La Cour européenne des droits de l’homme a validé aujourd’hui une décision des autorités islandaises en matière de gestation pour autrui, en estimant que le refus de reconnaître un couple homosexuel comme parents d’un enfant né d’une gestation pour autrui ne constitue pas une violation de la vie privée et familiale.
En l’espèce, deux femmes islandaises mariées avaient eu recours en 2012 à une maternité de substitution en Californie – un des États les plus libéraux des États-Unis en matière de gestation pour autrui : peuvent y avoir accès des couples hétérosexuels et homosexuels ainsi que des personnes seules, les embryons peuvent être sélectionnés en fonction du sexe dans plusieurs cliniques et des pre-birth orders permettent la reconnaissance des « parents » avant même la naissance de l’enfant. Pour des raisons qui ne sont pas données dans l’arrêt, les deux femmes étaient revenues en Islande avec un petit garçon né en février 2013, qui n’avait de lien génétique avec aucune d’entre elles (§ 5).
La gestation pour autrui étant interdite en Islande, où, comme en France, est reconnue comme mère la femme qui accouche, les deux femmes s’y étaient vues refuser l’inscription de l’enfant au fichier national des Islandais nés à l’étranger ainsi que leur reconnaissance en tant que « parents ». N’ayant pas de responsables légaux et que la nationalité américaine, l’enfant avait d’abord été considéré comme un mineur non accompagné, à l’instar d’un migrant (§§ 6-7). Les autorités islandaises lui avaient désigné un tuteur, puis avaient proposé de le placer en accueil familial auprès des deux femmes (§ 8), avant de finir par lui accorder la nationalité islandaise (§ 11). Les deux femmes avaient entre-temps engagé une procédure d’adoption, devenue caduque avec leur divorce en mai 2015. Le placement de l’enfant avait alors été fixé chez chacune des deux femmes, en alternance annuelle (§ 12).
Ayant échoué à faire établir un lien de filiation avec l’enfant devant les juridictions nationales, les deux femmes avaient finalement introduit une requête devant la Cour européenne des droits de l’homme en septembre 2017, en invoquant les articles 8 (droit au respect de la vie privée et familiale) et 14 (interdiction de la discrimination) de la Convention européenne des droits de l’homme.
Dans son arrêt rendu aujourd’hui, la Cour européenne des droits de l’homme a considéré que les liens existant entre l’enfant et les deux femmes constituaient bien une « vie familiale », nonobstant l’absence de lien biologique entre eux, mais que les décisions des autorités islandaises ne la violaient pas pour autant car elles avaient envisagé d’autres modalités pour la maintenir, comme l’adoption ou le placement. Rien dans la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales n’impose aux États membres de reconnaitre un lien de filiation entre un enfant né par gestation pour autrui et des « parents d’intention », et l’Islande a agi dans les limites de sa marge d’appréciation (§ 75).
L’arrêt a été publié en anglais, seul un communiqué de presse est disponible en français.
- Références
- Cour européenne des droits de l’homme
Troisième section
18 mai 2021
Affaire Valdís Fjölnisdóttir and Others c. Iceland (requête nº 71552/17)
Affaire communiquée archivée au format PDF (148 Ko, 3 p.).
Arrêt archivé au format PDF (313 Ko, 29 p.).
Communiqué de presse (anglais) archivé au format PDF (134 Ko, 3 p.).
Communiqué de presse (français) archivé au format PDF (143 Ko, 4 p.).
Note d’information archivée au format PDF (139 Ko, 3 p.).
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