Audition de Marc Pichard par la Mission d’information de la Conférence des présidents sur l’adaptation de la politique familiale française aux défis de la société du XXIe siècle

Marc Pichard (© Assemblée nationale)

Professeur des universités (Université Paris-Ouest Nanterre), spécialiste des questions de filiation et de genre en droit civil, Marc Pichard a été auditionné cet après-midi par la Mission d’information de la Conférence des présidents sur l’adaptation de la politique familiale française aux défis de la société du XXIe siècle. Quoique cet enseignant ne soit certes pas de nos amis, ses propos nous ont paru suffisamment intéressants pour que le compte rendu de son audition soit publié. L’enregistrement vidéo est disponible sur le site de l’Assemblée nationale.


La séance est ouverte à quatorze heures quinze.

M. le président, Stéphane Viry. Monsieur le professeur, vous enseignez le droit privé à l’université de Nanterre et vous avez consacré de nombreux articles aux droits des personnes et de la famille. Vous vous êtes notamment intéressé à la notion de genre, au regard du droit de la filiation. Cette question, comme celle des droits des enfants ou de l’égalité des personnes, fait l’objet de nos réflexions, afin de nous permettre de penser les évolutions de la politique familiale, dans un contexte juridique et sociologique en pleine évolution.

Votre audition était donc attendue et espérée par cette mission d’information.

Avant de vous laisser vous exprimer à partir des questions qui vous avaient été adressées préalablement, je vais laisser la parole à Mme Nathalie Elimas, qui est la rapporteure de notre mission d’information.

Mme Nathalie Elimas, rapporteure. Monsieur Pichard, bonjour et surtout merci d’avoir répondu favorablement à notre invitation. Le Président Viry a fixé l’ambition de ce que nous attendons aujourd’hui de votre part. Cette mission d’information se veut assez vaste, c’est l’adaptation de la politique familiale aux grands défis du vingt-et-unième siècle. On y aborde des questions démographiques, des questions sociales, des questions sociétales, des questions juridiques aussi. Je pense notamment à la loi bioéthique, qui a été votée au Parlement en septembre, et donc à l’ouverture de la procréation médicalement assistée (PMA) pour toutes, avec des conséquences sur la filiation, même si cela n’était pas l’objet du texte. Néanmoins, nous avons inscrit dans le titre VII du code civil un certain nombre de conséquences et de modifications. Nous sommes évidemment intéressés de vous entendre sur cette question en particulier, puis sur la famille et la politique familiale plus généralement.

M. le président, Stéphane Viry. Monsieur Pichard, nous vous laissons environ une vingtaine de minutes pour un exposé liminaire à partir du questionnaire que nous avions pris la liberté de vous adresser, en vous remerciant pour la documentation que vous nous avez déjà faite parvenir pour nourrir nos travaux.

M. Marc Pichard, professeur des universités. Je vous remercie de laisser entendre une parole qui est plutôt minoritaire dans le champ du droit des personnes et de la famille, puisqu’il s’agit d’une parole qui mobilise une méthode d’analyse spécifique, l’analyse juridique au prisme du genre.

Il faut d’abord dissiper une ambiguïté car le terme « genre » charrie beaucoup de malentendus, tout d’abord en raison de sa dimension polysémique. Le genre peut se penser comme une qualité individuelle, on parle alors du genre d’une personne ou de l’identité de genre. Ce n’est pas ce que l’on désigne lorsque l’on parle d’analyse juridique au prisme du genre. Dans le cadre d’une analyse de cet ordre, le genre est conçu comme un système normatif qui entend poser des modèles porteurs de valeurs, de représentation et parfois de stéréotypes, par exemple le stéréotype selon lequel les femmes, en tant que femmes, seraient plus aptes que les hommes à s’occuper de jeunes enfants. On retrouve cette approche du genre comme système, notamment dans la convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique. Cette convention, dite Convention d’Istanbul, porte en son article 3 une définition du genre pour la compréhension de la convention en cause. Le texte stipule : « aux fins de la présente convention, le terme genre désigne les rôles, les comportements, les activités et les attributions socialement construits qu’une société donnée considère comme appropriés, pour les femmes et les hommes ».

En tant que système normatif qui désigne ce qui serait approprié pour les unes et les autres, le genre peut entrer en conflit avec deux ambitions politiques. De manière très évidente, celle d’un projet d’égalité entre les individus, dès lors que le genre charrie des représentations différenciées des rôles sociaux des hommes et des femmes. Mais le genre peut entrer en conflit avec un projet d’émancipation des individus, dès lors que le genre comme système a un effet d’assignation des individus à certaines fonctions, à certains rôles sociaux.

Chercher à penser le droit et le genre, le droit au prisme du genre, c’est donc s’interroger sur les interactions entre ces deux systèmes normatifs. Ces interactions peuvent être de deux types. Parfois, le droit vient au soutien du genre, c’est-à-dire qu’il va conforter les distinctions sociales, les différences de statut, les différences de fonction entre les femmes et les hommes ou les différences de représentations sociales relatives aux personnes hétérosexuelles et aux personnes homosexuelles, aux personnes cisgenres et aux personnes transgenres. Le droit va alors participer à la fabrique du genre.

