Lettre ouverte de La Manif Pour Tous au Président de la République

Communiqué de presse de La Manif Pour Tous

La Manif Pour Tous

À la suite du discours de politique générale du Premier Ministre le 12 juin dernier, La Manif Pour Tous publie aujourd’hui une lettre ouverte adressée au Président de la République. Pour le mouvement social mobilisé pour la famille depuis 2012, les conditions pour un débat serein et apaisé ne sont pas réunies. Dans ce document de plus de 70 pages rédigé à l’attention d’Emmanuel Macron, La Manif Pour Tous précise les multiples raisons qui doivent conduire à reporter un projet aussi périlleux que sensible pour la majorité et qui menace de cliver durablement la société pour laquelle tout le monde s’accorde à souligner l’urgence de la rassembler.

À ce jour, « l’objectif » du gouvernement est de présenter le projet de loi bioéthique en Conseil des ministres le 26 juillet prochain en vue de son arrivée au Parlement à partir de la fin du mois de septembre. Le texte actuellement étudié par le Conseil d’État comprend trente-deux articles et n’apporte pas les réponses attendues aux enjeux posés sur la table à l’occasion des états généraux de la bioéthique en particulier en matière de sécurité du patient, de gestion des données et d’intelligence artificielle. La révision de la loi de bioéthique aurait-elle pour seul et unique objectif de révolutionner le droit de la filiation et d’imposer la fabrication d’enfant sans père ?

« Pas de consensus » selon le président du Comité consultatif national d’éthique

Pourtant, contrairement à ce que certains affirment à longueur d’articles, d’interviews ou de reportages, cette question de la filiation (procréation médicalement assistée et gestation pour autrui) ne figurait pas dans le programme officiel du candidat Emmanuel Macron distribué aux Français lors de la campagne présidentielle de 2017. Ce dernier s’était seulement déclaré favorable à titre personnel à une évolution des règles d’accès à la procréation médicalement assistée à la condition qu’elle soit soutenue par un large consensus. Or, le président du Comité consultatif national d’éthique a souligné lui-même l’absence de consensus sur cette question en commentant les conclusions des états généraux de la bioéthique.

Un dissensus confirmé par les sondages

Le dissensus s’observe également en analysant les sondages. Une enquête Ifop réalisée les 5 et 6 juin révèle que 82 % des Français estiment que « le père et la mère ont des rôles différents et complémentaires pour l’éducation des enfants ». Une proportion similaire (83 %) se déclare favorable à ce que « les enfants nés par procréation médicalement assistée aient le droit d’avoir un père et une mère ». En revanche, seuls 12 % d’entre eux estiment que « ces débats permettent de rassembler les Français ». Quelle que soit leur sensibilité politique, seul un quart d’entre eux estiment qu’un débat serein est possible maintenant et la moitié des Français pensent qu’il faudrait attendre quelques années. Enfin, deux Français sur trois (66 %) pensent que dans le cas où le gouvernement présenterait un projet de loi sur la procréation médicalement assistée sans père, « cela risque de susciter des manifestations d’opposition très importantes parce qu’on toucherait aux droits de l’enfant ». Cet avis est partagé par les trois quarts des électeurs de La République en marche ! (74 %).

Répondre à une triple urgence : sociale, économique et environnementale

Aussi, conformément aux déclarations du Premier ministre dans son discours de politique générale, nous devons collectivement faire face à une triple urgence.

  • L’urgence sociale tout d’abord, pour aider les Français, et les 18 millions de familles, notamment monoparentales à boucler leurs fins de mois. Comme le soulignait Édouard Philippe le 12 juin, « logement, travail, fins de mois, garde d’enfants, tout est plus difficile quand on est seul ».
  • L’urgence économique ensuite, avec notamment la crise des urgentistes, des maternités et la désertification des services publics observés dans les quartiers sensibles comme en milieu rural.
  • Enfin, l’urgence climatique pour laquelle la jeunesse est aujourd’hui fortement mobilisée.

La procréation médicalement assistée sans père est-elle une réponse à l’urgence sociale en créant des orphelins de la République et en contribuant à développer le nombre de familles en difficulté ? La procréation médicalement assistée sans père est-elle une réponse à l’urgence économique en ajoutant à la dépense publique la prise en charge des frais médicaux pour des femmes qui sont fécondes sans recourir à ces techniques médicales ? Comment les Français accepteront-ils ce détournement de la médecine alors qu’ils constatent mois après mois le coût croissant du déremboursement des médicaments ? La procréation médicalement assistée est-elle une réponse à l’urgence écologique alors même qu’une fabrication d’enfant sans père est précisément le projet le plus anti-écologique qui soit, sans oublier le business lucratif qui verrait le jour pour des laboratoires qui ne ménagent pas leurs efforts de lobbying en la matière ?

Dans cette lettre ouverte à la tonalité solennelle, le mouvement social de La Manif Pour Tous s’inquiète des conséquences de la procréation médicalement assistée sans père sur la marchandisation du vivant. Dans les pays où elle est pratiquée, la procréation médicalement assistée sans père conduit toujours, tôt ou tard, à rémunérer les donneurs de sperme, qui deviennent en réalité des fournisseurs de sperme. Et si le commerce des gamètes demeure interdit en France, les laboratoires français iront se fournir auprès de pays où le sperme est acheté à celui qui le fournit. Directement ou non, de manière ouverte ou cachée, la procréation médicalement assistée sans père impliquera l’achat de sperme auprès de Français ou à l’étranger, violant ainsi le principe éthique français de non-patrimonialité du corps humain. L’urgence écologique, ce ne sont donc que des mots.

« Il est clair que si le Président de la République s’obstine à passer en force en rayant d’un trait de plume ses engagements de ne pas faire de la procréation médicalement assistée un combat idéologique, alors le gouvernement et la majorité prennent le risque de provoquer une nouvelle division au sein de la société. Il est encore temps de prendre conscience du dissensus majeur autour de ces questions et de l’absence d’attente des Français à leur égard. Jouer les jusqu’au-boutistes, c’est non seulement diviser les Français de manière inutile, mais c’est aussi provoquer de nouveaux mouvements de colères en ne répondant pas aux inquiétudes des Français en particulier en matière sociale, économique et environnementale comme les derniers mois l’ont montré », selon Ludovine de La Rochère, présidente de La Manif Pour Tous. « En cas de passage en force du gouvernement sur la procréation médicalement assistée sans père, méprisant au passage les conclusions des états généraux de la bioéthique, il est évident qu’une opposition consistante se manifestera », poursuit Albéric Dumont, vice-président du mouvement et coordinateur de l’organisation des grandes manifestations qui ont rassemblé jusqu’à plus d’un million de personnes sur le pavé parisien.


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