Le congé de paternité et d’accueil de l’enfant passera au premier juillet prochain de quatorze à vingt-huit jours, dont sept rendus obligatoires à la naissance de l’enfant. Le reste du congé pourra être fractionné en deux périodes d’au moins cinq jours à prendre avant les six mois de l’enfant. Cet allongement figurait parmi les nombreuses mesures proposées par la Commission des 1 000 premiers jours dans son rapport publié en septembre dernier, Les 1 000 premiers jours. Là où tout commence. Lancée par le Président de la République en septembre 2019 et présidée par le neuropsychiatre Boris Cyrulnik, cette commission de dix-huit experts spécialistes de la petite enfance s’était appuyée sur de nombreuses données scientifiques pour souligner l’importance des mille premiers jours pour le développement de l’enfant. Les auteurs du rapport expliquaient aussi que la présence précoce du père auprès de l’enfant est importante (p. 100) :
« Le congé de paternité renforce la relation père-enfant. Un congé réservé au père de quelques semaines seulement entraîne déjà une plus grande participation du père aux soins et à l’éveil de son enfant. Une étude allemande montre que les pères qui bénéficient d’un congé de huit semaines renforcent davantage leur relation avec leur enfant à long terme, ce lien plus construit étant jugé très précieux par les pères. Une autre étude récente a montré que l’implication du père dans l’éducation et les activités de leur petit enfant, ainsi que sa sensibilité pendant l’interaction au moment du jeu, sont déterminées par des facteurs tels que le nombre réduit d’heures passées au travail au profit de plus de disponibilité auprès de l’enfant. »
C’est l’article 73 de la loi nº 2020-1576 du 14 décembre 2020 de financement de la sécurité sociale pour 2021 qui a porté la durée du congé de paternité et d’accueil de l’enfant dont bénéficient les salariés (qu’ils relèvent du régime agricole ou du régime général de la sécurité sociale), ainsi que les non-salariés agricoles et les travailleurs indépendants, de onze à vingt-cinq jours, et rendu une partie de celui-ci obligatoire pour les salariés. Pris en application de ce texte, le décret nº 2021-574 de ce 10 mai 2021, relatif à l’allongement et à l’obligation de prise d’une partie du congé de paternité et d’accueil de l’enfant, précise les modalités d’indemnisation et de prise de ce nouveau congé. Il permet ainsi l’entrée en vigueur du nouveau dispositif au titre des enfants nés à compter du 1er juillet 2021, ainsi qu’à ceux dont la naissance était supposée intervenir à compter de cette date, mais nés avant. Les nouvelles règles s’appliqueront aussi pour les adoptions à partir du 1er juillet 2021.
Le décret fixe les délais de prévenance de l’employeur dont le salarié bénéficie du congé de paternité et d’accueil de l’enfant, précise les possibilités de fractionnement de la prise de la partie non obligatoire du congé et fixe à six mois le délai de prise de ce congé suite à la naissance de l’enfant. Il fixe également les durées minimales et maximales de ce congé pour les travailleurs indépendants et les personnes non-salariées des professions agricoles, soit respectivement sept et vingt-cinq ou trente-deux jours. Il procède également à quelques adaptations rédactionnelles de la partie réglementaire des codes de la sécurité sociale et du travail afin de tenir compte des nouvelles modalités du congé de paternité et d’accueil de l’enfant définies par la loi nº 2020-1576 du 14 décembre 2020 de financement de la sécurité sociale pour 2021, notamment le remplacement de la notion de « personne vivant maritalement avec la mère » par celle de concubin.
Les articles D1225-8 et D1225-8-1 du code du travail, D331-3, D331-5, D331-6 et D623-2 du code de la sécurité sociale, ainsi que D732-27 et D732-29 du code rural et de la pêche maritime sont modifiés. Introduits par le décret nº 2020-1233 du 8 octobre 2020, les articles D331-6 et D331-7 du code de la sécurité sociale deviennent en outre les articles D331-7 et D331-8 du même code, afin de supprimer la coexistence de deux articles D331-6 dans le code de la sécurité sociale.
