Confirmation du retour d’une enfant de deux ans auprès de son père en Israël

Courts and Tribunal Judiciary

La Court of Appeal of England and Wales a confirmé aujourd’hui la décision rendue en avril dernier par le juge Alistair MacDonald, de la High Court of Justice (Family Division), ordonnant le retour d’une petite fille de deux ans auprès de son père en Israël (voir notre chronique du 17 avril dernier, dont nous reprenons les principaux éléments infra). Nonobstant les particularités du régime de common law en vigueur outre-Manche, il nous paraît intéressant de signaler cette décision à l’attention de nos lecteurs.

En l’espèce, un couple israélien marié en 2013 avait eu une petite fille en novembre 2016 (§ 7). Les parents avaient décidé de venir en Angleterre en novembre dernier pour un nouveau départ, dans l’espoir de sauver leur mariage en difficulté (§ 8). La situation ayant cependant empiré au fil des semaines, le couple était convenu de divorcer en janvier dernier. Le père avait alors proposé que la famille retournât en Israël, mais la mère avait refusé (§ 10). Évincé du domicile conjugal par la police anglaise, le père était rentré seul en Israël, où il avait aussitôt initié une procédure de divorce devant le tribunal rabbinique de Jérusalem (§§ 11-12). Il avait également demandé en février dernier le retour de sa fille en Israël, en application de la Convention de La Haye du 25 octobre 1980 sur les aspects civils de l’enlèvement international d’enfants (§ 13).

L’affaire avait été tranchée en première instance par le juge Alistair MacDonald après deux jours d’audience, au cours desquels avaient été entendus les parents ainsi qu’un ami (potentiellement amant) de la mère – il avait été établi qu’icelui conseillait la mère sur la tactique à adopter pour obtenir un guett et empêcher l’enfant de retourner en Israël, notamment des allégations d’enlèvement de l’enfant et de violence conjugale par le père.

Le juge Alistair MacDonald avait passé en revue les éléments de droit pertinents sur les points qu’il avait à trancher :

Le juge Alistair MacDonald avait ainsi conclu :

  • la situation de l’enfant n’avait jamais atteint le niveau d’intégration et/ou de stabilité qui eût permis de considérer qu’elle résidait habituellement en Angleterre ;
  • le père avait consenti à un déménagement en Angleterre, sans limite dans les circonstances ou le temps, et ce consentement n’avait pas été obtenu par fraude ;
  • les allégations de préjudice pour l’enfant ne lui paraissaient pas fondées ;
  • il avait conséquemment usé de son pouvoir discrétionnaire pour ordonner le retour de l’enfant en Israël, précisant qu’il aurait pu également prendre cette décision en vertu de l’inherent jurisdiction de la High Court of Justice au regard de l’intérêt de l’enfant.

La mère avait bien sûr interjeté appel de la décision, arguant notamment que le juge Alistair MacDonald n’avait pas abordé correctement la question du non-retour de l’enfant au regard de la Convention de La Haye du 25 octobre 1980 sur les aspects civils de l’enlèvement international d’enfants et qu’aucune rétention illicite n’aurait pu être établie s’il l’avait fait, auquel cas la Convention n’avait pas lieu d’être appliquée et le juge avait eu tort d’ordonner le retour de l’enfant en Israël (§ 35).

Les questions traitées par la Court of Appeal of England and Wales étaient les suivantes (§ 2) :

  1. Y a-t-il eu une rétention dans le champ d’application de la Convention de La Haye du 25 octobre 1980 sur les aspects civils de l’enlèvement international d’enfants ?
  2. Le juge Alistair MacDonald a-t-il traité correctement la question de la protection de l’enfant ?
  3. Le juge Alistair MacDonald a-t-il eu tort d’ordonner le retour immédiat de l’enfant en vertu de la Convention de La Haye du 25 octobre 1980 sur les aspects civils de l’enlèvement international d’enfants ou de l’inherent jurisdiction de la High Court of Justice ?

Le juge Andrew Moylan relève que le juge Alistair MacDonald n’a effectivement pas abordé le sujet de la rétention de l’enfant dans le champ d’application de la Convention de La Haye du 25 octobre 1980 sur les aspects civils de l’enlèvement international d’enfants (§ 28).

Le juge Andrew Moylan accorde par ailleurs à la mère que le juge Alistair MacDonald aurait dû déterminer si le non-retour de l’enfant en janvier dernier était illicite en vertu de l’article 3 de la Convention de La Haye du 25 octobre 1980 sur les aspects civils de l’enlèvement international d’enfants, car c’était sur cette seule base que l’affaire pouvait entrer dans le champ d’application de ladite Convention. En l’espèce, le juge Andrew Moylan estime que ladite Convention « cannot bite », au regard des conclusions du juge Alistair MacDonald sur le déménagement de la famille en Angleterre (§§ 55-59).

Le juge Andrew Moylan constate cependant que le juge Alistair MacDonald a correctement évalué le risque de préjudice pour l’enfant et déterminé que les mesures de protection identifiées ou proposées y répondraient de manière appropriée (§ 70), qu’il a suffisamment exposé les raisons pour lesquelles il a décidé le retour immédiat de l’enfant en Israël et qu’il a clairement analysé l’intérêt supérieur de l’enfant (§§ 71-72).

Le juge Andrew Moylan a donc rejeté l’appel de la mère et a substitué à la décision du juge Alistair MacDonald rendue en vertu de la Convention de La Haye du 25 octobre 1980 sur les aspects civils de l’enlèvement international d’enfants une décision rendue en vertu de l’inherent jurisdiction.

Références
Court of Appeal (England and Wales)
Décision du 18 juin 2019
NY (A Child : 1980 Hague Abduction Convention : Inherent Jurisdiction) [2019] EWCA Civ 1065

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