Question sur la mise en place d’un droit opposable à la garde de jeunes enfants

Assemblée nationale

Julien-Laferrière (Hubert), question orale nº 1598 au secrétaire d’État chargé de l’Enfance et des Familles sur la mise en place d’un droit opposable à la garde de jeunes enfants [Journal officiel de la République française, édition « Débats parlementaires – Assemblée nationale », nº 48 A.N. (Q), 30 novembre 2021, p. 6502].

Hubert Julien-Laferrière (© D.R.)

Hubert Julien-Laferrière (© D.R.)

M. Hubert Julien-Laferrière interroge M. le secrétaire d’État auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargé de l’enfance et des familles sur la création d’un droit opposable à la garde des jeunes enfants. Au mois d’octobre 2021, lors de la Conférence nationale des familles, il a été question de l’opportunité à créer un droit opposable à la garde des jeunes enfants. Cette proposition notamment issue du rapport Heydemann-Damon relance le débat d’une meilleure prise en charge des jeunes enfants avant l’entrée en maternelle. On ne peut que s’associer à cette préoccupation qui touche les habitants des circonscriptions. Cette problématique qui laisse souvent les jeunes parents extrêmement stressés à un moment de leur vie où il devrait [sic] être dans le plaisir et l’attention, pose des questions cruciales sur la manière dont on envisage la société. Premièrement, il s’agit d’un sujet extrêmement important s’agissant de l’accès à l’emploi des femmes et de leurs carrières professionnelles. L’enjeu de la garde des enfants a en effet, on le sait depuis fort longtemps, un impact très fort concernant l’égalité professionnelle, salariale et les droits à la retraite. Deuxièmement, on est devant un enjeu majeur dans la lutte contre les inégalités sociales depuis le plus jeune âge. Des modes de garde d’enfants accessibles et de qualité rentrent dans le cadre des actions visant à l’épanouissement et la réussite de chaque enfant. Bien sûr, la mise en place de ce droit opposable à la garde d’enfant devra se faire en concertation avec les collectivités locales afin de ne pas les mettre en difficulté alors qu’elles fournissent déjà tant d’efforts année après année. Ainsi, il lui demande de lui indiquer un calendrier de l’exécutif sur cette problématique et un horizon d’attente susceptible de rassurer les futurs parents des circonscriptions.

Réponse du secrétariat d’État auprès du ministre des Solidarités et de la Santé, chargé de l’Enfance et des Familles, lors de la séance publique du 7 décembre 2021.

M. le président. La parole est à M. Hubert Julien-Laferrière, pour exposer sa question, nº 1598, relative au droit opposable à la garde des jeunes enfants.

M. Hubert Julien-Laferrière. Au mois d’octobre dernier, lors de la Conférence nationale des familles, il a été question de l’opportunité de créer un droit opposable à la garde des jeunes enfants. Cette proposition, issue notamment du rapport Heydemann-Damon, relance le débat relatif à une meilleure prise en charge des jeunes enfants, avant l’entrée en maternelle. Je souhaite m’y associer, parce que cette préoccupation touche particulièrement les habitants de ma circonscription et, plus largement, ceux de toute la région lyonnaise et de nombreuses autres régions. Ce problème stresse les jeunes parents à un moment de leur vie où le plaisir et l’attention devraient prévaloir. Il pose des questions cruciales sur la manière dont nous envisageons la société, tout simplement.

Le sujet est essentiel à plusieurs titres. Pour l’accès à l’emploi des femmes et pour leur carrière professionnelle, d’abord : nous le savons depuis fort longtemps, le mode de garde a un très fort impact sur l’égalité professionnelle et salariale, ainsi que sur la retraite. La lutte contre les inégalités sociales depuis le plus jeune âge, ensuite : garantir une offre de modes de garde accessibles et de qualité entre dans le cadre des actions visant à l’épanouissement et à la réussite de chaque enfant.

Bien sûr, l’instauration d’un droit opposable à la garde d’enfant devrait se faire en concertation avec les collectivités locales, afin de ne pas les mettre en difficulté alors qu’elles fournissent déjà tant d’efforts, année après année. Elles fournissent d’autant plus d’efforts que nos concitoyens font des enfants, ce qui est évidemment une bonne nouvelle. Que prévoit le Gouvernement ? L’exécutif a-t-il défini un calendrier, un horizon d’attente susceptible de rassurer les futurs parents de ma circonscription, de la région lyonnaise et de l’ensemble des territoires ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État chargé de l’enfance et des familles.

