Lahellec (Gérard), question d’actualité au gouvernement nº 2219G sur la gestion de la crise sanitaire dans les établissements scolaires, adressée au ministre de l’Éducation nationale, de la Jeunesse et des Sports lors de la séance publique du 12 janvier 2022.
M. le président. La parole est à M. Gérard Lahellec, pour le groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
M. Gérard Lahellec. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports.
Monsieur le ministre, dans l’actuel contexte de pandémie, l’école est un véritable enjeu.
L’école est un lieu sensible. L’école maternelle, en particulier, est un lieu d’apprentissage de la socialisation, ce qui rend impossible, physiquement, l’isolement des élèves ou le respect de tous les gestes barrières. L’école peut donc être aussi un lieu de propagation de la pandémie.
Ce que nous ne savions pas il y a dix-huit mois, nous le connaissons mieux aujourd’hui, au moment où nous vivons la cinquième vague de cette pandémie.
Dès l’instant que vous avez fait le choix, monsieur le ministre, de maintenir ouvertes les écoles, comment ne pas comprendre le vaste mouvement social unitaire qui se prépare pour demain ? Les revendications des enseignants et de tous ceux qui environnent l’école sont justifiées, et les associations de parents d’élèves les soutiennent.
Comment ne pas comprendre ce message, au moment où la situation devient intenable dans nos écoles, dans les familles et dans nos collectivités ?
Ce dont il est question aujourd’hui, si nous conservons l’école ouverte, c’est mettre en perspective une nouvelle approche du sujet pour les deux ou trois années à venir.
Cela devrait appeler le gel immédiat des suppressions de postes d’enseignants, ce qui ne semble pas être le cas au regard des cartes scolaires qui se préparent.
Cela devrait appeler des recrutements nouveaux, pour assurer les remplacements dans les classes.
Cela devrait appeler une ambition nouvelle pour le développement de la médecine scolaire.
Cela devrait appeler, enfin, une politique de soutien à des investissements nouveaux avec les collectivités, pour installer, par exemple, des purificateurs d’air dans les classes.
Pouvez-vous nous dire, monsieur le ministre, les suites que vous entendez donner à ces revendications ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE. – Mme Michelle Meunier applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports.
M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports. J’adhère, monsieur le sénateur, au début de votre question.
Vous avez tout à fait raison de rappeler à quel point l’école ouverte est un enjeu de santé publique autant que d’éducation pour nos enfants. Il existe notamment un enjeu de bien-être psychologique, ainsi que le souligne la Société française de pédiatrie depuis le début de la crise.
Au bout de deux ans, un consensus, qui n’existait pas au début, s’est établi sur cette question de l’école ouverte. Cette ouverture, il faut la mettre en œuvre sous certaines conditions.
Bien sûr, nombre de mesures ont été prises pour que l’école ouverte puisse exister, et nous avions abouti à une régulation qui fonctionnait encore au mois de décembre dernier. Mais il est exact de dire que le nouveau variant crée une réalité nouvelle, avec une contamination beaucoup plus forte. Cette réalité, les autres pays européens la connaissent aussi.
C’est pourquoi, vous le savez, nous avons pris la décision, à la lumière des préconisations du Haut Conseil de la santé publique, d’ajouter au test initial qui existait en décembre deux autotests.
J’entends les demandes qui s’expriment aujourd’hui à cet égard, de même que le Premier ministre a pris la mesure des situations complexes apparues la semaine dernière, notamment les files d’attente devant les pharmacies. En conséquence, nous avons décidé d’une nouvelle mesure, qui prévoit trois autotests. Ce nouveau dispositif permet d’assurer la sécurité sanitaire ainsi que d’atteindre l’objectif de l’école ouverte.
Il y a, bien sûr, d’autres choses à faire. Vous avez ainsi mis l’accent sur la question des postes.
Je rappelle qu’au début du mois de janvier la première inquiétude formulée par les uns et les autres concernait les remplacements de professeurs malades. Nous y avons répondu pour l’essentiel en procédant à des recrutements à hauteur de 6 000 équivalents temps plein (ETP), pour muscler nos viviers de remplaçants. Pour l’instant, cela fonctionne : autrement dit, nous n’avons pas d’énormes problèmes de remplacement, même s’il en subsiste néanmoins ; je m’étais d’ailleurs exprimé sur ce point ici même.