Parfois, au contraire, le droit lutte contre le genre, au sens où il cherche à modifier les rapports sociaux de sexe. Tous les dispositifs relatifs à la parité ou à la représentation équilibrée des hommes et des femmes dans les organes de décision peuvent ainsi être considérés comme des mobilisations du droit contre le genre.

Dans le même ordre d’idées, les dispositifs de lutte contre les discriminations au regard du sexe, de l’identité de genre ou de l’orientation sexuelle peuvent également être vus comme une manière pour le droit de lutter contre le genre.

L’analyse juridique au prisme du genre va donc consister à se demander si le droit a un rôle dans la consolidation de la répartition des rôles sociaux entre les femmes et les hommes, s’il a un rôle dans la consolidation des conventions de genre qui attribuent certaines fonctions, certains rôles aux unes et aux autres, qui charrient des représentations ou des stéréotypes relatifs aux unes aux autres, ou au contraire s’il cherche à remettre en cause ces conventions de genre.

Cette analyse juridique au prisme du genre a avant tout pour objet de révéler certains effets sociaux des normes juridiques, de révéler la part du droit dans les rapports sociaux de sexe. Il s’agit de révéler et pas nécessairement de prescrire. Il s’agit de montrer comment le droit produit certains effets sociaux, pas nécessairement de préconiser que le droit cesse de produire ces effets sociaux. C’est pourquoi je risque de ne pas toujours, sinon de ne jamais vraiment répondre à vos attentes en termes de préconisations.

Eu égard à ce que je viens de dire, ma parole est évidemment une parole située. Je parle d’un certain point de vue, un point de vue féministe, un point de vue attaché à l’égalité entre les hommes et les femmes, mais peut-être avant tout un point de vue attaché à la liberté de ne pas être assigné à certaines fonctions, en raison de ses gènes ou de son orientation sexuelle. Simplement, j’estime que ma fonction n’est pas de dire aux décideurs politiques ce qu’il faut faire, mais de souligner quels sont les enjeux, parfois camouflés, des questions dont vous êtes saisis pour que vous puissiez, je l’espère, trancher en meilleure connaissance de cause.

Mais les enjeux liés au genre sont évidemment des enjeux parmi d’autres lorsqu’il s’agit de prendre une décision et vous êtes évidemment les seuls juges pour décider de donner la priorité à tel ou tel enjeu.

Au moins deux ordres de données peuvent être pris en considération à côté des questions et des enjeux de genre. D’une part, les données sociales. La première grande série de réformes du droit de la famille portée par le doyen Carbonnier entre 1964 et 1976 a principalement été justifiée par le décalage entre le droit et la société, et la nécessité de prendre acte de ces changements, la nécessité de s’adapter. Il fallait changer la loi parce que la société changeait. Il me semble que les deux premières questions que vous m’avez transmises s’inscrivent dans cette logique, et surtout que l’intitulé même de votre mission d’information s’inscrit dans cette tradition. Cela n’a rien de surprenant puisque cette justification de l’intervention législative (il faut changer le droit car la société a changé) demeure très régulièrement mobilisée, de manière parfaitement légitime.

Or, si cette volonté d’adapter le droit aux faits peut aller dans le sens de la prise en considération d’une perspective de genre, il n’y a rien d’un mouvement nécessaire. Tout au contraire, il peut advenir que les deux analyses viennent en contradiction.

Parce que le genre est un système normatif qui imprègne la société, la perspective de genre peut conduire à porter une réforme pour changer la société et pas parce que celle-ci a changé. Ainsi, en 2012, nous pouvions soutenir que le fait que le mariage soit exclusivement ouvert aux couples de personnes de sexe différent en faisait une institution hétérosexiste qui consolidait l’hétérosexualité comme norme sociale. C’est ce à quoi pouvait conduire la lecture du droit français au prisme du genre. Certes, l’ouverture du mariage aux couples de personnes de même sexe peut être lue comme une adaptation du droit aux évolutions sociales, en particulier à la plus grande acceptation de l’homosexualité par la société, mais elle peut aussi être lue comme la volonté de faire changer la société, quand bien même celle-ci ne serait pas prête à ce changement.

Les deux analyses, l’une à partir de la société et l’autre à partir de la perspective de genre, peuvent donc conduire à des solutions législatives et à des formes de débats profondément différentes. L’argument de l’adaptation du droit au fait permet, dans une certaine mesure, de ne pas se prononcer en termes de valeur, en termes axiologique et d’apaiser le débat, puisqu’il s’agit de s’adapter, peu ou prou, aux faits et de se décider pour accompagner l’évolution des faits sociaux.

