Nous professionnels déclarons :
La Déclaration des droits sexuels de l’IPPF (Fédération internationale des plannings familiaux), la publication des Standards européens d’éducation à la sexualité de l’OMS élaborés par divers lobbies, sont à l’origine du déploiement par nos décideurs politiques français d’une nouvelle forme d’« éducation à la sexualité » destinée aux mineurs à partir de la maternelle sur toute la France en 2017 [1], et qui a déjà commencé à être mise en place.
Nous, professionnels de l’enfance et/ou du psycho-traumatisme, pédopsychiatres, psychiatres, psychologues, médecins, pédiatres, psychanalystes d’enfants, psychothérapeutes, éducateurs, travailleurs sociaux, infirmières, enseignants, réfutons formellement le postulat selon lequel les enfants doivent être éveillés physiquement ou psychiquement à la sexualité par le moyen d’une éducation quelconque.
Nous savons que la rencontre précoce de l’enfant avec la sexualité adulte ou conçue par des adultes peut être fortement traumatique et va à l’encontre du respect de son rythme affectif et cognitif, de sa croissance psychique, de sa maturation. La notion de minorité sexuelle légale située avant quinze ans correspond bien à la reconnaissance de ce danger.
L’« éducation à la sexualité » qui figure dans ces textes internationaux est proche de la corruption de mineurs, la corruption étant constituée par le fait d’inciter l’enfant à des exhibitions, à des masturbations ou à des relations sexuelles. Or les Standards pour l’éducation sexuelle en Europe [2] incitent les enfants avant quatre ans à « jouer au docteur » ; à six ans au « plaisir et [à] la satisfaction liés au toucher de son propre corps (masturbation, auto-stimulation) » ; et de neuf à douze ans informent sur « la première expérience sexuelle, le plaisir, la masturbation, l’orgasme, les différences entre l’identité sexuelle et le sexe biologique », « décider consciemment d’avoir ou non des expériences sexuelles » (p. 46). Et bien d’autres propositions encore.
Contrairement à l’affirmation du Rapport relatif à l’éducation à la sexualité du HCE (Haut Conseil à l’Égalité entre les femmes et les hommes) [3], qui déclare qu’« il est temps de changer de paradigme et de parler d’une sexualité synonyme de plaisir et d’épanouissement personnel » (p. 7 du rapport 2016), nous considérons qu’il est temps de s’occuper sérieusement de protéger de façon effective les enfants des intrusions sexuelles des adultes et des maltraitances de tout type, et aussi de les éduquer vers la maîtrise de leurs pulsions, et non vers une libération sexuelle tout azimut déconnectée de l’affectif. Les besoins de protection psychique des enfants ne changent pas parce que des adultes prônent pour eux-mêmes une plus grande liberté sexuelle.
Nous estimons gravissime ce changement de paradigme, car les adultes n’ont pas à « éduquer » les mineurs, quel que soit leur âge, à la « sexualité » et au « plaisir sexuel » dans leur lieu de scolarité. Cette attitude intrusive ne prend pas en compte la notion d’immaturité sexuelle de l’enfant. Car nous savons qu’il faut que l’enfant ait acquis une maturité psychique suffisante grâce à l’éducation parentale et aux interdits familiaux, pour ne pas être débordé par ses excitations sexuelles (et par sa violence), maturité qui n’est acquise que très progressivement.
