscal (le seul avantage fiscal étant de déduire la pension alimentaire versée mais il n’a rien à voir avec les dépenses lors de l’exercice du droit de visite et d’hébergement). Les études aboutissant à la chute du niveau de vie des « monoparents » occultent les prestations en nature (logement en HLM par exemple) ou focalisent sur les revenus gagnés et non sur la consommation réelle avec aides sociales en espèce mais aussi en nature.
    En effet, le deuxième biais de votre raisonnement est d’ignorer les dépenses et charges du parent non-résident (en général les pères) : à caractéristiques comparables 600 euros de dépenses mensuelles en plus par rapport à des célibataires. Ces frais sont considérables quand le parent vit loin de ses enfants (frais d’avion, de train et d’hôtellerie).

    https://www.cairn.info/revue-economique-2018-2-page-303.htm?ref=doi

    Le troisième biais de votre raisonnement est d’occulter l’importance des choix individuels : le temps partiel féminin est largement choisi.

    https://decolonialisme.fr/le-temps-partiel-et-le-conge-parental-feminins-sont-ils-majoritairement-choisis-ou-subis/

    Il est de la responsabilité des adultes d’assumer les conséquences de leurs choix de vie. Quand les pères non-résidents font des choix professionnels aboutissant à une perte de revenus, les juges refusent de réduire leur pension alimentaire.

    23 juin 2010 – Cour d’appel de Poitiers, ch. civile 04 – 09_02215 _
    « ATTENDU que les pensions alimentaires dûes pour les enfants sont, pour le père, des dettes prioritaires ; que ceux-ci n’ont pas à supporter les choix professionnels du père »

    http://www.michelebaueravocatbordeaux.fr/content/uploads/2023/01/23-juin-2010-Cour-dappel-ch.-civile-04-09_02215-_.pdf

    Par contraste, les mères ont le droit de se mettre à temps partiel en réduisant le niveau de vie de leurs enfants quitte à les appauvrir : pourquoi cette dissymétrie ?
    Voici une vidéo de 5mn qui pourrait vous intéresser : c’est un court reportage !

    « Mère au foyer de trois enfants, Alexandra a fait le choix de ne plus travailler et de vivre uniquement des aides. » http://www.youtube.com/watch?v=C8s1mya9LAY
    Grâce aux prestions sociales, 1065 euros en ne travaillant pas (mais en restant avec les enfants qui ne sont plus des bébés mais sont scolarisés) versus 1400 euros en travaillant au SMIC !
    La mère isolée de famille monoparentale estime que ça ne vaut pas le coup de travailler pour seulement 335 euros de plus par mois et que c’est mieux d’être à la maison avec les enfants.

    Je ne juge pas le choix de madame mais je me borne à constater qu’elle renonce à une hausse d’un tiers des revenus du ménage (elle et ses trois enfants). Surtout, plus important, sa décision revient à renoncer à de potentielles hausses salariales futures via des promotions professionnelles.

    En termes exclusivement financiers, son arbitrage est ainsi de court terme. Elle sabote seule sa future pension de retraite : à qui la faute ?

    Enfin, vous ne dites mot sur le fait que les pères qui sont en famille monoparentales, assumant donc les enfants au quotidien, reçoivent moins souvent que leurs homologues féminins, des pensions alimentaires, ou alors de plus faibles montants. La première variable discriminante du non-paiement de la pension alimentaire au sein des parents pourtant solvables c’est le sexe : les mères ont nettement moins de chances de s’acquitter de cette obligation financière. Le sexe du parent non résident est ainsi de loin le plus puissant déterminant du non versement d’une pension alimentaire, dans la mesure où 23 % des pères solvables et 67 % des mères solvables déclarent ne pas verser de pension alimentaire.

    https://drees.solidarites-sante.gouv.fr/publications/etudes-et-resultats/un-quart-des-parents-non-gardiens-solvables-ne-declarent-pas

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