Au contraire, la prise en considération d’une analyse au prisme du genre peut en général conduire à des débats beaucoup plus virulents, puisque dans la plupart des cas, il s’agit de mettre en question une norme juridique qui participe à la construction des rapports sociaux de sexe tels qu’ils existent à un instant T. Décider qu’il convient de rompre avec cette consolidation du genre par le droit, c’est en principe aller à l’encontre de l’état de la société à un instant T. Le choix axiologique, le choix en termes de valeur du législateur, apparaît alors en toute clarté et peut susciter de beaucoup plus fortes résistances. On peut par exemple l’illustrer à nouveau avec les débats relatifs à la représentation équilibrée des hommes et des femmes dans les organes de décision.

Nous avons donc une première possibilité de conflit entre l’argument de l’adaptation à l’évolution de la société et celui de l’analyse en termes de genre.

Nous avons également une autre possibilité de conflit. La réforme implique évidemment de prendre en considération les données juridiques préexistantes. Votre mission d’information a pour objet l’adaptation de la politique familiale aux défis du vingt-et-unième siècle. Or évoquer la politique familiale n’est évidemment pas un choix anodin. L’expression contient la promesse d’essayer de penser les institutions et les règles juridiques relatives à la famille, de manière générale, comme un ensemble porté par une certaine cohérence ou une ambition de cohérence. Or, poursuivre cet objectif de cohérence peut conduire à ne pas prendre en considération les données que révèle la perspective de genre ou au contraire, les données sociales.

Nous pouvons déjà illustrer les conflits de logique qui peuvent exister en matière familiale à partir d’une hypothèse qui était évoquée parmi les questions que vous m’avez transmises. C’est la question de l’adaptation du droit aux familles recomposées. Au regard de l’évolution des faits et au nom de l’adaptation du droit aux faits, il peut être tentant de conférer aux beaux-parents un statut juridique spécifique, proche de celui de parent. Cette tentation de création d’un statut du beau-parent est récurrente pour répondre au phénomène social des familles recomposées. Mais cette tentation peut entrer en conflit avec la recherche de cohérence du droit, dès lors que le principe d’exercice conjoint de l’autorité parentale vise à faire survivre le couple parental au couple conjugal, à travers le principe de l’exercice en commun de l’autorité parentale, nonobstant la séparation.

Or, ce n’est pas impossible, mais il n’est pas si évident que l’on puisse en même temps garantir la place des parents auprès de l’enfant et en particulier la place du parent avec qui l’enfant ne réside pas, et conférer aux beaux-parents des fonctions s’apparentant ou relevant de l’autorité parentale.

L’argument de la cohérence et l’argument de l’adaptation ne vont pas forcément dans le même sens.

De même, si l’on ajoute la perspective de genre dans l’équation, la lecture d’un projet de création d’un statut du beau-parent au prisme du genre conduit d’abord à souligner que puisque la résidence habituelle des enfants est encore très majoritairement fixée chez la mère, le statut du beau-parent sera bien souvent un statut du beau-père. C’est une première donnée.

Ensuite, un tel projet peut être lu comme un renoncement à voir le père investir entièrement sa place de père et donc comme une illustration d’une représentation sociale genrée relative à une forme d’interchangeabilité des hommes auprès de l’enfant, dès lors qu’ils s’engagent à pourvoir aux besoins de celui-ci sur le plan éducatif notamment.

Pour aller au plus vif du sujet, je propose d’avancer quatre constatations sur l’état du droit au prisme du genre, ce qui devrait être en particulier l’occasion de répondre à la cinquième question que vous m’avez posée, avant que nous reprenions peut-être le questionnaire de manière plus systématique. Je propose de distinguer quelques apports de l’analyse au prisme du genre en matière de filiation d’abord, puis en matière d’autorité parentale.

S’agissant de la filiation, je voudrais vous proposer deux données qui sont peut-être des données évidentes, mais qui me paraissent importantes à prendre en considération dans le débat.

La première donnée en matière de filiation est que le droit français invisibilise l’apport génétique des femmes pour penser la filiation. Le droit de la filiation que l’on qualifie de charnel, qui est régi par le titre VII du livre premier du code civil ne connaît pas l’apport génétique des femmes dans la procréation. Le modèle de ce dispositif législatif est la procréation charnelle, c’est la raison pour laquelle la filiation en vertu du titre VII est nécessairement une filiation à deux branches seulement, et c’est pourquoi aussi, une des branches doit être occupée par une femme et l’autre par un homme ; c’est en tout cas la vision telle qu’elle existe jusqu’à présent, en attendant l’adoption définitive de la loi sur la bioéthique. On voit tout de suite en quoi le fait de décider de régir, au sein du titre VII, la question des couples de personnes de même sexe, c’est-à-dire des couples de femmes ayant recours à une PMA avec tiers d’honneur, peut poser une question en termes de cohérence législative.

Mais en dehors de cette hypothèse, il faut souligner que la procréation, dans le titre VII, est conçue de manière différenciée. Le père est censé être le géniteur et la mère, la femme qui accouche. L’explication est très classique et tient dans le fait que le rôle des hommes et des femmes dans la procréation ne serait pas identique. Il ne s’agit évidemment pas ici de le contester.