Pour qui concerne les autres sujets budgétaires que vous avez évoqués, je veux vous rassurer, monsieur le sénateur, en vous invitant à considérer le budget de l’éducation nationale pour 2022. Je vous rappelle que l’augmentation dudit budget sous ce quinquennat est la plus forte que l’on ait connue. Elle est notamment supérieure à celle qui avait été prévue sous le précédent quinquennat. Des suppressions de postes ne sont donc pas envisagées.
J’y insiste : sur l’ensemble du quinquennat, l’augmentation de 13 % du budget de l’éducation nationale nous permet de faire face à différents problèmes, dont celui du remplacement. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à M. Gérard Lahellec, pour la réplique.
M. Gérard Lahellec. Évidemment, monsieur le ministre, la situation appelle beaucoup d’humilité et de modestie, mais aussi beaucoup de solennité et de respect des revendications. Il faut que les réponses soient à la hauteur des enjeux.
L’école à des besoins nouveaux. Sachons relever ensemble ce défi ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE et sur des travées du groupe SER.)
Bourgi (Hussein), question d’actualité au gouvernement nº 2221G sur la gestion de la crise sanitaire dans les établissements scolaires, adressée au ministre de l’Éducation nationale, de la Jeunesse et des Sports lors de la séance publique du 12 janvier 2022.
M. le président. La parole est à M. Hussein Bourgi, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Hussein Bourgi. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports.
Monsieur le ministre, depuis dix jours, la communauté éducative est confrontée à une situation particulièrement préoccupante et éprouvante, qui découle de la multiplication de protocoles visant à gérer la crise sanitaire. Ce qui pose problème, c’est certes la propagation du virus mais aussi le caractère tardif de vos instructions et de vos revirements. La conséquence en est qu’une grève, qui s’annonce particulièrement suivie, aura lieu demain.
Pouvez-vous nous dire quelle est la genèse de cette situation chaotique, à laquelle les élèves, les parents, les enseignants et les élus locaux sont confrontés ?
Pouvez-vous nous indiquer quelles sont les réponses à ces inquiétudes légitimes et à ce mécontentement réel, lesquels vont s’exprimer demain pour dénoncer l’inadéquation de protocoles qui épuisent les enseignants comme les familles ?
Pouvez-vous nous dire, enfin, ce que vous comptez faire pour restaurer la sérénité dans ce climat particulièrement anxiogène et préjudiciable pour les enfants comme pour les enseignants ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER et sur des travées du groupe CRCE.)
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
M. Jean Castex, Premier ministre. Je vous remercie, monsieur le sénateur, pour votre question, qui me donne l’occasion de revenir sur la gestion de la crise sanitaire, en général, et sur la situation en milieu scolaire, en particulier, laquelle doit évidemment mobiliser toute notre attention.
Permettez-moi, monsieur le président, de préciser la situation qui nous a conduits à prendre nos décisions concernant l’école. Je veux le faire avec le maximum de sérénité possible.
Cela a été dit à l’occasion de la précédente question d’actualité, la France, l’Europe, le monde sont confrontés à un nouveau variant, omicron, qui a des caractéristiques spécifiques. En effet, on sait désormais qu’il est beaucoup plus contagieux que le variant delta, qu’il a en grande partie remplacé, mais pas encore complètement. (Murmures sur les travées du groupe Les Républicains.)
La première des réponses, vous le savez, est plus que jamais la vaccination. Nous savons tous – mesdames, messieurs les sénateurs, vous êtes parfaitement au courant – qu’avec un schéma vaccinal complet et la dose de rappel on peut contracter omicron, mais que l’on est cependant moins contagieux, et surtout que l’on a infiniment moins de chances (« De risques ! » sur des travées des groupes UC et Les Républicains.) – oui, de risques, vous avez raison ! – de développer des formes graves du covid. (Brouhaha réprobateur à droite) Il faut le répéter à nos concitoyens !
La vaccination demeure l’arme centrale. Vous me permettrez à cet égard, monsieur le président, de rappeler l’importance de l’adoption du texte relatif au passe vaccinal, dont débat actuellement la Haute Assemblée. (Le brouhaha s’intensifie.)
M. Marc-Philippe Daubresse. Ce n’est pas l’Assemblée nationale ici ; nous ne sommes pas des amateurs !
M. Jean Castex, Premier ministre. Nous avons dû aussi, et c’est la source des difficultés que nous avons, adapter notre politique de dépistage, de tests, laquelle repose depuis le début de la pandémie sur les avis des autorités scientifiques et sanitaires, et c’est d’ailleurs heureux !