Modalités de prise du congé pour les salariés
En application de l’article L1225-35 du code du travail, dans sa version issue de la loi nº 2020-1576 du 14 décembre 2020 de financement de la sécurité sociale pour 2021, la durée du congé de paternité et d’accueil de l’enfant dont bénéficie le salarié qui peut être le père de l’enfant et, le cas échéant, le concubin ou conjoint de la mère, ou la personne liée à elle par un PACS, est portée à vingt-cinq jours calendaires – trente-deux en cas de naissances multiples – et ce congé est découpé en deux périodes obéissant à des régimes distincts :
- Le congé de paternité et d’accueil de l’enfant se compose à compter du 1er juillet 2021 d’une première période obligatoire de quatre jours calendaires consécutifs faisant immédiatement suite aux trois jours du congé de naissance (articles L1225-35, alinéa 3, et L1225-35-1 du code du travail). Il est interdit à l’employeur d’employer son salarié pendant cette période, mais le salarié peut demander à renoncer à ce droit.
Lorsque l’état de santé de l’enfant nécessite son hospitalisation immédiate après la naissance dans une unité de soins spécialisés, cette période initiale de quatre jours est par dérogation prolongée de plein droit pendant la période d’hospitalisation à la demande du salarié (article L1225-35, alinéa 5, du code du travail), la durée maximale de cette prolongation étant fixée à trente jours consécutifs (article D1225-8-1 modifié du code du travail). - Outre la première période incompressible de quatre jours, le congé de paternité et d’accueil de l’enfant est composé d’une seconde période non obligatoire de vingt et un jours calendaires, portée à vingt-huit jours en cas de naissances multiples (article L1225-35, alinéa 3, du code du travail), pouvant être fractionné en deux périodes d’une durée minimale de cinq jours chacune (article D1225-8, alinéa 3 modifié, du code du travail). Cette seconde partie du congé doit être prise dans les six mois suivant la naissance de l’enfant ou l’arrivée de l’enfant par adoption. Elle peut toutefois être reportée au-delà de ce délai en cas de décès de la mère ou d’hospitalisation de l’enfant : elle doit alors être prise dans les six mois suivant soit la fin de l’hospitalisation, soit la fin de la suspension de son contrat de travail par le père pour la durée restant à courir entre la date du décès et la fin de la période d’indemnisation au titre du congé maternité dont aurait bénéficié la mère (article D1225-8, alinéa 1 modifié, du code du travail).
Délai de prévenance de l’employeur
Aux termes de l’article D1225-8, alinéas 2 et 4 modifiés, du code du travail, le salarié doit informer son employeur :
- de la date prévisionnelle de l’accouchement au moins un mois avant celle-ci ;
- des dates de prise et des durées de la ou des périodes visées précédemment au moins un mois avant le début de chacune des périodes.
Sans préjudice de ces dispositions, le salarié doit en outre informer sans délai son employeur en cas de naissance de l’enfant avant la date prévisionnelle d’accouchement et lorsqu’il souhaite débuter la ou les périodes de congés au cours du mois suivant la naissance (article D1225-8, alinéa 5 modifié, du code du travail).
Règles d’indemnisation du congé
Un rapport de l’Inspection générale des affaires sociales publié en juin 2018 avait souligné les inégalités de prise de ce congé en fonction du statut de l’employé : le taux de recours est de 80 % pour les salariés du privé en contrat à durée indéterminée contre 48 % pour les détenteurs d’un contrat à durée déterminée. Le système d’indemnisation du congé est inchangé, l’employeur ayant les trois premiers jours à sa charge. La dépense supplémentaire est estimée à 390 M€ en année pleine pour la branche Famille de la Sécurité sociale. Le code de la sécurité sociale est adapté pour permettre le versement d’indemnités journalières aux salariés et travailleurs indépendants pendant le congé paternité et d’accueil de l’enfant jusqu’aux six mois suivants la naissance de l’enfant.