Simplement, nous constatons quand même un choix du droit, parce qu’il y a une dimension identique dans la procréation charnelle qui est l’apport génétique des femmes et des hommes dans cette procréation charnelle. Le droit a fait clairement le choix de construire son modèle juridique à partir de ce qu’il distingue et pas à partir de ce qui est commun aux hommes et aux femmes.

De facto, ces gènes des femmes n’existent pas dans le titre VII du livre premier du code civil, lorsque l’on régit l’apport génétique des femmes.

Nous connaissons, au moins en partie, la raison de cette invisibilisation des gènes des femmes, qui est évidemment la cohérence avec la prohibition, ou en tout cas la nullité des conventions de gestation pour autrui. Cela permet de ne pas avoir à se poser la question de savoir comment gérer l’hypothèse dans laquelle une femme ferait porter par une autre femme l’enfant dont elle serait néanmoins la génitrice. Il n’en demeure pas moins qu’il y a là une donnée extrêmement importante et qui peut être relativement troublante, parce que, même chez les auteurs les plus classiques du champ juridique, on lit parfois que dans ce cas-là, la situation est particulière parce que la génitrice serait la véritable mère. Nous sommes globalement socialement gênés par cette figure.

Cette invisibilisation des gènes des femmes pose aussi une question dans l’hypothèse de la réception d’ovocytes par la partenaire, dans le cas d’une PMA au sein d’un couple de femmes. Nous savons que la réception d’ovocytes de la partenaire (ROPA) est une pratique qui se développe et qui cherche précisément à ce que les deux mères aient un lien biologique avec l’enfant, l’une en raison de l’apport génétique et l’autre du fait de la gestation.

Nous voyons comment cette tradition d’invisibilisation des gènes des femmes rend cette question difficilement pensable, outre le fait, par ailleurs, qu’elle s’inscrive en fort décalage avec la manière dont a été pensé le droit de l’assistance médicale à la procréation.

Le droit de la filiation ne connaît donc pas l’apport génétique des femmes dans la filiation.

La deuxième donnée concernant la filiation réside dans le fait que le droit français porte une vision essentialisante de la maternité, au sens où la mère doit être la femme qui accouche et la femme qui accouche doit être la mère, alors qu’il conçoit la paternité comme une fonction qui pourrait, le cas échéant, être occupée par quelqu’un d’autre que le géniteur. Le modèle du titre VII du livre premier du code civil est que le père est le géniteur, mais le droit français ne manifeste pas un attachement particulier à ce qu’il y ait une véritable concordance entre cet apport génétique et le statut de père.

Effectivement, s’il y a un décalage, il pourra y avoir une action en contestation et l’action de contestation conduira à ce que l’on détruise la filiation de l’homme qui aurait établi un lien de filiation avec l’enfant dont il ne serait pas le géniteur. Mais ce qui me paraît être un élément extrêmement important, c’est que les écarts au modèle, c’est-à-dire les écarts à l’hypothèse à partir de laquelle le droit a été pensé, soit un père géniteur et une mère qui serait la femme qui a accouché, ne sont pas du tout traités de la même manière, selon que soit en cause la paternité ou la maternité. Pour le dire très rapidement, les décalages entre le modèle et la réalité ne sont pas considérés comme intéressants pour l’ordre public ou la société, lorsque la paternité est en cause.

Je donnerai deux exemples. Le premier est la possibilité pour le ministère public d’agir, de lui-même, en contestation d’une paternité. Le ministère public voit ses possibilités d’agir limitées par l’article 336 du code civil, il ne peut agir que dans deux hypothèses, en particulier lorsque des indices tirés des actes eux-mêmes révèlent l’invraisemblance de la filiation, ou en cas de fraude à la loi. Il s’avère que sur ce point, il y a une forme de consensus pour estimer que le ministère public n’est pas compétent pour contester la véracité d’une reconnaissance de complaisance, pour la seule raison qu’il s’agirait d’une reconnaissance sciemment non conforme aux données biologiques. C’est en particulier ce qui ressort très clairement de la circulaire de présentation de l’ordonnance de 2005 ayant réformé la filiation. Une reconnaissance souscrite par son auteur en vue d’un avantage particulier et dont la finalité est étrangère à l’intérêt de l’enfant et à son éducation, comme l’obtention d’un titre de séjour ou de la nationalité, doit être considérée comme frauduleuse, selon cette circulaire. En revanche, je la cite, « dès lors que l’auteur de la reconnaissance s’engage par cet acte à assumer les conséquences du lien de filiation ainsi établi, la reconnaissance mensongère ne porte pas atteinte à l’ordre public et ne peut être contestée par le ministère public ».

Nous sommes en présence de ce que l’on pourrait analyser comme une fraude à l’adoption, un homme reconnaît un enfant dont il sait ne pas être le géniteur. Nous pourrions dire que la voie normale pour établir ce lien de filiation est l’adoption. Nous pourrions donc considérer que nous sommes en présence d’une fraude à la loi, d’une fraude à l’adoption, alors que la circulaire dit qu’il n’y a pas de fraude et donc qu’il n’y a pas de légitimité du ministère public à contester cette filiation. Cette solution fait consensus, mais vous l’aurez compris, peut-être pas complètement.

