Question sur les conséquences du veuvage précoce pour les familles

Journal officiel de la République française, édition « Débats parlementaires – Sénat », nº 22 S (Q), 2 juin 2022

Vaugrenard (Yannick), question écrite nº 14516 au ministre de l’Économie et des Finances sur les conséquences du veuvage précoce pour les familles [Journal officiel de la République française, édition « Débats parlementaires – Sénat », nº 9 S (Q), 27 février 2020, p. 950].

Yannick Vaugrenard (© Clément Bucco-Lechat)

Yannick Vaugrenard (© Clément Bucco-Lechat)

M. Yannick Vaugrenard attire l’attention de M. le ministre de l’économie et des finances sur les conséquences du veuvage précoce pour les familles.

Il faut en effet prendre en compte les difficultés rencontrées par les personnes qui deviennent veufs ou veuves de manière précoce, ainsi que celles de leurs enfants orphelins.

D’un point de vue psychologique, il semble en effet que prévoir un soutien dans ce domaine soit une véritable nécessité pour ces familles.

D’un point de vue financier, afin de pallier les graves difficultés qui peuvent toucher ces familles, il s’interroge sur l’opportunité de réintroduire le dispositif dit de la « demi-part des veuves », qui permettait à un époux survivant d’éviter une hausse brutale de son impôt sur le revenu lors de la perte de la part fiscale du conjoint disparu. Il disposait donc d’une part et demie, sous réserve que le couple ait eu au moins un enfant. Ce dispositif a été supprimé en 2014.

Dans le même objectif, il conviendrait de s’interroger sur la possibilité d’accorder une allocation veuvage pour tous, et non réservée en cas de personne décédée retraitée.

Il lui demande donc de bien vouloir examiner ces différentes pistes afin de venir en aide aux personnes touchées par ces graves difficultés.

Réponse du ministère de l’Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique publiée dans le Journal officiel de la République française, édition « Débats parlementaires – Sénat », nº 22 S (Q), 2 juin 2022, pp. 2809-2810.

Bruno Le Maire (© Thesupermat)

Bruno Le Maire (© Thesupermat)