Non-salariés agricoles
Les exploitants agricoles ont droit à l’indemnisation du congé de paternité sous certaines conditions. Ils bénéficient ainsi, sur leur demande, d’une allocation de remplacement pendant vingt-cinq jours – trente-deux jours en cas de naissances multiples – fractionnables en trois périodes d’au moins cinq jours chacune dès lors (articles L732-12-1, alinéa 1, et D732-27, 4º modifié et 5º, du code rural et de la pêche maritime) :
- qu’ils sont aides familiaux, associés d’exploitation, chefs d’exploitation et d’entreprise agricole, collaborateurs ou membres non-salariés de toute société lorsqu’ils consacrent leur activité pour le compte de la société à une entreprise ou exploitation agricole ;
- qu’ils se font remplacer dans leurs travaux par du personnel salarié ;
- qu’ils cessent tout travail dans l’entreprise ou sur l’exploitation agricole pendant une durée minimale de sept jours suivant immédiatement la naissance de l’enfant.
Les périodes de cessation d’activité donnant lieu au versement de l’allocation doivent être prises dans les six mois suivant la naissance de l’enfant (article D732-27 4º modifié du code rural et de la pêche maritime).
Pour pouvoir bénéficier de l’allocation de remplacement, les assurés doivent en outre justifier à la date de naissance de l’enfant d’une durée minimale de dix mois d’affiliation au régime obligatoire d’assurance maladie, invalidité, maternité des personnes non salariées des professions agricoles, participer de manière constante – à temps partiel ou à temps plein – aux travaux de l’entreprise ou de l’exploitation agricole et adresser à leur caisse de Mutualité sociale agricole les pièces justificatives nécessaires (article D732-27 1º, 2º et 3º du code rural et de la pêche maritime).
La demande de congé de paternité doit être adressée à la caisse de Mutualité sociale agricole au moins un mois avant la date de naissance de l’enfant. L’assuré doit y indiquer les dates de la ou des périodes de bénéfice de l’allocation de remplacement. En cas de naissance de l’enfant avant la date prévisionnelle d’accouchement et lorsque l’assuré souhaite débuter la ou les périodes du bénéfice de l’allocation au cours du mois suivant la naissance, il en informe sans délai sa caisse de Mutualité sociale agricole (article D732-29, alinéa 2 nouveau, du code rural et de la pêche maritime).
Salariés
Lorsque le droit à congé de paternité ou d’accueil de l’enfant est exercé, il ouvre droit, pour sa durée et dans la limite maximale de vingt-cinq jours – trente-deux en cas de naissances multiples – à des indemnités journalières de la Sécurité sociale dans les mêmes conditions d’ouverture de droit, de liquidation et de service qu’en cas de congé maternité, sous réserve pour l’assuré de cesser toute activité salariée ou assimilée pendant cette période et au minimum pour la première période de quatre jours du congé paternité (article L331-8, alinéas 1 et 2, du code de la sécurité sociale, modifiés par la loi nº 2020-1576 du 14 décembre 2020). Ces indemnités sont versées pendant la ou les périodes de congés prises selon les modalités visées précédemment (article D331-3 modifié du code de la sécurité sociale). Sauf dispositions conventionnelles contraires, il n’y a pas de complément employeur à verser, mais la subrogation est possible s’il existe.
Travailleurs indépendants
Sous réserve de cesser leur activité professionnelle pendant une durée minimale de sept jours pris immédiatement à compter de la naissance de l’enfant, les travailleurs indépendants bénéficient, sur leur demande, d’indemnités journalières du même montant que celles versées en cas de maternité (articles L623-1 II et D623-2, alinéa 3 modifié, du code de la sécurité sociale). Les indemnités journalières leur sont versées pendant une durée maximale de vingt-cinq jours – trente-deux jours en cas de naissances multiples – fractionnable en trois périodes d’au moins cinq jours chacune, étant précisé que les périodes de cessation d’activité donnant lieu au versement de l’allocation doivent être prises dans les six mois suivant la naissance de l’enfant (article D623-2, alinéa 3 modifié, du code de la sécurité sociale).
Pour mémoire, le montant de l’indemnité journalière forfaitaire versée en cas de maternité est égal à 1/730e du plafond annuel de la sécurité sociale (41 136 euros au 1er janvier 2021), soit 56,35 euros.
Mise à jour du 12 mai 2021
Décret archivé (Journal officiel de la République française, nº 110, 12 mai 2021, texte nº 23) au format PDF (146 Ko, 3 p.).