La tolérance du droit face aux écarts au modèle en matière de paternité se révèle aussi dans l’impossibilité de mobiliser le droit pénal, dans l’hypothèse où il y aurait ainsi un décalage entre l’apport génétique et le statut de père.

L’article 227-13 du code pénal pénalise ce qu’il appelle la simulation. Lorsque l’on a sciemment cherché à créer un décalage entre la filiation et ce qui devrait être au fondement de la filiation, il y a une infraction qui peut être poursuivie. Chacun estime que la reconnaissance mensongère à laquelle procéderait sciemment un homme n’est pas constitutive d’une simulation au sens de l’article 227-13.

Si j’ai voulu insister sur ce point, c’est qu’au contraire, nous allons avoir un traitement extrêmement différent de la situation d’une femme qui n’aurait pas accouché et qui souhaiterait néanmoins établir un lien avec l’enfant dont elle n’a pas accouché. D’une part, le ministère public serait compétent pour agir en contestation de la reconnaissance en question, puisque nous serions en présence d’une fraude à la loi, en l’occurrence une suspicion de gestation pour autrui. Il y a une compétence du ministère public qui n’est absolument pas contestée. D’autre part, il n’est pas non plus contesté que la femme en question serait coupable du délit de simulation, au sens du code pénal.

Nous avons un traitement, au regard de l’ordre public et de ce qui intéresse la société, qui est fondamentalement différent entre les hommes et les femmes.

Sur l’autorité parentale, je voudrais juste présenter deux observations à partir d’une perspective de genre qui va s’asseoir essentiellement sur les pratiques sociales notamment le fait que, malgré les évolutions qui sont considérables, la résidence habituelle des enfants reste très majoritairement fixée chez la mère et de manière très exceptionnelle, chez le père seul, le reste étant bien sûr le développement des hypothèses de résidence alternée.

L’autorité parentale est principalement conçue comme un droit et pas comme une charge. Le texte dit que c’est à la fois un ensemble de droits et de devoirs mais dans la conception juridique, dans la pratique judiciaire et dans la conception sociale, l’autorité parentale est principalement conçue comme un droit et pas comme une charge, alors que la charge quotidienne des enfants est probablement la source principale d’inégalités, en particulier d’inégalités économiques, entre les hommes et les femmes.

La perspective de genre conduit à se demander s’il n’y aurait pas matière, d’abord, à repenser le vocabulaire dans lequel les questions d’autorité parentale sont posées.

Dans un cadre contentieux, par exemple, on retiendra finalement que tel parent a obtenu la résidence, comme si c’était un gain, alors que de facto, c’est aussi, et peut-être principalement, une charge pour la personne qui va devoir assumer cette résidence habituelle.

Inversement, nous allons parler de droit de visite et d’hébergement, c’est quelque chose de positif. Nous allons finalement considérer que le parent qui n’exerce pas son droit de visite et d’hébergement a renoncé à son droit, pas qu’il n’a pas rempli ses obligations en matière de visite et d’hébergement.

Cette manière de penser se traduit également sur le plan pénal, dans la mesure où, si un parent empêche l’autre d’exercer ce qui est conçu comme son droit, nous allons être en présence d’une non-représentation d’enfants alors que finalement, si un parent n’exerce pas ce qui est conçu comme son droit, il n’y aura pas de réponse de cet ordre.

Sur la question de l’autorité parentale, les règles relatives à l’autorité parentale ne visent pas au premier chef l’égalité entre les parents en termes de charge des enfants.

Quelle est la place du droit civil sur le fait que nous constations que la résidence habituelle est très majoritairement fixée chez les mères ? Est-ce que le droit y est pour quelque chose ou est-ce qu’il n’est que le reflet d’une pratique sociale qui lui serait extérieure ? Sur ce point, le principal critère juridique pour penser les questions de l’autorité parentale est la question de l’intérêt de l’enfant. Mais chacun sait que la notion est assez fuyante et que c’est un critère qui, à part dans des situations de crise, ne va pas forcément donner d’informations extrêmement précises. En revanche, nous constatons que le droit civil cherche d’abord à favoriser les accords entre les parents. En termes de pratiques sociales, on peut trouver cela extrêmement souhaitable. Seulement, nous savons que la primauté donnée aux accords entre les parents peut être investie par les conventions de genre, par les représentations genrées qui imprègnent également les parents eux-mêmes. Nous pouvons donc aussi discuter cette place laissée aux accords, au prisme du genre. Si nous prenons en considération les différents indices que le code civil donne au juge pour se prononcer en matière d’autorité parentale, nous constatons qu’il est invité à prendre en considération les expertises mais aussi les pratiques antérieures. Nous voyons en réalité comment cette prise en considération des pratiques antérieures peut être finalement une manière de faire à nouveau peser la charge des enfants sur celui des deux parents qui avait la charge des enfants, avant la séparation.