Nous rappelons que les conséquences pour les enfants d’une entrée précoce dans la sexualité des adultes, qu’elle soit actée dans des abus réels (attouchements, viols) ou vécue à cause d’un climat transgressif (qui par des suggestions, des allusions, des informations données trop précocement, font baigner l’enfant dans une ambiance sexualisée), sont bien connues [4]. Les pédopsychiatres et psychologues d’enfants savent combien ceci entrave le développement psycho–affectif de l’enfant et entraîne une excitation avec des attitudes corporelles érotisées, des provocations sexuelles, mais aussi des traumatismes psychiques tels que des inhibitions, des troubles anxieux divers, des phobies. Quant aux abus sexuels, le plus souvent supposés acceptés par un enfant alors qu’il n’a pas la maturité nécessaire pour être consentant, ils sont à l’origine de nombreuses pathologies psychiatriques à l’âge adulte (dépression, anxiété, violence physique ou sexuelle subie ou agie, suicide) et de problèmes de santé majeurs durant la vie entière. De plus, nous savons qu’un grand nombre d’incestes sont commis sans violence, un membre de la famille débutant ses actes en expliquant à sa future victime que « c’est pour faire son éducation ». Et nous rappelons que protéger en faisant de l’information et de la prévention n’est pas éduquer à la sexualité, que lutter contre les violences sexistes n’est pas déconstruire (ce qui est une violence en soi) le travail d’identification sexuelle en construction chez l’enfant.
L’enfant, pour se construire et s’organiser psychiquement, a besoin que la différence des générations soit posée clairement au travers d’interdits. Or quand un adulte, qui plus est en situation d’autorité, parle à un enfant de sexualité en dehors de toute demande de sa part, l’intrusion qu’il réalise dans la vie psychique a une tonalité incestueuse : l’adulte mêle l’enfant à ses propres pensées sur le sexe et il est alors dans le registre de la séduction et non de l’information.
Notre société a le devoir de refréner les pulsions sexuelles [5] et agressives de l’enfant par l’éducation, et non d’autoriser et de stimuler leur déploiement par un quelconque mode éducatif. Le rôle de l’État est-il de promouvoir l’excitation, d’apporter à chaque individu toujours plus de revendications à la « jouissance » sans limite ?
Et est-ce le rôle de l’État de s’immiscer dans la sphère intime des familles, des enfants et des adultes, par le traitement de questions d’ordre privé, car on peut difficilement nier que les questions de sexualité sont du domaine du privé, non seulement des adultes mais aussi des enfants ?
Enfin le rôle de l’État n’est pas de venir entraver les constructions identitaires familiales sur lesquelles l’enfant doit pouvoir s’appuyer dans le respect du processus de filiation et de transmission intergénérationnelle. Lutter contre les inégalités homme-femme et contre les discriminations dont une personne peut faire l’objet à cause de ses choix sexuels n’a rien à voir avec la théorie du genre qui affirme que notre identité sexuelle est une construction sociale qu’il faut déconstruire. Nous soulignons ici la confusion volontairement établie entre l’égalité (de droit) et l’identique.
Nous démontrons, dans le récapitulatif historique ci-joint concernant cette « éducation à la sexualité », l’existence d’une filiation entre les idéologies pédophiles de l’Institut Kinsey, la Déclaration des droits sexuels et les Standards européens sur l’éducation à la sexualité.
Véritable imposture, ces textes mélangent la prévention aux risques sexuels que sont les abus sexuels sur mineurs, les MST, les risques de grossesse précoce, préventions essentielles, et une exposition des enfants à la sexualité (celle des adultes) avant qu’ils ne soient en âge de pouvoir en intégrer psychiquement quelque chose. L’éducation a pour fonction de refréner le monde pulsionnel de l’enfant. Face à ces textes, nous pensons que l’État doit pouvoir soutenir la nécessité de contraintes, de limites, de lois morales, et empêcher que règne la loi du plus fort et du plus séducteur.
Nous déplorons l’existence de moyens délivrés pour « éduquer » les jeunes à la sexualité alors qu’il existe en France un déni majeur des violences sexuelles sur les mineurs : seulement 5 % des plaintes pour viol sur mineurs aboutissent à une condamnation et peu de victimes sont protégées de leur agresseur, en particulier lorsqu’il est un membre de leur famille. La priorité nous paraît être un véritable plan de protection des mineurs vis-à-vis des violences sexuelles.
