Bertrand (Anne-Marie), Question écrite nº 7871 à la ministre de la justice sur le manque de moyens pour la justice des mineurs [Journal officiel de la République française, édition « Débats parlementaires – Sénat », nº 47 S (Q), 29 novembre 2018, p. 5978].
Mme Anne-Marie Bertrand attire l’attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice sur l’état de la justice des mineurs.
« Nous sommes devenus les juges des mesures fictives », c’est ainsi que s’exprimaient quinze juges des enfants du tribunal de grande instance de Bobigny à travers une tribune publiée le 5 novembre 2018 par le journal Le Monde.
Cela concerne, en l’espèce, la répression de mineurs délinquants mais aussi de la protection de mineurs en danger.
Avec les différentes restrictions budgétaires, les recrutements sont en effet difficiles et les associations habilitées à faire appliquer ces mesures ne peuvent plus le faire. Les greffiers, en nombre insuffisant, peinent à remplir leurs missions avec pour conséquence des décisions pénales notifiées dans des délais d’un an. Les enjeux sont pourtant cruciaux.
Des enfants mal accompagnés, ce sont davantage d’adultes vulnérables, en incapacité de travailler, de s’émanciper, et ce seront davantage de coûts sociaux.
Certes, la mise en œuvre des décisions de nature civile appartient au département, cependant nous ne pouvons ignorer que les départements sont débordés par leurs missions, notamment par la prise en charge des mineurs étrangers isolés dont le nombre a triplé depuis 2015. C’est donc un enjeu national qui ne peut reposer sur les seuls départements.
Les stages de responsabilité parentale, par exemple, ne peuvent être appliqués sur l’ensemble de notre territoire, faute d’associations pour les mettre en œuvre. Ces manques de moyens créés des inégalités de traitement inadmissibles entre justiciables d’un département à l’autre.
Consciente de l’urgence à réduire les dépenses publiques mais considérant que d’autres économies seraient préférables, elle lui demande comment elle compte réduire ces inégalités afin de permettre aux associations de rendre effectives les mesures prises par les juges.
Réponse du ministère de la Justice publiée dans le Journal officiel de la République française, édition « Débats parlementaires – Sénat », nº 26 S (Q), 25 juin 2020, p. 2966.
Des efforts importants ont été entrepris pour rénover la législation en matière de justice des mineurs, ainsi que pour renforcer les juridictions et les services chargés de mettre en œuvre les mesures prononcées. La réforme en cours de l’ordonnance du 2 février 1945, relative à l’enfance délinquante, créera un code de la justice pénale des mineurs. Elle prévoit notamment de réaménager le temps de la procédure afin d’obtenir des jugements dans des délais raisonnables et d’assurer la continuité du suivi éducatif du mineur. Le dispositif de placement de la protection judiciaire de la jeunesse s’appuie sur des modalités diversifiées garantissant une individualisation de la réponse éducative et son adaptation aux besoins et à la situation, tant personnelle et familiale que sanitaire, scolaire, professionnelle et évidemment judiciaire, de chaque adolescent confié. Grâce à de nouveaux moyens budgétaires en 2019 pour la création de services d’investigation éducative ont permis d’augmenter la capacité de prise en charge des mesures judiciaires d’investigation éducative. Ces services apporteront à terme des éléments d’évaluation et d’analyse des situations d’enfants en danger de nature à permettre un meilleur suivi des mineurs et de leurs familles. Ces nouvelles mesures ont représenté 4,2 M€ en 2019 et à 4,7 M€ en 2020. Enfin, les juridictions des mineurs ont fait l’objet d’une attention particulière ces dernières années. Cette attention se traduit à la fois par une réévaluation du nombre de postes localisés et par une résorption des postes vacants en juridiction. Ainsi, alors que 423 postes de juge des enfants étaient pourvus en 2015, 466 le sont actuellement sur 470 localisés. Par ailleurs, la création en 2016 de la fonction statutaire de 1er vice-président en charge des fonctions de juge des enfants, inscrite à la circulaire de localisation des emplois 2017, à l’instar de ce qui pouvait déjà exister pour les fonctions de juge d’instruction, a permis de valoriser ces services et les fonctions de coordination au sein des juridictions pour mineurs. Ce nouveau statut participe au renforcement du pilotage et de l’animation de ces services, activité particulièrement importante du fait des multiples partenariats du juge des enfants. Les efforts au profit des juridictions pour mineurs se sont poursuivis au cours de l’année 2020. Dans le même temps, des efforts importants ont été fournis au bénéfice des parquets. Une attention particulière a également été portée aux postes au parquet. À ce jour, la quasi-totalité des parquets de première instance sont à effectif complet.
Question archivée au format PDF (211 Ko, 2 p.).
Tribune publiée par Le Monde archivée au format PDF (34 Ko, 2 p.).