Or, que se passe-t-il ? Les données sont assez claires à cet égard, plus une femme a d’enfants, plus sa quotité de travail se réduit. Plus il y a d’enfants, plus le temps partiel se développe chez les femmes. Bizarrement, chez les pères, plus il y a d’enfants, plus la quotité de travail augmente. Il y a là une donnée qui est en soi intéressante. Dire, dans le code, qu’on va privilégier les pratiques antérieures, c’est en réalité inviter le juge, certes indirectement, mais tout de même, à dire que la solution est que celui qui s’est le plus occupé des enfants continue à s’occuper le plus des enfants. Sauf qu’entre-temps, il y a une donnée fondamentale qui a changé, c’est que par hypothèse, le couple s’est séparé et que les échanges économiques au sein du couple ont cessé. Alors que tout a changé, on va inviter le juge à faire comme si tout était pareil, alors que les données économiques à cet égard sont fondamentalement différentes.

Sur ce point, il existe des solutions et des modèles différents. Le droit belge a adopté une solution de principe qui est une solution de garde alternée, de résidence habituelle alternée, avec évidemment la possibilité de s’en abstraire et de l’exclure, mais en justifiant de cette exclusion. Une proposition de loi en ce sens a été votée au Sénat, en 2013 me semble-t-il, mais n’a finalement pas été adoptée.

Voilà pour un premier panorama déjà trop long de ce que seraient pour moi les grands marqueurs d’une analyse du droit de la filiation et de l’autorité parentale au prisme du genre.

M. le président, Stéphane Viry. Merci de vos propos M. Pichard. Avant de laisser Mme Elimas prolonger les questions, nous avons deux collègues qui nous ont rejoints. J’inviterai d’ailleurs M. Lurton à bien vouloir me suppléer d’ici une dizaine de minutes, parce que je dois aller en séance publique. Est-ce que vous avez les uns et les autres des interrogations à poser à M. le professeur ?

Mme Nathalie Elimas, rapporteure. Je souhaite revenir avec vous sur la réécriture du titre VII, issu de la loi sur la bioéthique. La création d’un titre VII bis spécifique à la filiation issue de la PMA pour toutes avait été recommandée par le Conseil d’État. Quel est votre regard sur cette question-là ? Étiez-vous plutôt favorable à l’écriture de ce titre VII bis ou l’écriture actuelle vous semble-t-elle satisfaisante ?

M. Marc Pichard. Deux grands modèles étaient envisagés dans les débats, avant que la discussion ne s’ouvre. Du point de vue théorique, deux modèles cherchaient à préserver au maximum l’égalité entre les couples. C’était d’une part, la déclaration commune anticipée qui devait s’appliquer à l’ensemble des couples ayant recours à une PMA avec tiers donneur, qui est en particulier porté par le rapport écrit par Irène Théry et Anne-Marie Leroyer. Ce premier modèle proposait un nouveau mode de filiation, dès lors qu’il y a une PMA avec tiers donneur.

Un deuxième modèle avait été proposé, qui était une extension pure et simple des modalités du titre VII, en cas de PMA avec tiers donneur, ce qui n’est pas ce qu’a choisi l’Assemblée nationale. Même si les dispositions restent intégrées au titre VII, ce sont des dispositions spécifiques, qui ne s’appliqueront qu’aux couples de femmes.

Nous avions deux modèles égalitaires entre les couples qui étaient défendus. Ils avaient chacun leurs défauts. Si nous reprenons les grilles que nous pouvions évoquer, nous pouvions reprocher au premier modèle un risque d’assez forte ineffectivité, parce que pour les couples de femmes, il semble évident qu’elles allaient recourir à cette technique, mais pour les couples de personnes de sexe différent, il est moins évident qu’ils souhaitent le révéler. Comment, en réalité, aurions-nous pu savoir qu’il y avait eu une PMA avec tiers donneur, au moment de la naissance de l’enfant ? Il y avait des défauts dans ce modèle, c’est évident.

La mobilisation du titre VII du livre premier du code civil pouvait beaucoup interroger en termes de cohérence, dès lors que ce titre a été conçu eu égard à la procréation charnelle et que s’il y a deux lignes, une maternelle et une paternelle, c’est au regard de cette procréation charnelle, même si techniquement, on pouvait bloquer ces filiations comme on le fait pour les couples de personnes de sexe différent.

Les deux propositions étaient discutables. Elles avaient néanmoins l’immense mérite de préserver l’égalité entre les couples. Le texte adopté par l’Assemblée nationale me semble cumuler en réalité un certain nombre de faiblesses et précisément abandonner cette ambition de traiter également tous les couples. Nous sommes dans une vraie logique « d’en même temps ». Effectivement on ouvre la PMA, tout en disant que ce n’est pas un enjeu d’égalité, les débats à cet égard étaient extrêmement intéressants. Les ministres porteuses du projet ont explicitement dit que ce n’était pas une loi d’égalité, alors que nous aurions parfaitement pu dire que c’était une loi d’égalité dans la mesure où la situation d’une femme mariée à une autre femme qui ne peut pas avoir d’enfant n’est pas fondamentalement différente de celle d’une femme mariée à un homme stérile et qui souhaiterait pouvoir recourir à une PMA avec tiers donneur.