M. Bernard Jomier. C’est faux !
M. Jean Castex, Premier ministre. S’agissant de l’évolution principale de la doctrine de dépistage, ces autorités se sont prononcées – c’est comme ça ! – le 31 décembre 2021.
Pourquoi cette date ? Je vous répondrai que le virus ne connaît ni les vacances ni les fêtes, et ces autorités non plus ! Ces dernières avaient besoin de prendre du recul par rapport à la situation dans les pays qui étaient en avance de phase, notamment dans le sud de l’Afrique et en Grande-Bretagne. Ensuite, elles nous ont adressé un protocole sanitaire.
Ce que vous appelez les atermoiements du Gouvernement, et qui n’en sont pas, correspondent en fait à l’évolution de la doctrine sanitaire, élaborée par les autorités habilitées.
Aux termes de cette doctrine, il est dit depuis le début de la crise – c’est assez logique et cela n’a pas changé – qu’une personne testée positive au covid doit s’isoler. Mais, compte tenu des caractéristiques d’omicron, et parce que notre politique vise à distinguer ceux qui sont vaccinés de ceux qui ne le sont pas, ce qui est une bonne chose, la durée de l’isolement se trouve réduite pour ceux dont le schéma vaccinal est complet.
Par ailleurs, et c’est une innovation, les cas contacts, qu’il s’agisse d’enfants ou d’adultes, disposant d’un schéma vaccinal, doivent non plus s’isoler mais se soumettre davantage aux tests. Là où il fallait un test, il en faut désormais trois. (Rires moqueurs sur les travées du groupe Les Républicains) Si cela vous fait sourire, c’est votre affaire…
C’est d’ailleurs le cas dans tous les pays qui nous entourent.
M. Bernard Jomier. Ce n’est pas vrai !
M. Rachid Temal. Quel échec !
M. Jean Castex, Premier ministre. Voilà quelle politique nous appliquons, mesdames, messieurs les sénateurs, à l’école comme ailleurs.
Voix à gauche. Le ministre, le ministre !
M. Bernard Jomier. Il a déjà démissionné…
M. Jean Castex, Premier ministre. J’entends dire qu’il faudrait réduire le nombre de tests. Ceux qui demandent cela sont d’ailleurs les mêmes qui disaient avant Noël qu’il fallait les rendre gratuits et augmenter leur nombre ! (Exclamations à droite comme à gauche.)
Il ne faut pas réduire le nombre de tests ! Je veux vous donner un chiffre. Je vous ai dit que la France figurait parmi les pays qui testaient le plus au monde : c’est encore plus vrai cette semaine – grâce en soit rendue à tous ceux qui concourent à cet effort collectif ! –, au cours de laquelle le nombre de tests a augmenté de 27 %, avec une moyenne hebdomadaire de 12,1 millions. C’est inédit, et nous pouvons rendre hommage aux laboratoires, aux pharmaciens, à tous les professionnels qui testent les enfants comme les adultes.
Je profite de cette occasion pour ajouter un point devant la Haute Assemblée – vous y serez sensible, monsieur le président !
Comme je l’ai annoncé lors d’un déplacement à Rosny-sous-Bois à la fin de la semaine dernière, après avoir vu la longueur des files d’attente pour les tests – rien d’étonnant à cela puisqu’il faut beaucoup tester ! –, nous avons décidé d’accroître la fourniture en tests et autotests – un marché sur lequel il existe une tension au niveau mondial.
Ce sont 11 millions de kits d’autotests qui sont en cours de livraison dans nos pharmacies.
M. Rachid Temal. Ça marche comment ?
M. Jean Castex, Premier ministre. On est d’ailleurs confronté davantage à un problème de manutention que de produits…
Je l’ai dit la semaine dernière, nous encourageons les initiatives prises par les maires et les élus locaux qui, mobilisés pour la vaccination, rouvrent des centres de tests, notamment à proximité des écoles, comme en Seine-Saint-Denis. (Murmures appuyés puis brouhaha sur des nombreuses travées.)
M. Rachid Temal. On ne comprend rien !
M. Jean Castex, Premier ministre. Je veux le dire devant la Haute Assemblée, non seulement nous favorisons ces démarches, mais nous débloquerons tous les moyens financiers nécessaires pour accompagner ce mouvement de déploiement de centres de tests. (Protestations sur de nombreuses travées. – La voix de M. le Premier ministre se perd dans le brouhaha.) Que ce soit clair ! (« La question ! » sur les travées du groupe SER.)
