Communiqué de presse des Juristes pour l’enfance
La possibilité de lever l’anonymat du donneur de gamètes est entrée en vigueur ce jeudi 1er septembre (décret nº 2022-1187 du 25 août 2022).
À première vue, cette mesure semble rendre service aux personnes conçues par procréation médicalement assistée (PMA). En réalité, elle va créer des situations complexes et accentuer le capharnaüm créé par les lois qui détricotent l’institution de la famille.
En effet, son effectivité n’est pas garantie et plusieurs situations vont coexister :
- Les personnes conçues avant cette date ne pourront accéder aux informations prévues par la loi que si le donneur accepte de communiquer son identité et/ou ses données non identifiantes.Cela implique que le dossier ait été conservé et que le donneur puisse être identifié par la commission d’accès aux origines, que ses coordonnées au moment de la demande puissent être retrouvées, qu’il soit toujours en vie, qu’il soit en capacité de consentir et enfin, qu’il accepte que les informations puissent être communiquées à la personne issue de son don.
Cela fait beaucoup de conditions et un certain nombre de demandes n’aboutiront sans doute pas.
- Pour les personnes conçues après le 1er septembre 2022, elles ne sauront qu’à leur majorité si elles pourront accéder à l’identité et aux données non identifiantes du donneur.Compte tenu de la pénurie de gamètes, les stocks de gamètes existants vont continuer à être utilisés (sauf opposition du donneur).
Les enfants conçus par recours à tiers donneur à partir du 1er septembre 2022 le seront soit avec des gamètes provenant du stock ancien (c’est-à-dire de donneurs n’ayant pas préalablement consenti à la transmission de leur identité), soit avec des gamètes provenant de personnes ayant fait un don après le 1er septembre 2022 et qui doivent désormais, pour fournir leurs gamètes, accepter la communication de leur identité et des autres données.
Ni les enfants ainsi conçus ni leurs parents légaux ne sauront de quel stock proviennent les gamètes utilisés. Ils le découvriront lorsqu’à leur majorité ils feront la demande pour connaître l’identité de leur donneur.
En conséquence, selon la provenance des gamètes utilisés, ils n’auront pas systématiquement accès aux informations prévues par la loi.
Par ailleurs, la levée de l’anonymat répondra sans doute à certaines questions et apaisera certaines souffrances, mais elle provoquera bien d’autres difficultés, souffrances et déceptions.
Juristes pour l’enfance considère que c’est le recours au tiers donneur en soi qui est source de toutes ces difficultés. La levée de l’anonymat ne résoudra pas tous les problèmes :
- Le recours à des donneurs prive délibérément l’enfant de son géniteur ou sa génitrice, pour le rendre disponible pour réaliser le désir d’autrui.
- La levée de l’anonymat ne change rien au fait de l’éclatement de la paternité ou de la maternité entre le parent biologique et le parent légal, et les difficultés de construction identitaire en découlant pour l’enfant ainsi conçu.
- Les personnes issues de donneur qui voudront faire établir leur filiation biologique continueront à se heurter à un refus, alors même que « leur » donneur le souhaiterait également.
« Si l’on pense que ces nouvelles dispositions seront le coup de baguette magique qui va résoudre les difficultés posées par la PMA avec tiers donneur, on se trompe. Le véritable débat ne devrait pas se situer sur la levée de l’anonymat ou non, mais bien sur le recours à un tiers donneur lui-même. »
Communiqué archivé au format PDF (138 Ko, 2 p.).