Nous considérons donc comme indispensable de réfléchir avec des professionnels psychologues cliniciens et pédopsychiatres expérimentés aux informations qui sont à délivrer aux enfants en fonction de leur âge afin de déterminer ce qui peut être abordé en public, dans une classe ou un autre lieu éducatif, sans faire effraction dans la vie psychique des enfants et adolescents, et de modifier les projets ministériels en conséquence. Il s’agit d’un principe de précaution minimum dont on ne peut que regretter qu’il n’ait pas été respecté.
C’est pourquoi notre groupe fait cinq propositions :
- Arrêter toute « éducation à la sexualité » en classe maternelle et primaire. On laisse les enfants tranquilles. Il existe suffisamment de brochures bien faites sur comment on fait les enfants, adaptées à leur âge, et qu’un mineur peut regarder chez lui ou dans les bibliothèques, seul ou avec ses parents, s’il le souhaite et au moment où il le souhaite. Et rien n’empêche de proposer un ouvrage (un de plus alors qu’il en existe déjà beaucoup de bien faits) pour aider les parents à parler de sexualité avec leur enfant en réponse à ses questions, ou de leur proposer des espaces de discussion pour cela.
Ceci n’empêche pas des interventions de prévention des abus sexuels sur mineurs au sein des écoles, qui doivent continuer à être développées en apportant une information adaptée à l’âge de l’enfant. - Arrêter totalement de parler de la théorie du genre selon laquelle les notions d’homme et de femme ne sont qu’une construction sociale qui doit être remise en question et, pour cela, déconstruite. Le risque de passer d’une discussion concernant la manière dont les rôles des hommes et des femmes sont en partie socialement déterminés à une confusion purement idéologique entre les identités sexuelles masculine et féminine est trop grand. Et on laisse ces interrogations aux adultes.
- Pour les adolescents :
- maintenir l’obligation qu’à partir de quatorze ans, les élèves assistent aux cours consacrés à l’indispensable prévention concernant les MST, la contraception et les grossesses précoces, la possibilité de prendre une contraception et d’avoir recours à l’IVG sans accord parental, la pilule du lendemain, la possibilité de dire « non » à des sollicitations sexuelles, l’interdiction des relations sexuelles avec un mineur de moins de quinze ans et entre mineurs s’il existe une grande différence d’âge, l’interdit de l’inceste, les différentes sanctions pénales, etc.
- mais limiter cette formation à des données scientifiques, limite que les adolescents demandent si on se donne la peine de les écouter. Et développer des espaces de relation privée pour ceux qui ont besoin d’informations plus personnelles dans un cadre qui ne soit pas traumatique pour eux. Dans l’ensemble, les adolescents trouvent que les infirmières scolaires répondent à ce besoin de compréhension et de relation de confiance. Il serait donc nécessaire qu’il y ait suffisamment d’infirmières dans tous les établissements scolaires publics et privés.
- Créer au niveau national et régional des comités (ou conseils) de régulation (ou de vigilance), totalement indépendants des ministères concernés, et des comités d’éducation à la santé et à la citoyenneté (CESC), comités auxquels pourraient s’adresser les enseignants, élèves, parents, qui considéreraient qu’il existe des anomalies dans l’enseignement auxquels ils ou les enfants assistent, en particulier chaque fois que l’intention initiatrice et séductrice semble l’emporter sur l’information ou qu’il est estimé que les jeunes ont accès à des informations traumatiques ou inadaptées. Ce comité serait composé de deux psychologues cliniciens ayant une compétence en psychologie de l’enfant et/ou de pédopsychiatres, d’un représentant des parents, et d’un membre de l’Éducation nationale ou des services de santé.
Aucune de ces personnes ne devra avoir pris de position idéologique ou prosélyte concernant les thèmes cités ci-dessus, et elles devraient obligatoirement être extérieures à l’établissement d’où émaneraient les critiques. Les CESC de chaque établissement et les délégués de parents d’élèves et de classes devaient être mis au courant de l’existence de ce comité par le chef d’établissement.