M. Rachid Temal. Où est le ministre ? Blanquer ! Blanquer ! (M. Rachid Temal martèle son pupitre.)
M. Jean Castex, Premier ministre. Cela concerne les écoles ! (Exclamations continues sur de nombreuses travées.)
Car ce qui pose question s’agissant de l’école, outre le protocole sanitaire, dont j’ai annoncé l’allégement, ce sont aussi les files d’attente d’enfants et de parents devant les pharmacies. Nous devions résoudre ce problème ! (Brouhaha.)
Mesdames, messieurs les sénateurs, écoutez-moi, je sais bien que l’heure est aux polémiques… J’ai l’habitude, rassurez-vous !
Notre politique est la suivante : on vaccine et on teste ! L’alternative, ce serait la fermeture des écoles et de l’économie : cela, je suis bien certain que, de façon unanime, nous n’en voulons pas ! (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et INDEP, ainsi que sur des travées du groupe UC. – Protestations sur diverses autres travées.)
M. le président. La parole est à M. Hussein Bourgi, pour la réplique.
M. Hussein Bourgi. Monsieur le Premier ministre, je vous remercie de m’avoir fait l’honneur de répondre à ma question ! (Rires.) C’est toujours avec beaucoup d’intérêt et de respect que je vous écoute, même lorsque vous me tournez le dos… (Rires redoublés.)
Les propos que vous venez de tenir sont les mêmes que ceux que vous avez prononcés hier à l’Assemblée nationale, et que j’ai écoutés avec tout autant d’intérêt.
Je regrette que vous n’ayez pas mesuré la gravité de la situation.
M. Jean Castex, Premier ministre. Si !
M. Hussein Bourgi. Je regrette que vous donniez le sentiment d’être déconnecté des réalités et dépassé par les événements. (Exclamations sur les travées du groupe RDPI.)
Je regrette aussi cette réalité qui s’affiche, au travers de votre réponse, devant les Françaises et les Français : le ministre de l’éducation nationale a rendu les armes devant le virus.
Je voudrais vous répondre sur les différents points que vous avez abordés.
Tout d’abord, vous nous avez indiqué que la première réponse à la pandémie était la vaccination. Or le groupe socialiste propose depuis plusieurs mois l’obligation vaccinale ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Ensuite, vous avez évoqué le dépistage. Pour développer celui-ci, je vous propose de mobiliser les forces de la sécurité civile afin qu’elles aillent dans les écoles épauler les équipes éducatives.
Enfin, le troisième élément de ma réplique sera une question : le Gouvernement lutte-t-il contre l’épidémie, ou pour la gestion de la diffusion du virus via l’immunité collective ? Le jour où vous aurez répondu à cette question, peut-être serez-vous davantage écoutés et compris par les parlementaires et par les Français ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – Mmes Cathy Apourceau-Poly et Christine Herzog applaudissent également.)
Brisson (Max), question d’actualité au gouvernement nº 2226G sur la gestion de la crise sanitaire dans les établissements scolaires, adressée au ministre de l’Éducation nationale, de la Jeunesse et des Sports lors de la séance publique du 12 janvier 2022.
M. le président. La parole est à M. Max Brisson, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Max Brisson. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports.
Monsieur le ministre, le dernier protocole sanitaire à l’école, le septième en dix-huit mois, édité le 2 janvier, appliqué le 3, modifié le 6, encadré par les préfets le 8 et assoupli le 10 par le Premier ministre, donne l’impression, selon les propos d’une directrice d’école, d’un mauvais jeu de société, dont les règles changent tous les deux jours. (Sourires ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.)
On avance lundi, on recule mercredi et, surtout, on n’y comprend plus rien !
Alors, ma question est très simple, monsieur le ministre : pourquoi tant d’impréparation ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports.
M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports. Monsieur le sénateur Brisson, le Premier ministre vous a déjà en partie répondu en expliquant la genèse du protocole. (Vives dénégations sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Bruno Retailleau mime la brasse coulée.)
M. Jean-François Husson. Il a péroré !
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. Ne vous inquiétez pas, cela ne m’empêchera pas de vous répondre si vous me laissez parler !
D’abord, il y a eu un conseil de défense le lundi qui a précédé la rentrée. Le lendemain, mardi, j’ai indiqué que les écoles seraient ouvertes le lundi suivant et que le principal changement concernerait le fait qu’il y aurait un ou plusieurs tests en plus de celui déjà existant. Les grandes lignes étaient donc annoncées.
Mme Corinne Féret. Ce n’est pas vrai !
