- Collectif, Mission sur les homicides conjugaux, Paris, Ministère de la justice (Inspection générale de la Justice), 17 novembre 2019.
La garde des Sceaux Nicole Belloubet avait demandé le 21 juin dernier à l’Inspection générale de la justice de procéder à un état des lieux portant sur les dossiers jugés définitivement à ce jour et concernant des faits d’homicides liés à des violence conjugales commis durant les années 2015 et 2016. La mission a étendu ses investigations aux dossiers de tentatives d’homicide conjugal sur cette même période. 88 dossiers judiciaires ont été transmis par les cours d’appel. Le rapport publié aujourd’hui fait une analyse des agresseurs et des victimes, ainsi que du contexte dans lequel les homicides sont intervenus ; il met également en évidence les facteurs de risques ainsi que les faiblesses dans le repérage et le traitement des violences conjugales, et formule vingt-quatre recommandations pour prévenir la réitération des actes de violence et renforcer la prise en charge des victimes.
Les faits étudiés se sont déroulés sur l’ensemble du territoire national, en milieu rural comme en milieu urbain. Les régions les plus impactées sont l’Île-de-France (22 %), les Hauts-de-France (15 %), l’Auvergne-Rhône-Alpes (13 %) et le Grand-Est (11 %).
Toutes les générations sont concernées. 85 % des homicides sont commis par des hommes, 83 % des victimes sont des femmes. Le passage à l’acte est souvent lié à l’annonce de la séparation et à la séparation elle-même (43 %).
Une forte dépendance à l’alcool (40 %) et la consommation de stupéfiants (25 %) est constatée chez les auteurs. La violence est également déjà très présente chez eux bien avant le passage à l’acte. La répétition des faits de violence est d’ailleurs importante : 30 % des auteurs ont déjà été condamnés – il s’agit de récidives de violences conjugales pour 15 % d’entre eux – et la victime est la même dans 77 % des cas.
Selon le rapport, les délais de traitement sont favorables et la procédure criminelle est efficiente. Les condamnations se composent pour 83 % de peines de réclusion criminelle et pour 17 % de peines d’emprisonnement. Les peines prononcées sont plutôt lourdes (dix-sept ans en moyenne de réclusion criminelle).
A contrario, les dispositifs de prévention déjà existants ne sont pas suffisamment utilisés. Il en est ainsi de l’ordonnance de protection de la victime, ou du dispositif de téléprotection grave danger qui permet d’attribuer à la victime de violences un téléphone susceptible de la géolocaliser afin que les services de police puissent intervenir rapidement. Malgré la réponse judiciaire en cas de violation, les interdictions d’entrer en contact avec la victime ou de se rendre à son domicile ne semblent pas suffisamment contraignantes.
Par ailleurs, les informations sur les violences antérieures commises par l’auteur ne sont pas suffisamment utilisées. Les services enquêteurs recourent majoritairement aux mains courantes pour recueillir les déclarations des victimes de violences conjugales sans les transmettre au parquet. Les qualifications concernant les violences manquent de précision. Le manque de coordination et de partage de l’information entre les services d’une même juridiction est flagrant. Une meilleure information sur les auteurs de violences et une protection plus efficace des victimes pourraient réduire le nombre d’homicides.
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- Goñi (Uki), « Argentina’s new president vows to legalise abortion », The Guardian, 17 novembre 2019.
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