Question sur la réglementation de la gestation pour autrui

Journal officiel de la République française, édition « Débats parlementaires – Assemblée nationale », nº 34 A.N. (Q), 23 août 2016

Le Roy (Marie-Thérèse), question écrite nº 95058 au ministre de la Justice sur la réglementation de la gestation pour autrui [Journal officiel de la République française, édition « Débats parlementaires – Assemblée nationale », nº 16 A.N. (Q), 19 avril 2016, p. 3249].

Marie-Thérèse Le Roy (© D.R.)

Marie-Thérèse Le Roy (© D.R.)

Mme Marie-Thérèse Le Roy attire l’attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice sur la transcription à l’état civil français des actes de naissance d’enfants de père français nés légalement à l’étranger par gestation pour le compte d’autrui (GPA). La Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH) s’était déjà prononcée sur la question dans un arrêt du 26 juin 2014, estimant que si le refus de transcrire un acte de naissance établi à l’étranger lorsque cette naissance résulte d’une GPA est conforme à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales, le refus de transcrire la filiation des enfants à l’égard du père biologique constituait une atteinte disproportionnée au droit des enfants. Par ailleurs, concernant la délivrance des certificats de nationalité, la circulaire en date du 25 février [sic – lire : janvier] 2013 appelait les juridictions françaises compétentes à faire droit à celles-ci dès lors que le lien de filiation avec un Français résulte d’un acte d’état civil étranger probant au regard de l’article 47 du code civil. Force est de constater qu’une disparité évidente existe selon les départements d’origine des intéressés. Elle lui demande donc de bien vouloir lui préciser les intentions du Gouvernement face aux arrêts de la CEDH et les mesures qu’il entend prendre pour que les enfants nés à l’étranger de père français puissent être reconnus par l’État français.


Réponse du ministère de la Justice publiée dans le Journal officiel de la République française, édition « Débats parlementaires – Assemblée nationale », nº 34 A.N. (Q), 23 août 2016, pp. 7570-7571.

Jean-Jacques Urvoas (© Éric Walter)

Jean-Jacques Urvoas (© Éric Walter)

Le Gouvernement français est particulièrement attaché à ce que la France puisse procéder, dans le strict respect de ses engagements internationaux, à l’exécution des arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme. Ces décisions européennes marquent la recherche d’un équilibre entre le principe d’ordre public de prohibition des conventions de gestation pour le compte d’autrui, qui demeure, et auquel le gouvernement français est particulièrement vigilant et la nécessaire protection qu’il convient de garantir à l’enfant au nom, d’une part, de son intérêt supérieur au sens de l’article 3 paragraphe 1 de la Convention de New York du 26 janvier 1990, relative aux droits de l’enfant, et, d’autre part, de son droit à mener une vie familiale normale au sens de l’article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. Elles confirment donc la nécessité impérieuse de distinguer le sort des enfants de celui de leurs parents ayant eu recours à un contrat illicite et ainsi de leur garantir, sur le territoire national, le droit au respect de leur identité, dont la filiation et la nationalité française constituent un aspect essentiel. Les arrêts du 3 juillet 2015 de la Cour de cassation ont par ailleurs clarifié la situation juridique des enfants disposant d’un acte d’état civil probant au sens de l’article 47 du code civil et autorisent désormais, sous réserve de leur conformité aux dispositions de l’article 47 précité, la transcription des actes de naissance étrangers de ces enfants sans remettre aucunement en cause la prohibition d’ordre public des conventions portant sur la procréation ou la gestation pour le compte d’autrui prévue aux articles 16-7 et 16-9 du code civil. S’agissant de la question de la délivrance des certificats de nationalité française, la circulaire JUSC 1301528C du 25 janvier 2013 relative à la délivrance des certificats de nationalité française (CNF) a également rappelé que le seul soupçon du recours à une convention, conclue à l’étranger, portant sur la procréation ou la gestation pour le compte d’autrui (GPA), ne pouvait suffire à opposer un refus à une demande de délivrance de CNF, dès lors que le lien de filiation avec un Français de l’enfant qui en est issu résulte d’un acte de naissance probant au regard de l’article 47 du code civil. Cette circulaire a fait l’objet, dès sa publication, d’un recours en annulation devant le Conseil d’État, lequel s’est prononcé le 12 décembre 2014 en confirmant la possibilité de délivrer un CNF aux enfants concernés. L’instruction des demandes de délivrance de CNF, suspendue dans l’attente de la décision du Conseil d’État, a pu reprendre son cours, de sorte qu’à ce jour, plus de 235 CNF ont été délivrés ou sont en cours de délivrance, 68 demandes étant en cours d’examen, notamment parce que les dossiers sont incomplets et que des pièces complémentaires ont été sollicitées. À ce jour, aucun dossier de GPA soumis à l’examen du bureau de la nationalité du ministère de la justice n’a été suivi d’un refus de délivrance de CNF. La consultation systématique du bureau de la nationalité du ministère de la justice pour toutes demandes de délivrance de CNF qui entrent dans le champ de la circulaire du 25 janvier 2013 a été rappelée par une dépêche du 23 avril 2015, et ce dans le souci de permettre un traitement harmonisé des dossiers sur le territoire national par les quelques 220 tribunaux d’instance compétents en matière de nationalité.


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