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. Ensuite, comme l’a dit le Premier ministre, le vendredi soir, le Haut Conseil de la santé publique a rendu son avis. Il préconise toutes les mesures de détail permettant d’avoir une vision cohérente de la théorie, en population générale et à l’école. Tout cela est précis, complexe, doit être cohérent et a été travaillé par les hautes autorités.
Dans la journée du 1er janvier, nous avons transposé ces mesures pour en faire le protocole. Le ministre de la santé s’est ensuite exprimé pour donner la doctrine en population générale, puis moi-même, sur l’école.
Voilà le déroulé des événements.
Rappelons que, le même jour, j’ai diffusé l’ensemble des détails sur internet, contrairement à ce qu’on dit parfois, dans la « foire aux questions » que vous pouvez consulter à toute heure sur le site de l’éducation nationale, et quelques minutes plus tard, dans un quotidien, pour informer la population générale.
Plusieurs sénateurs du groupe SER. Un quotidien payant !
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. Nous aimerions que tout cela soit différent, c’est évident. Sur ce point comme sur d’autres, nous sommes contraints par des réalités. En l’occurrence, nous préférerions qu’il n’y ait pas le virus et que les choses soient moins complexes ! (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Ensuite, vous avez cherché à caricaturer les évolutions, qui sont le prix à payer pour être au plus près des réalités. Mais si on va à l’épure, les grands principes sont toujours les mêmes. Comme je le disais tout à l’heure, depuis fin novembre il y a un test à faire pour revenir à l’école. Ce qui a été ajouté au début du mois de janvier, ce sont deux autotests.
La seule transformation profonde, c’est celle que le Premier ministre a annoncée : le premier test devient un autotest, parce que nous avons écouté les acteurs de terrain et pris en compte les complexités éprouvées.
Soit on veut créer des polémiques, ce qui est assez facile au vu des difficultés posées par ce virus, soit on cherche l’unité nationale autour de notre école et on décrit les choses telles qu’elles sont. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Jean-François Husson. Ne le faites pas à nous !
Mme Sophie Primas. Ne parlez pas d’unité nationale !
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. Aujourd’hui, les trois autotests permettent d’aller dans le sens décrit par le Premier ministre, c’est-à-dire celui d’une politique qui permet à la fois d’avoir l’école ouverte et d’avoir une sécurité sanitaire. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à M. Max Brisson, pour la réplique.
M. Max Brisson. Monsieur le ministre, et si le fiasco généralisé de votre gestion de la crise sanitaire n’était pas plus large ?
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. C’est un dévoiement de la question !
M. Max Brisson. Déclassement permanent des résultats de nos élèves dans les enquêtes internationales ; recul des savoirs fondamentaux, du « lire, écrire, compter » ; sortie de route du nouveau baccalauréat, devenu un maquis dans lequel se perdent les élèves ; absurdité du calendrier du contrôle continu, qui soumet les lycéens au stress de l’examen perpétuel ; effondrement de l’enseignement des mathématiques au lycée, dont vous projetiez pourtant le redressement ; circulaires caporalisantes sous lesquelles croulent les établissements, alors qu’il y a cinq ans vous annonciez leur autonomie ; jeunes professeurs toujours aussi mal payés, mal formés, toujours aussi peu considérés et malmenés par un véritable bizutage institutionnel ; démissions en masse et moral au plus bas ! (M. Julien Bargeton proteste.)
L’attractivité du métier n’a jamais été aussi faible.
Ils vont vous le dire demain avec force et avec le soutien des parents et des maires ! (M. Jean-Claude Requier s’exclame.)
M. Julien Bargeton. Pas tous !
M. Max Brisson. Et si, parmi les causes de tout cela, une vous incombait, et à vous seul ?
Celle d’une gestion solitaire, rejetant tout dialogue, agissant sans concertation et faisant finalement apparaître le « blanquerisme » pour ce qu’il est : un autoritarisme esseulé, expliquant largement « l’étrange défaite » dans laquelle sombre ce quinquennat en matière d’éducation ! (Bravo ! et vifs applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Applaudissements sur des travées du groupe SER.)
Bouloux (Yves), question d’actualité au gouvernement nº 2233G sur le protocole sanitaire dans les écoles, adressée au ministre de l’Éducation nationale, de la Jeunesse et des Sports lors de la séance publique du 12 janvier 2022.
M. le président. La parole est à M. Yves Bouloux, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Yves Bouloux. Monsieur le ministre, un nouveau protocole sanitaire à l’école a été annoncé ; c’est le troisième en moins d’une semaine.
