Bansard (Jean-Pierre), question écrite nº 123 à la ministre de l’Europe et des Affaires étrangères sur le recouvrement des pensions alimentaires dues par un parent français établi à l’étranger [Journal officiel de la République française, édition « Débats parlementaires – Sénat », nº 27 S (Q), 7 juillet 2022, p. 3271].
M. Jean-Pierre Bansard attire l’attention de Mme la ministre de l’Europe et des Affaires étrangères sur le recouvrement des pensions alimentaires dues par un parent français établi à l’étranger. En France, le dispositif de l’agence de recouvrement et d’intermédiation des pensions alimentaires (ARIPA), mis en place par la caisse des allocations familiales (CAF) en 2017, assure le recouvrement des pensions alimentaires impayées tout en préservant les intérêts des enfants. Cependant, si le débiteur d’une créance alimentaire réside à l’étranger, celle-ci est transmise à la direction spécialisée des finances publiques pour l’étranger à Nantes, puisque le critère d’attribution d’un titre au comptable compétent est l’adresse du débiteur. Ce service n’a pas de levier institutionnel pour recouvrer les créances non fiscales à l’étranger, car elles ne sont pas couvertes par les conventions internationales d’entraide entre administrations fiscales, sauf dans l’hypothèse où le débiteur résidant à l’étranger dispose d’un compte dans un établissement bancaire domicilié en France. Le nombre de personnes concernées par le recouvrement des créances alimentaires à l’étranger est en hausse. Si certains instruments internationaux juridiques existent, ils sont limités aux pays signataires et la mise en œuvre de procédures est complexe et bien souvent dépendante des autorités étrangères. Le bureau du recouvrement des créances alimentaires (RCA) du ministère des affaires étrangères est l’autorité centrale en France pour l’application des conventions internationales, le ministère de la justice, et notamment son bureau du droit de l’union, du droit international privé et de l’entraide civile, conservent, eux, une compétence subsidiaire pour le traitement des dossiers des pays avec lesquels la France est liée par des accords bilatéraux. Il lui demande de dresser un bilan de l’action de ces différentes instances en matière de recouvrement de créances alimentaires et l’interroge sur la transmission effective des dossiers entre elles. Il aimerait aussi savoir ce qui est envisagé pour simplifier le traitement administratif et assurer un suivi aux personnes concernées. Enfin, il lui demande si des actions bilatérales ciblées dans les pays où le nombre de débiteurs est important et où les procédures actuelles ont une efficacité limitée sont envisagées.
Réponse du ministère de l’Europe et des Affaires étrangères publiée dans le Journal officiel de la République française, édition « Débats parlementaires – Sénat », nº 30 S (Q), 28 juillet 2022, p. 4025.
Le bureau du recouvrement des créances alimentaires (RCA) du ministère de l’Europe et des affaires étrangères (MEAE) est l’autorité centrale française compétente pour mettre en œuvre la procédure de recouvrement de créances alimentaires à l’étranger, au titre de trois textes internationaux : la convention de New York sur le recouvrement des aliments à l’étranger du 20 juin 1956 (15 % des dossiers) ; la convention de La Haye du 23 novembre 2007 sur le recouvrement international des aliments destinés aux enfants et à d’autres membres de la famille (10 % des dossiers) et le règlement (CE) nº 4/2009 du Conseil du 18 décembre 2008 relatif à la compétence, la loi applicable, la reconnaissance et l’exécution des décisions et la coopération en matière d’obligations alimentaires (75 % des dossiers). Le bureau RCA entretient une coopération étroite avec le bureau du droit de l’Union européenne (UE), du droit international privé et de l’entraide civile (DEDIPE) du ministère de la justice. Dans le cadre d’une coopération entre les États parties en matière de recouvrement alimentaire, le bureau RCA est chargé de transmettre et de recevoir les demandes de recouvrement d’aliments et de faciliter l’introduction de procédures relatives à ces demandes, soit en tant qu’autorité requérante (avec un créancier en France et un débiteur à l’étranger, soit 1/3 des dossiers), soit en tant qu’autorité requise (avec un créancier à l’étranger et un débiteur en France, soit 2/3 des dossiers). En tant qu’autorité requérante, il agit également pour le compte des Caisses d’allocations familiales (CAF), qui n’ont pas la compétence d’agir à l’étranger. Le bureau RCA, dont l’effectif a été augmenté, gère actuellement 2 200 dossiers. En 2021, son action a permis de récupérer plus de 778 000 € de créances alimentaires pour 151 dossiers. Le traitement, qui parfois s’étale sur plusieurs années, se heurte à deux écueils : l’envoi de dossiers incomplets par les créanciers (difficultés pour obtenir certaines pièces des tribunaux) et l’insolvabilité de certains débiteurs (parfois organisée ou consécutive à la crise sanitaire). L’adoption du règlement européen de décembre 2008 a permis de simplifier les procédures (décisions judiciaires fixant les créances alimentaires directement exécutoires dans un autre pays de l’UE, si les deux États concernés ont signé le protocole de la Haye sur la loi applicable, ce qui est le cas de tous les pays membres, sauf le Danemark). Les dossiers de recouvrement alimentaire entre pays de l’UE sont donc moins onéreux et plus rapides. En outre, afin de simplifier et d’accélérer les procédures, la France, avec d’autres acteurs, soutient financièrement iSupport, un programme d’échanges numériques et sécurisés développé par le Bureau permanent de la Convention de La Haye. Ce programme rendra possibles les envois électroniques sécurisés entre autorités centrales des pays de l’UE. Les procédures pour les pays hors UE ayant adhéré aux Conventions de New York et de La Haye demeurent, quant à elles, parfois longues et aléatoires. Les créanciers sont informés dès qu’un dossier connaît une avancée. Il arrive également qu’un conflit de décisions des juridictions française et étrangère empêche de trouver une solution acceptable par les parties. Au plan bilatéral, c’est en général lors de la tenue de commissions mixtes que sont abordés les dossiers dont le traitement est complexe. Ces commissions reprennent peu à peu du fait de l’amélioration de la situation sanitaire. Concernant les pays non signataires de conventions internationales, le bureau RCA continue, en lien avec le DEDIPE et dans le cadre de la Convention de La Haye, à plaider pour une adhésion à ces conventions ou pour la conclusion d’une convention bilatérale. C’est dans cette optique qu’une rencontre a été organisée avec Israël, à l’occasion de la première commission spéciale sur la convention du 23 novembre 2007, qui s’est tenue mi-mai 2022 à La Haye.
Question archivée au format PDF (137 Ko, 3 p.).