Lors de son audience publique de ce 16 mars 2017, la cour d’appel de Versailles a rendu un arrêt particulièrement intéressant, tant par la façon dont une mère malveillante a été remise à sa place que par la motivation de la décision favorable à la résidence alternée.
Par ordonnance de non-conciliation du 8 mars 2016, un juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Versailles avait notamment fixé la résidence de deux enfants au domicile de leur mère, accordé à leur père un « droit de visite et d’hébergement » selon les modalités courantes (deux weekends par mois et la moitié des vacances scolaires), et classiquement « condamné » ce père à payer une contribution mensuelle de 600 euros pour l’entretien et l’éducation des enfants. Le 30 mars 2016, le père avait formé un appel de portée générale contre cette décision inique, demandant notamment que les enfants soient auditionnés par la cour, à titre principal que leur résidence soit fixée à son domicile, à titre subsidiaire que leur résidence soit fixée par alternance aux domiciles des deux parents.
Bien que réputée peu favorable à l’égard des pères, la cour d’appel de Versailles a décidé la mise en place de la résidence alternée des enfants. « Considérant […] que les deux parents [présentaient] des capacités éducatives leur permettant de s’occuper au quotidien des enfants », elle a rejeté les critiques de la mère qui prétendait que l’investissement du père dans l’éducation des enfants était très récent. Peu importe pour la cour, puisque « la séparation des parents justifie une nouvelle répartition des rôles […] auprès des enfants ». Il est même reproché à la mère de ne pas être suffisamment « rigoureuse avec les deux enfants sur un plan scolaire » (« des devoirs ne sont pas faits, […] des contrôles ne sont pas signés et […] un contrôle a été signé par un tiers ») et de légitimer la violation des règles en ayant emmené les enfants dans un parc d’attraction pendant un jour de classe.
La cour d’appel de Versailles a également procédé à l’audition des deux enfants, en dépit de l’opposition de la mère qui prétendait que cette demande du père était « irresponsable [car] les enfants se trouveraient placés face à un évident conflit de loyauté ». Or :
« Ce conflit ne s’est pas révélé lors de l’audition des enfants qui ont été particulièrement claires sur leurs conditions de vie au sein de chaque foyer, leurs vœux et les motifs qui les justifiaient ;
« […] ainsi, sans dénigrer leur mère, elles ont toutes les deux exprimé le souhait de modifier leurs conditions d’accueil actuelles pour donner plus de place à leur père, auquel elles sont attachées et qui est attentif à leurs besoins ».
Les magistrats ont reconnu que la complémentarité des parents était nécessaire au bien-être des enfants :
« Chloée et Mayline, pour se construire harmonieusement malgré la séparation de leurs parents, doivent pouvoir entretenir avec chacun d’eux des relations régulières et équilibrées, de nature à leur permettre de bénéficier des apports de nature différente mais complémentaires que chacun peut leur procurer, la mère dans le champ de la protection émotive, le père de la loi structurante. »
Ayant rappelé que « le droit de l’enfant d’entretenir des liens avec ses deux parents est protégé par l’article 9 de la Convention internationale des droits de l’enfant du 20 novembre 1989 ratifiée par la France », les magistrats ont pris acte de la proximité des deux domiciles, de la similitude des conditions matérielles d’accueil et de la communication entre les parents, pour conclure que :
« L’alternance est un système simple, prévisible, qui permet aux enfants comme aux parents de se projeter dans l’avenir et de construire des projets fiables ; […] elle est de nature à réduire les conflits liés à l’exercice d’un droit de visite et d’hébergement et aux modifications qu’un tel système engendre ; […] elle permet aux enfants de prendre appui de façon équilibrée sur chacun des parents et de bénéficier plus équitablement de leurs apports respectifs. »
Enfin, compte tenu de l’équivalence des revenus des parents, la cour d’appel de Versailles a supprimé la pension alimentaire payée par le père.
- Références
- Cour d’appel de Versailles
2e chambre, 1re section
Audience publique du 16 mars 2017
Nº de RG : 16/02336
Arrêt archivé au format PDF (56 Ko, 9 p.).
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