Quant au conseil national, il recenserait les situations dont les conseils régionaux seraient saisis afin de tenter d’améliorer le dispositif national, et évalueraient la pertinence du fonctionnement de sites comme onSexprime et des organismes partenaires. - Retirer les termes « droits sexuels » et « éducation sexuelle », « éducation à la sexualité » ainsi que les références directes et indirectes aux textes Déclaration des droits sexuels et Standards pour l’éducation sexuelle en Europe, ainsi qu’à leur contenu, de tous les supports ministériels français.
Site dédié avec liste des premiers signataires
Notes
- Bousquet (Danielle), Collet (Margaux), Laurant (Françoise), Rapport relatif à l’éducation à la sexualité, Paris, Haut Conseil à l’Égalité entre les femmes et les hommes, 13 juin 2016.
- Collectif, Standards pour l’éducation sexuelle en Europe, Köln, Bundeszentrale für gesundheitliche Aufklärung, 2010 (version française : Lausanne, Santé sexuelle, 2013).
- Bousquet (Danielle), Collet (Margaux), Laurant (Françoise), Rapport relatif à l’éducation à la sexualité, Paris, Haut Conseil à l’Égalité entre les femmes et les hommes, 13 juin 2016.
- Les professionnels formés à la psychologie de l’enfant et du traumatisme pourront y reconnaître les théories de Racamier sur l’incestuel et les dommages psychiques décrits.
- Ce sont des pulsions qui appartiennent au psychisme, elles sont des pulsions de vie et elles n’ont rien à voir avec la sexualité des adultes.
Commentaire de P@ternet
Une fois n’est pas coutume : nous soutenons, à une réserve près, une pétition qui compte parmi ses promoteurs Maurice Berger, Catherine Bonnet, Jacqueline Phélip et autres figures connues de la misopatrie. Face au totalitarisme d’un État qui prétend réguler tous les aspects de la vie des citoyens, et notamment la vie familiale, il se trouve que nous sommes globalement d’accord et nous n’allons pas nous en plaindre. Ce d’autant que cette pétition, contrairement à beaucoup d’autres, est rédigée dans un français correct et étayée par un argumentaire relativement sérieux.
Nous exprimons cependant une réserve certaine quant à la troisième proposition, l’assistance obligatoire à des « cours consacrés à l’indispensable prévention concernant les MST, la contraception et les grossesses précoces, la possibilité de prendre une contraception et d’avoir recours à l’IVG sans accord parental, la pilule du lendemain », etc. Cette proposition est en effet totalement contradictoire avec l’objet de la présente pétition, puisque ces cours sont le lieu privilégié de l’« éducation à la sexualité » décriée plus haut avec raison. La promotion de la contraception qui y est faite ne peut qu’engendrer l’irresponsabilité chez des jeunes, incités à poser des actes sans avoir à en assumer les conséquences puisque la sexualité a été dissociée de sa finalité reproductive intrinsèque et des responsabilités qui y sont liées. Plus grave encore, une partie importante de leur contenu consiste à apprendre (voire rappeler) à des adolescents qu’ils ont le « droit » de bafouer l’autorité parentale (ou ce qu’il peut en rester de nos jours…) et de prendre seuls des décisions adultes sans avoir, là encore, à assumer les responsabilités afférentes.
Enfin, vouloir que les personnes membres des « comités d’éducation à la santé et à la citoyenneté » n’aient pas « pris de position idéologique ou prosélyte concernant les thèmes » évoqués dans cette pétition nous paraît pour le moins ubuesque : les auteurs et signataires s’exclueraient donc eux-mêmes de ces comités ?!
Manifeste archivé au format PDF (48 Ko, 4 p.).
Communiqué de presse archivé au format PDF (69 Ko, 1 p.).
Récapitulatif historique archivé au format PDF (407 Ko, 23 p.).
Texte introductif de Maurice Berger archivé au format PDF (361 Ko, 11 p.).