Il y a un an, personne n’était vacciné et les enfants n’étaient pas testés ; aujourd’hui, tout le monde est vacciné, les enfants sont testés.
Les classes ont été fermées pour un cas positif, puis pour trois cas et maintenant on ne les ferme plus.
On isolait les familles ; c’est fini.
Les autotests n’étaient pas fiables ; ils le sont devenus.
Le masque évitait d’être cas contact ; désormais, s’il y a un cas positif dans une classe élémentaire, on teste toute la classe.
Bref, on ne comprend plus rien !
Le nouveau protocole va supprimer l’attente devant les laboratoires, mais les familles devront faire passer trois tests nasopharyngés, à raison d’un tous les deux jours, à leur enfant, et ce dès l’âge de 3 ans. Pour une famille de trois enfants, cela représente, sur une semaine, neuf tests. Est-ce réaliste ?
En outre, le protocole est le même, quel que soit le statut vaccinal des enfants de moins de 12 ans, dont la vaccination ne va d’ailleurs pas de soi.
Vous avez souhaité laisser les écoles ouvertes pour le bien-être des enfants, monsieur le ministre, et c’est très bien. Mais, depuis la rentrée, les enfants vivent dans l’angoisse, celle de la douleur des tests – une petite torture – et celle de l’incertitude d’être accueilli à l’école. Vous avez annoncé un nouveau protocole, mais il n’est toujours pas publié !
Aussi, monsieur le ministre, quand cesserons-nous de naviguer à vue, avec des protocoles inadaptés ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports.
M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports. Monsieur le sénateur, vous venez de décrire parfaitement certains inconvénients liés à l’existence du virus…
Nous aimerions tous que ces inconvénients n’existent pas, mais, s’il est assez facile de les décrire, il est évidemment plus difficile de les gérer et de « piloter à vue ». Je reprends votre expression, car, oui, en effet, le virus oblige la France, comme d’autres pays, à piloter à vue, c’est-à-dire à regarder ce qui se passe concrètement et à définir une réponse adaptée.
Les évolutions que vous avez décrites ne sont jamais que l’illustration de l’agilité qu’il a fallu avoir. Cette agilité de tout le corps social et, pour ce qui concerne l’éducation nationale, de tout le personnel de mon ministère et des collectivités locales, auquel je rends de nouveau hommage, nous a permis d’être le pays ayant le plus ouvert ses écoles l’année dernière et cette année encore.
Bien évidemment, c’est difficile. Bien sûr, il y a des souffrances au quotidien. Bien entendu, les tests nasopharyngés pour les enfants ne nous plaisent pas ; ils ne plaisent pas plus à moi qu’à vous et j’aimerais bien que cela n’existe pas, mais nous nous référons aux autorités de santé, nous étudions ce qui se passe dans le monde et, croyez-moi, nous n’avons pas à rougir de notre bilan.
Ce qui me frappe au contraire, c’est cette volonté de toujours relativiser ce bilan, alors qu’il est internationalement reconnu que la France est le pays ayant réussi cette politique de l’école ouverte, grâce à nous tous, collectivement, grâce au pays entier. Pourquoi ne sommes-nous pas capables, toutes travées confondues, de développer une fierté nationale autour de ce bilan et de continuer dans cette phase, qui sera, je l’espère, la dernière ?
Nous verrons bien quelle est l’évolution du virus, mais il y a aussi des scénarios optimistes, que nous appelons évidemment de nos vœux.
Donc, oui, le protocole sanitaire a évolué, peut-être évoluera-t-il encore et peut-être cela suscitera-t-il de nouvelles critiques, mais nous le ferons avec pragmatisme, avec le désir de bien faire. Peut-être les choses ne seront-elles pas toujours parfaites, c’est évident.
Toutefois, n’oublions pas que nous sommes en situation de crise, donc ne faisons pas des critiques ordinaires dans un moment extraordinaire. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – Mme Colette Mélot applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Yves Bouloux, pour la réplique.
M. Yves Bouloux. Monsieur le ministre, je vous demande instamment, pour les enfants de France, de cesser cette politique de Gribouille. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Olivier Henno applaudit également.)
Mise à jour du 13 janvier 2022
Questions archivées [Journal officiel de la République française, édition « Débats parlementaires – Sénat », nº 6 S (C.R.), 13 janvier 2022, pp. 318…332] au format PDF (3.42 Mo, 10 p.).