Le tribunal administratif de Lille a rappelé aujourd’hui que le partage du supplément familial de traitement entre parents divorcés ou séparés est de droit en cas de résidence alternée.
En l’espèce, la requérante est une enseignante, divorcée et mère de trois enfants dont la résidence avait été fixée en alternance aux domiciles de leurs parents par un jugement de divorce prononcé en avril 2014. Allocataire unique du supplément familial de traitement, le père en avait d’abord reversé régulièrement la moitié à son ex-épouse, puis il avait cessé totalement ses versements à la suite d’un différend entre les ex-époux. Ayant sollicité les services du rectorat de Lille en août 2015 afin que lui soit versée directement la moitié du supplément familial de traitement, la mère avait essuyé un refus en mai 2016 et avait saisi le tribunal administratif de Lille le mois suivant pour faire annuler cette décision.
Justice lui a été rendue aujourd’hui. Ayant rappelé les dispositions de l’article 20 de la loi nº 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, de l’article 10 du décret nº 85-1148 du 24 octobre 1985 modifié relatif à la rémunération des personnels civils et militaires de l’État, des personnels des collectivités territoriales et des personnels des établissements publics d’hospitalisation, ainsi que celles des articles L512-3, L513-1 et L521-2 du code de la sécurité sociale, le tribunal administratif de Lille a rappelé que :
« 7. Il résulte de la combinaison des dispositions citées ci-dessus que si les parents bénéficient d’un droit de garde ou de résidence alternée sur leurs enfants qui est mis en œuvre de manière effective et équivalente, l’un et l’autre des parents doivent être considérés comme assurant la charge de leurs enfants au sens de l’article L. 513-1 précité du code de la sécurité sociale. En cas de désaccord sur la répartition de la charge des enfants pour le calcul du supplément familial de traitement, celle-ci doit être partagée pour moitié entre les deux parents, en application de l’article L. 521-2 de ce code. »
La requérante ayant établi par de nombreuses pièces qu’elle assumait alternativement avec son ex-mari la charge de leurs enfants, le tribunal administratif de Lille a ainsi jugé :
« 8. […] Dans ces conditions, le droit à la moitié du supplément familial de traitement pour trois enfants lui était ouvert. Par suite, le recteur de l’académie de Lille a commis une erreur de droit en rejetant la demande de [la requérante] au motif qu’il était dans l’impossibilité d’y faire droit “sans jugement du tribunal administratif le précisant explicitement”, alors qu’il lui appartenait de faire application des dispositions précitées du décret du 24 octobre 1985 et du code de la sécurité sociale. »
L’entêtement de l’administration à refuser l’application du droit en ce domaine est à la limite du compréhensible. Rappelons que le Conseil d’État a reconnu dès 2001 que « le versement du supplément familial de traitement doit être partagé entre les ex-époux au prorata des enfants dont ils ont la charge effective et permanente » (décision nº 215181 du 24 octobre 2001). Le Conseil d’État a également précisé que les modalités de versement des allocations familiales prévues par l’article L521-2 du code de la sécurité sociale en cas de résidence alternée sont applicables pour l’attribution du supplément familial de traitement en vertu de l’article 10 du décret nº 85-1148 du 24 octobre 1985 (décision nº 371405 du 30 juillet 2014).
Rappelons également que lorsque des parents divorcés ou séparés ayant la qualité d’agents publics ou de fonctionnaires et exerçant conjointement l’autorité parentale mettent en œuvre la résidence alternée de leur(s) enfant(s), ils doivent le justifier auprès de l’administration afin qu’icelle procède au partage du versement du supplément familial de traitement (il en va de même pour le revenu de solidarité active : cf. décision nº 398911 du Conseil d’État en date du 21 juillet 2017).
- Références
- Tribunal administratif de Lille
6e chambre
Lecture du 6 février 2019
Décision nº 1604267
Décision archivée au format PDF (1.31 Mo, 5 p.).
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