Constitutionnaliser le « droit à l’interruption volontaire de grossesse » : un faux débat

Communiqué de presse d’Alliance Vita

Alliance Vita

L’Assemblée nationale examine demain la proposition de loi de LFI (La France Insoumise) prévoyant que « Nul ne peut porter atteinte au droit à l’interruption volontaire de grossesse et à la contraception. La loi garantit à toute personne qui en fait la demande l’accès libre et effectif à ces droits. » Alliance Vita dénonce un faux débat.

Depuis le début de cette législature, l’idée s’est répandue chez certains politiques qu’il faudrait modifier la Constitution en écho à la décision de la Cour Suprême des États-Unis du 24 juin 2022.

La situation en France est pourtant radicalement différente de celle des États-Unis. Dans ce pays il n’y a pas de loi fédérale régulant l’avortement. L’arrêt de la cour suprême renvoie désormais la législation de l’avortement aux États fédérés. En France comme dans de nombreux autres pays, l’avortement est encadré par des lois votées par le Parlement.

Dans notre pays, le nombre d’IVG demeure à un niveau élevé avec 223 300 interruptions volontaires de grossesse (IVG) enregistrées en 2021 [1] et un taux record de recours (15,5 IVG pour 1 000 femmes âgées de quinze à quarante-neuf ans en 2021).

Ce faux débat autour de la constitutionnalisation occulte la réalité de l’IVG aujourd’hui. Non seulement le dernier rapport de la direction de la Recherche, des Études, de l’Évaluation et des Statistiques [1] montre que le taux global de recours à l’IVG a tendance à augmenter, mais l’organisme a également établi en 2020 que ce sont les femmes les plus pauvres qui avortent le plus souvent [2]. L’IVG s’avère ainsi un marqueur d’inégalités sociales qui devrait alerter les pouvoirs publics.

Des études récentes montrent aussi des liens entre les violences conjugales et les interruptions volontaires de grossesse à répétition [3]. En France, le lien entre IVG et violences demeure cependant peu exploré : très peu de médecins posent systématiquement la question des violences aux femmes réalisant une IVG [4]. Or, on sait que pour 40 % des 201 000 femmes concernées chaque année par les violences du conjoint, celles-ci ont débuté à la première grossesse [5].

Par ailleurs, inscrire un droit inconditionnel à l’avortement dans la constitution pourrait faire sauter le cadre législatif actuel et conduire à un accès illimité à l’IVG. On peut craindre qu’il devienne alors possible d’exiger une IVG jusqu’à son terme ou en raison du sexe.

Ces gesticulations politiciennes occultent la réalité de ce que vivent les femmes : la nécessité est plus que jamais à la prévention de l’avortement et à permettre à celles qui le souhaitent de poursuivre leur grossesse.

Notes
  1. Vilain (Annick), Fresson (Jeanne), Rey (Sylvie), « Interruptions volontaires de grossesse : la baisse des taux de recours se poursuit chez les plus jeunes en 2021 », Études et Résultats, nº 1241, 27 septembre 2022.
  2. Vilain (Annick), et alii, « Interruptions volontaires de grossesse : une hausse confirmée en 2019 », Études et Résultats, nº 1163, 24 septembre 2020.
  3. Pinton (Anne), et alii, « Existe-t-il un lien entre les violences conjugales et les interruptions volontaires de grossesses répétées ? », Gynécologie Obstétrique Fertilité & Sénologie, vol. 45, nº 7-8, 25 juillet 2017, pp. 416-420.
  4. Pelizzari (Mélanie), Lazimi (Gilles), Ibanez (Gladys), « Interruptions volontaires de grossesse et violences : étude qualitative auprès de médecins généralistes d’Île-de-France », Cliniques méditerranéennes, nº 88, 24 octobre 2013, pp. 69-78.
  5. « La grossesse, un moment clé pour détecter les violences conjugales », France 3 Hauts-de-France, 23 novembre 2014.

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