Question sur l’avis de la commission indépendante sur l’inceste et les violences sexuelles faites aux enfants

Sénat

Savin (Michel), question d’actualité au gouvernement nº 2101G sur l’avis de la commission indépendante sur l’inceste et les violences sexuelles faites aux enfants, adressée au secrétaire d’État chargé de l’enfance et des familles lors de la séance publique du 3 novembre 2021.

M. le président. La parole est à M. Michel Savin, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Michel Savin (© D.R.)

Michel Savin (© D.R.)

M. Michel Savin. Monsieur le secrétaire d’État chargé de l’enfance et des familles, depuis plusieurs mois, nous vivons la libération de la parole sur les violences sexuelles, notamment celles qui sont faites aux enfants. Régulièrement, nous sommes confrontés à l’horreur ; une prise de conscience salutaire se réalise dans notre société.

Je tiens à saluer ici les travaux importants réalisés au Sénat par la mission commune d’information présidée par Catherine Deroche sur la pédocriminalité.

La semaine dernière, la commission indépendante sur l’inceste et les violences sexuelles faites aux enfants (Ciivise) a rendu un premier avis, sur les mères en lutte.

Cet avis est éclairant : il met en avant toute la problématique qui s’impose aux parents dès lors qu’un enfant fait le choix de libérer sa parole.

C’est pourquoi la Ciivise a formulé trois recommandations fortes pour mieux protéger les enfants.

Nous le savons aujourd’hui, la parole des enfants n’est que trop peu écoutée et entendue. Nous savons également que très peu d’enfants s’expriment et que la réalité des faits est bien au-delà des plaintes que l’on connaît.

Chaque année, 22 000 enfants seraient victimes de violences sexuelles. Or, en 2020, moins de 2 000 personnes ont été poursuivies pour viol ou agression sexuelle à caractère incestueux.

Trop fréquemment encore, en 2021, le syndrome d’aliénation parentale est mis en avant, notamment lors des dépôts de plainte. Or toutes les études soulignent l’inexistence factuelle d’une telle dynamique. Ce concept conduit pourtant trop souvent les professionnels à ne pas prendre en compte le témoignage des enfants et les risques de violences auxquels ils sont exposés.

L’Espagne s’est déjà engagée contre le recours au concept d’aliénation parentale et le Parlement européen a récemment fait part de sa préoccupation sur le sujet.

Aussi, monsieur le secrétaire d’État, sur la base de ces recommandations, que compte faire le gouvernement français ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État chargé de l’enfance et des familles.

Adrien Taquet (© Gérald Garitan)

Adrien Taquet (© Gérald Garitan)

M. Adrien Taquet, secrétaire d’État auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargé de l’enfance et des familles. Monsieur le sénateur, merci d’avoir mis en valeur les travaux de la commission indépendante sur l’inceste et les violences sexuelles faites aux enfants, que j’ai installée dès le 1er août 2020 – et non en janvier dernier à la suite de la publication du livre de Camille Kouchner –, parce que la lutte contre les violences, notamment sexuelles, faites aux enfants est une action prioritaire de ce gouvernement.

La création de cette commission répondait à trois objectifs.

Premièrement, il fallait que le couvercle du déni et du silence ne se referme jamais plus.

Deuxièmement, il convenait d’accompagner la libération de la parole que vous évoquez. Je veux à ce propos saluer ici les quelque 5 000 personnes qui ont appelé la plateforme ouverte par la Ciivise le 21 septembre dernier, ainsi que celles qui sont venues témoigner à Nantes le 20 octobre dernier ou qui viendront encore à Bordeaux le 19 novembre prochain. Je veux saluer ces femmes et ces hommes victimes dans leur enfance. Je veux saluer ces mères en lutte.

Le troisième objectif de la Ciivise était enfin de formuler des recommandations de politique publique pour que nous, décideurs – et je sais à quel point le Sénat travaille sur ces questions –, puissions améliorer la protection des enfants dans notre société.

La Ciivise a fait figurer trois recommandations dans son premier avis. Certaines ont des implications législatives qui font l’objet d’expertises ; d’autres mesures préconisées relèvent non pas de la loi, mais plutôt de la pratique professionnelle.

Vous avez évoqué, monsieur le sénateur, le syndrome d’aliénation parentale. Dès 2018, le garde des sceaux avait émis une circulaire à l’attention des magistrats pour leur préciser que ce syndrome n’était ni reconnu ni justifié.

Vous parlez aussi de libération de la parole des enfants ; on le sait, la qualité du recueil de la parole est, elle aussi, cruciale dans ces affaires, notamment pour éviter les classements sans suite. C’est la raison pour laquelle, d’ici à l’année prochaine, nous créerons 100 unités d’accueil pédiatrique enfants en danger.

Pour conclure, je profite de votre question, monsieur le sénateur, pour vous annoncer que, conformément à la demande du Président de la République du 23 janvier dernier, depuis cette rentrée et tout au long de l’année, on déploiera à l’école, à l’occasion des visites médicales de 3-4 ans, de 5-6 ans et de 10-11 ans, un repérage systématique des violences sexuelles qu’auraient pu subir les enfants dans leurs familles ou dans un autre cercle. (M. Alain Richard applaudit.)

M. le président. La parole est à M. Michel Savin, pour la réplique.

M. Michel Savin. Monsieur le secrétaire d’État, je vous remercie, mais je pense que ce gouvernement doit arrêter le « en même temps » et rapidement passer des paroles aux actes !

Rendre la justice quand un enfant révèle les violences qu’il a subies est certes une mission délicate, mais c’est un devoir moral collectif, qui n’est pas contraire au principe fondamental de la présomption d’innocence. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mise à jour du 4 novembre 2021

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