Vous aurez compris que je ne suis pas très convaincu par la solution qui a finalement été retenue.

Mme Nathalie Elimas, rapporteure. Pensez-vous que le droit de la filiation et/ou le droit de la famille participent à une reproduction des inégalités de sexe et de genre ? Quelles sont vos préconisations en termes de droit pour qu’il y ait une évolution positive ?

M. Marc Pichard. Sur la question de la filiation, toutes les cartes sont actuellement sur la table avec le débat relatif à la PMA. Il était évident que la fermeture de l’accès aux couples de femmes aux PMA avec tiers donneur posait une question d’égalité. Il devrait y être répondu, même si on peut beaucoup discuter de la solution qui a été retenue.

Néanmoins, pour revenir sur le premier point que j’ai évoqué, qui était l’hypothèse de la différence qui existe entre les hommes et les femmes en matière de filiation, il me semble qu’il y a deux pistes possibles. La première, comme je l’ai laissé entendre, c’est de se poser la question de l’apport génétique des femmes pour penser la filiation. Cela n’implique pas nécessairement d’admettre la gestation pour autrui sur le territoire national. Il est évident que cela affaiblirait encore la position française de nullité de ces conventions sur le territoire national. Nous aurions un premier champ qu’il va falloir, je pense, inévitablement investir parce que nous allons voir venir des hypothèses contentieuses de gestation pour autrui réalisées à l’étranger, avec les ovocytes de la mère légale. Le traitement judiciaire va être probablement beaucoup plus complexe, eu égard aux critères qui ont été avancés pour au contraire considérer que les géniteurs pouvaient assez aisément se voir reconnaître le statut de père.

Le premier élément est d’essayer de voir s’il serait possible de penser la maternité à partir des gènes.

La deuxième piste qui pourrait être ouverte en matière de filiation, c’est évidemment la question des reconnaissances sciemment mensongères. Nous pourrions tout à fait discuter du fait de limiter la possibilité d’attribution d’une paternité. Dans sa thèse qui a été soutenue le 25 novembre dernier, Perrine Ferrer-Lormeau propose une vaste reconstruction du droit de la famille, en partie inspirée par une perspective de genre et elle suggère d’imposer aux femmes d’indiquer le nom du père, au moment de la naissance et de garantir la véracité des déclarations des uns et des autres, en recourant au droit pénal. Le jury s’est montré extrêmement circonspect à l’égard de la proposition qui, en termes de modèle social, paraît en très forte rupture avec les traditions françaises en la matière.

Il me semble qu’une autre piste pourrait être envisagée, qui serait de repenser l’adoption intrafamiliale, en particulier l’adoption de l’enfant du conjoint. Si cette voie était plus facile, il y aurait peut-être une plus grande conformité entre les modèles. Le titre VII correspond à un fondement biologique et le titre VIII, l’adoption, repose sur la volonté. C’est vrai que cette volonté va parfois être difficile à mettre en œuvre, d’abord parce qu’on exige toujours qu’il y ait un mariage entre les deux personnes qui élèvent l’enfant, la mère et celui qui exerce de facto la situation de père. Faut-il maintenir cette exigence d’un mariage en matière d’adoption ? Ce n’est tout de même plus si évident que cela.

Nous aurions peut-être déjà là un signal de souplesse à l’égard de l’adoption de l’enfant du conjoint, au sens large, c’est-à-dire de l’enfant de la personne avec qui l’on vit.

Peut-être même pourrions-nous envisager que lorsque le conjoint au sens large s’est occupé depuis de nombreuses années de l’enfant, le caractère judiciaire de l’adoption ne s’imposerait pas forcément.

C’est vraiment une piste que j’avance mais peut-être que nous pourrions avoir un assouplissement des procédures d’adoption, lorsqu’une personne qui est le conjoint de l’autre parent s’est occupée de l’enfant pendant trois ou cinq ans et qu’il n’existe évidemment pas déjà de deuxième parent en droit.

Sur la dimension autorité parentale, j’ai presque préconisé tout à l’heure mais je peux le faire un petit peu plus. La question principale, en matière d’égalité entre les femmes et les hommes, est celle de la charge des enfants. Cette question pourrait donc donner lieu à une réforme en posant clairement le principe que la responsabilité des enfants doit être également partagée entre les parents, cette responsabilité se traduisant également en matière de résidence habituelle de l’enfant.

Évidemment, cela ne peut qu’être un principe qui appellera un certain nombre d’exceptions. Mais il serait déjà bien de poser en principe que chacun des parents doive assumer sa charge dans sa responsabilité de parent au quotidien. Ce serait déjà un signal législatif qui n’est pas anodin. Par ailleurs, cela conduirait aussi à demander à chacun de s’expliquer sur les raisons pour lesquelles il estime ne pas pouvoir assumer cette charge. À cet égard, il faut quand même reconnaître que dans la pratique judiciaire et même dans la littérature générale, on pose comme une évidence que la moindre disponibilité est un argument pertinent pour qu’un parent n’assume pas ses responsabilités. Il a un travail extrêmement prenant donc il ne peut pas assumer la résidence habituelle de l’enfant. Oui, mais nous pourrions aussi inverser les choses : elle n’a pas un travail extrêmement prenant parce que depuis cinq ans, elle élève les deux enfants en question. Là encore, on va valider un certain nombre d’arguments comme des évidences. En fait, c’est la convention de genre qui est répartie et qui fait peser la charge quotidienne des enfants, essentiellement sur les femmes. Cette convention est totalement intégrée et acceptée à travers ces arguments judiciaires.