Jusqu’à l’imposition des revenus de 2008, les contribuables célibataires, divorcés, séparés ou veufs, sans enfant à charge, bénéficiaient d’une majoration d’une demi-part supplémentaire de quotient familial lorsqu’ils vivaient seuls et avaient un ou plusieurs enfants faisant l’objet d’une imposition distincte ou avaient eu un enfant décédé après l’âge de seize ans. Ces dispositions dérogatoires instituées après la Seconde Guerre mondiale pour prendre en compte principalement la situation particulière des veuves de guerre ne correspondaient plus à la situation actuelle. Le quotient familial a en effet pour objet de tenir compte des personnes à charge au sein du foyer dans l’évaluation des capacités contributives du contribuable. L’attribution de demi-part indépendamment du nombre de personnes effectivement à charge constitue une importante dérogation à ce principe et confère au bénéficiaire un avantage fiscal croissant avec son revenu. Le législateur a décidé, à compter de l’imposition des revenus de l’année 2009, de recentrer cet avantage fiscal au bénéfice des seuls contribuables célibataires, divorcés, séparés ou veufs vivant seuls et qui ont supporté seuls à titre exclusif ou principal la charge d’un enfant pendant au moins cinq années. À défaut de respecter ces conditions, les personnes seules bénéficient d’une part de quotient familial. Depuis lors, certaines mesures ont cependant permis de restaurer la situation des contribuables aux revenus modestes entrés dans l’imposition du fait de la suppression de cette demi-part supplémentaire. En matière d’impôt sur le revenu, pour les revenus de 2020, le seuil d’imposition des personnes seules commence à 14 962 € de revenu net imposable. En outre, conformément aux engagements pris par le Président de la République le 25 avril 2019 à l’issue du grand débat national, l’article 2 de la loi nº 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020 a diminué substantiellement l’impôt sur le revenu des classes moyennes à compter de l’imposition des revenus de l’année 2020, pour un montant global de 5 Mds€, en baissant de 14 % à 11 % le taux de la première tranche imposable au barème progressif, en atténuant la pente de la décote pour la rendre plus favorable pour les contribuables modestes, tout en plafonnant le gain en résultant à un montant de l’ordre de 125 € pour une part pour les foyers relevant de la tranche à 30 % du barème progressif et en le neutralisant pour les foyers relevant des tranches aux taux de 41 % et 45 % du barème progressif. Par ailleurs, les personnes âgées de plus de soixante-cinq ans bénéficient d’un abattement sur leur revenu imposable, égal à 2 448 € pour l’imposition des revenus de 2020 si leur revenu imposable n’excède pas 15 340 €, et à 1 224 € si leur revenu imposable est compris entre 15 340 € et 24 690 €. Le montant de l’abattement est par ailleurs doublé pour les couples mariés lorsque chacun des époux remplit les conditions pour en bénéficier. En matière de fiscalité directe locale, la perte de la demi-part a été neutralisée quant à ses effets éventuels sur la taxe d’habitation (TH), la taxe foncière sur les propriétés bâties et la contribution à l’audiovisuel public. Par ailleurs, dans la lignée de l’article 5 de la loi de finances pour 2018 qui a instauré, depuis les impositions de 2018, un nouveau dégrèvement qui, s’ajoutant aux exonérations existantes, a permis à environ 80 % des foyers d’être dispensés du paiement de la TH au titre de leur résidence principale en 2020, l’article 16 de la loi de finances pour 2020 prévoit la suppression totale et définitive de la TH sur la résidence principale, par étapes d’ici 2023. En 2023, plus aucun foyer ne paiera de TH sur sa résidence principale. Au surplus, les pensionnés les plus modestes, parmi lesquels figurent les bénéficiaires de l’allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA), sont exonérés de prélèvements sociaux sur les revenus de remplacement. Pour les pensionnés non exonérés, l’article 3 de la loi du 24 décembre 2018 portant mesures d’urgence économiques et sociales a rétabli à 6,6 % (au lieu de 8,3 %) le taux de contribution sociale généralisée (CSG) sur les revenus de remplacement applicable aux contribuables dont le RFR de l’avant-dernière année est compris entre 14 781 € et 22 940 € pour la première part de quotient familial (revenus versés en 2020, RFR de 2018). Enfin, le montant du minimum vieillesse et de l’ASPA a fait l’objet d’une revalorisation significative depuis 2018 et a atteint 903 € par mois en 2020, soit 100 € par mois de plus qu’en 2018. Le Gouvernement a ainsi souhaité privilégier des mesures générales, justes et transparentes, afin de prendre en compte la situation de toutes les personnes âgées modestes. Comme l’a indiqué le Président de la République, le Gouvernement n’est, en revanche, pas favorable au rétablissement, dans sa version antérieure à 2009, de la demi-part fiscale pour les personnes vivant seules et ayant eu un ou plusieurs enfants. S’agissant en dernier lieu de la protection sociale en matière de veuvage, celle-ci est assurée au moyen de deux dispositifs : les pensions de réversion et l’allocation de veuvage. La pension de réversion assure le reversement d’une part de la pension de retraite de l’assuré décédé à son conjoint survivant ou divorcé jusqu’à son décès. Les conditions de droit à cette pension de réversion sont variables selon les régimes : condition d’âge, de ressources, de durée de mariage, de non remariage. Le droit à pension de réversion est dans tous les régimes soumis à une condition de mariage mais il n’est subordonné dans aucun d’entre eux à la qualité de retraité de l’assuré décédé. Dans les régimes où la pension de réversion est accessible sous une condition d’âge (55 ans), le conjoint survivant qui n’a pas atteint cet âge peut solliciter une allocation de veuvage, servie sous condition de ressources et de non-remariage pendant une durée de deux ans, ou jusqu’à 55 ans si le conjoint survivant a au moins 50 ans lors du décès. Ainsi, une couverture sociale est assurée en cas de décès précoce à titre temporaire afin d’aider la personne veuve à se réinsérer sur le marché du travail. Toutefois, dans le secteur public, le droit à l’allocation de veuvage n’est pas ouvert, du fait que le droit à pension de réversion n’est soumis à aucune condition d’âge.


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