Adrien Taquet (© Gérald Garitan)

Adrien Taquet (© Gérald Garitan)

M. Adrien Taquet, secrétaire d’État chargé de l’enfance et des familles. Vous soulignez à juste titre que nous peinons depuis plusieurs années – ça ne date pas d’aujourd’hui – à proposer à tous les parents qui le souhaitent une solution d’accueil pour les jeunes enfants, quelle qu’en soit la forme ou la modalité : une place en crèche, une place chez une assistante maternelle, une garde d’enfant à domicile ou encore une place en microcrèche – ces structures se développent – ou dans une maison d’assistantes maternelles. L’offre se diversifie, mais ne permet pas d’offrir à chaque parent le droit de disposer d’un mode d’accueil pour son enfant, à un coût adapté à ses moyens et qui serait identique – je vais y revenir.

Par conséquent, au-delà des démarches qui sont parfois complexes dès avant la naissance – j’ai coutume de dire qu’on s’interroge sur le mode d’accueil de son enfant avant même d’avoir choisi son prénom, ce qui est une réalité pour de nombreux Français –, certains parents se retrouvent contraints de réduire ou d’interrompre leur activité professionnelle, faute d’avoir trouvé une solution.

C’est évidemment une situation insatisfaisante au regard de la politique de l’emploi, parce que des personnes cessent leur activité, mais aussi au regard de l’égalité entre les femmes et les hommes, parce que ce sont souvent les femmes qui cessent leur activité pour garder l’enfant, et également au regard de la lutte contre les inégalités de destin, parce que les systèmes existants, outre qu’ils ne permettent pas d’offrir un mode d’accueil à chaque enfant, sont assez inégalitaires : ce sont essentiellement des enfants de cadres qui bénéficient des places en mode collectif. Par ailleurs, disposer d’une assistante maternelle représente un certain coût que seules les personnes les plus socialement favorisées peuvent se permettre.

Nous nous sommes attachés et nous nous attachons encore à corriger, progressivement, certaines des limites les plus significatives du système d’accueil, pour tendre vers ce que je me permets d’appeler un service public de la petite enfance, qui doit être notre horizon. Cela passe notamment par l’harmonisation du système, qui est particulièrement éclaté, complexe et illisible, du point de vue des parents. Nous sommes en train d’unifier et d’harmoniser le secteur autour de la notion de qualité d’accueil. La charte nationale de la qualité d’accueil, qui date de 2016, a été intégrée à la loi et s’applique désormais à l’ensemble des modes d’accueil, quels qu’ils soient – individuel ou collectif. J’ai installé la semaine dernière le comité de filière de la petite enfance, qui réunit l’ensemble des acteurs, des financeurs, des syndicats, des organisations et des associations du secteur, pour faire avancer celui-ci dans le même sens. Nous avons également créé un service d’information aux familles, qui leur permet de connaître l’offre en matière d’assistantes maternelles autour de leur domicile.

Le travail doit encore être poursuivi, notamment en matière d’égalité financière d’accès à un mode d’accueil, d’organisation et de partage des responsabilités dans le champ de la petite enfance. Vous évoquiez l’association des collectivités locales ; la question de la compétence devra être posée, mais je n’ai pas la réponse aujourd’hui.

Je voudrais faire une annonce importante pour conclure : à la suite de l’une des propositions phares du rapport Heydemann-Damon, que j’ai commandé et qui m’a été remis dans le cadre de la Conférence nationale des familles, j’ai proposé au Premier ministre – qui a accepté – que le Conseil économique, social et environnemental (CESE) soit saisi pour identifier les mesures nécessaires à la création d’un service public de la petite enfance, défini comme le droit garanti pour chaque parent qui le souhaite à une solution d’accueil du jeune enfant à un coût similaire, quel que soit le mode d’accueil. Il est attendu que le CESE rende ses propositions avant la fin du mois de mars 2022. Voilà la suite, monsieur le député, que nous donnons à votre question.

Mise à jour du 8 décembre 2021

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