Je crois que nous pourrions imposer un effort argumentatif pour que le parent qui souhaite se libérer de sa responsabilité, si nous voulons modifier les termes dans lesquels la question est traditionnellement posée, soit admis à le faire, qu’il explique vraiment pourquoi assumer cette responsabilité lui est impossible. Nous verrions peut-être que dans de nombreuses hypothèses, c’est en réalité possible. À cet égard, je précise deux éléments. Évidemment, la réforme du divorce modifie beaucoup la donne, puisqu’en réalité, il va y avoir des hypothèses dans lesquelles la question de la résidence habituelle de l’enfant ne donnera pas lieu à une décision judiciaire.

Si vous avez, par hypothèse, un divorce sans juge, c’est la convention qui va intégrer cette question de la résidence habituelle des enfants, sans qu’il y ait le moindre contrôle sur ce point.

Le modèle selon lequel il y a un principe dont le juge serait le garant ne peut plus fonctionner avec l’adoption, sous forme d’amendement, dans une loi beaucoup plus vaste, de la réforme du divorce.

Je voudrais insister sur un deuxième élément. Cela fait plusieurs fois que cette idée d’adoption d’un modèle de la résidence alternée émerge. Tous ces débats sont toujours pollués par la question des violences. Évidemment, la question des violences est fondamentale. On ne peut que se réjouir que la question des violences de genre et en particulier des violences au sein du couple ait pris une telle importance dans le débat social, et que le législateur s’en soit à ce point saisi. Il n’en demeure pas moins que, même si le phénomène des violences intra-conjugales est un phénomène quantitativement massif, je ne crois pas qu’il soit majoritaire. Il me semble qu’il est possible de penser à un droit commun qui pose ce modèle d’une égale responsabilité. Par ailleurs, il faut admettre des exceptions qu’Amélie Dionisi-Peyrusse et moi avions suggérées à la suite des textes relatifs à l’ordonnance de protection. Cela consiste à dire qu’il y a tout un ensemble de règles dans le code civil qui régissent la question des effets des violences. Même formellement, il faut dire que ce n’est pas du droit commun de l’autorité parentale, c’est un champ d’intervention et de questionnement particulier.

J’ai beaucoup travaillé sur le sujet et je suis extrêmement sensible à la question des violences au sein du couple. Néanmoins, je ne suis pas sûr que nous devions penser de manière générale les questions d’autorité parentale au regard de cette hypothèse qui existe, qui est massive, mais qui est minoritaire. Après, c’est plus délicat à formuler, l’articulation est compliquée. Je vous enverrai le texte.

Mme Nathalie Elimas, rapporteure. Concernant les violences et l’autorité parentale, il est vrai que ce sujet est au cœur de nos débats en ce moment, mais je ne crois pas, en tout cas, qu’il soit à ce stade perçu comme étant généralisable. Il s’agit bien là d’une exception, tel que c’est pensé aujourd’hui, notamment à l’issue du Grenelle. On s’interroge pour savoir si le mari violent est ou non un bon père. La réflexion est là. Vous avez évoqué la question de généraliser, mais je crois qu’il faut vraiment l’aborder uniquement sous l’angle de l’exception, dès lors que c’est vérifié.

M. Marc Pichard. Je n’ai pas mon code sur moi, à ma connaissance, ce n’est pas le cas formellement, actuellement. Je ne retrouve pas le numéro exact du texte du code civil. Dans tous les critères qui doivent guider le juge en matière d’autorité parentale, vous avez une liste qui va par exemple indiquer qu’il faudra prendre en considération les pratiques antérieures. Vous avez dans la liste les violences à l’égard de l’autre parent. C’est donc actuellement formellement construit comme un élément du droit commun. Cela conduit d’ailleurs à mon sens à un effet de minoration des violences. C’est-à-dire que cela fait partie des éléments à prendre en considération, cela fait partie d’une liste. C’est peut-être quelque chose de très universitaire, mais le mettre dans la liste nous paraissait être un choix législatif assez embarrassant. L’idée d’avoir un corps de règles spéciales au sein du code civil pour les violences, à la suite de l’ordonnance de protection, nous semblerait être un choix législatif qui dirait très clairement que le législateur se saisit de la question, mais qu’il ne s’en saisit pas comme un élément parmi d’autres pour penser l’autorité parentale.

M. Gilles Lurton, vice-président. Merci beaucoup M. Pichard pour cette audition que j’ai prise en cours, mais qui était extrêmement intéressante et qui enrichira certainement le rapport que nous prépare notre rapporteure.

L’audition s’achève à quinze heures cinq.


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