Question sur les morts de la rue

Journal officiel de la République française, édition « Débats parlementaires – Sénat », nº 28 S (Q), 11 juillet 2019

La Gontrie (Marie-Pierre, de), Question écrite nº 9968 au ministre chargé de la ville et du logement sur les morts de la rue [Journal officiel de la République française, édition « Débats parlementaires – Sénat », nº 15 S (Q), 11 avril 2019, pp. 1924-1925].

Marie-Pierre de La Gontrie (© D.R.)

Marie-Pierre de La Gontrie (© D.R.)

Mme Marie-Pierre de La Gontrie attire l’attention de M. le ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ville et du logement, sur l’ampleur du nombre de décès de personnes sans domicile en France en 2018.

En effet, le collectif « Les Morts de la rue » a dénombré 566 personnes sans domicile décédées en France en 2018, dont près de 100 dans la seule ville de Paris. Elle recensait en 2017 et les années précédentes autour de 510. Ces chiffres ne peuvent pas laisser indifférents et nécessitent une action forte. Chacune de ces morts le rappelle : l’urgence ne cesse de s’accroître.

Les décomptes réalisés notamment à Paris, à l’occasion de la nuit de la solidarité, font état d’une augmentation du nombre de personnes à la rue entre février 2018 et février 2019, dont 12 % de femmes.

À Paris, 3 000 nouvelles places d’hébergement d’urgence ont été créées à l’initiative de la ville, qui agit sur le plan de l’urgence sociale comme sur l’ensemble des domaines permettant de lutter en amont contre l’exclusion, tels que l’accès au droit, la santé, l’insertion et le retour à l’emploi.

Mais les moyens déployés par l’État, responsable de l’hébergement d’urgence, s’ils sont bien en hausse, sont toujours insuffisants. Les associations s’inquiètent d’ailleurs du fait que, d’une année sur l’autre, les budgets ne couvrent pas les dépenses réelles liées à l’hébergement d’urgence. Elles s’inquiètent également des diminutions de crédits des centres d’hébergement et de réinsertion sociale, structures permettant l’accueil des personnes en difficulté dans une perspective de réinsertion.

Malgré la volonté exprimée par le Président de la République, en 2017, d’« apporter un toit à toutes celles et ceux qui sont aujourd’hui sans abri », force est de constater qu’à ce jour, elle ne s’est pas traduite par une diminution du nombre de personnes en situation de rue.

Elle souhaite donc savoir quels dispositifs le Gouvernement entend mettre en œuvre, et dans quels délais, pour permettre de réduire enfin le nombre de personnes en situation de rue et le nombre de décès directement liés à la grande précarité.


Réponse du ministère de la Cohésion des territoires et des Relations avec les collectivités territoriales – Ville et logement publiée dans le Journal officiel de la République française, édition « Débats parlementaires – Sénat », nº 28 S (Q), 11 juillet 2019, p. 3744.

Julien Denormandie (© Jacques Paquier)

Julien Denormandie (© Jacques Paquier)

Une attention particulière est portée par les services de l’État quant aux actions menées par cette association le collectif « Les Morts de la rue », notamment en ce qui concerne l’accompagnement des proches et travailleurs sociaux suite au décès d’une personne sans domicile fixe et l’organisation de funérailles de personnes isolées. À ce titre, ce collectif bénéficie annuellement d’une convention de subvention financée par le programme 177, à hauteur de 50 000 € en 2019. L’objectif de ne plus y avoir de femmes et d’hommes à la rue correspond à un engagement fort du Gouvernement, conformément au discours du Président de la République du 27 juillet 2017. C’est pourquoi la politique de l’hébergement a bénéficié ces dernières années de dotations budgétaires en augmentation constante pour s’établir à 1,86 Md€ en loi de finances pour l’année 2019. Ce budget finance notamment un parc d’hébergement généraliste qui a augmenté de façon significative pour atteindre plus de 147 000 places au 31 décembre 2018 (enquête sur les capacités d’accueil, d’hébergement et d’insertion réalisée par la direction générale de la cohésion sociale), soit une augmentation de 53 % depuis 2013. À Paris, l’enquête sur les capacités d’accueil, d’hébergement et d’insertion de décembre 2018 a plus spécifiquement permis d’identifier 30 850 places pérennes d’hébergement généraliste financées par le programme 177 dans le département. En fin d’hiver 2018-2019, pour éviter les remises à la rue, le Gouvernement a également fait le choix de pérenniser 6 000 places hivernales sur l’ensemble des territoires, qui pourront désormais être ouvertes tout au long de l’année. Parmi ces places, 2 200 ont été pérennisées dans la région Île-de-France sur la base des besoins qui ont été identifiés par les services de l’État et les acteurs associatifs. Malgré ce nombre de places croissant, le parc d’hébergement ne peut répondre structurellement à l’ensemble des besoins de publics vulnérables à la rue. Afin de privilégier le développement de solutions pérennes de retour au logement et de renoncer à la multiplication de réponses d’hébergement de court terme, le Gouvernement a fait de l’accès au logement une priorité, déclinée à travers le plan quinquennal de lutte contre le sans-abrisme et pour le logement d’abord. Ce plan se matérialise notamment à travers la prévention des expulsions locatives, le financement de 40 000 logements très sociaux (prêt locatif aidé d’intégration) par an, la création sur cinq ans de 40 000 places en intermédiation locative par la mobilisation du parc privé et de 10 000 places en pensions de famille pour les personnes isolées en situation de grande précarité. Il s’agit de mettre en place une réforme structurelle de l’accès au logement des personnes sans domicile, tout en maintenant un effort de croissance du parc d’hébergement d’urgence permettant de répondre aux situations de détresse. S’agissant des centres d’hébergement et de réinsertion sociale (CHRS), une forte hétérogénéité a pu être constatée dans les crédits attribués aux structures. C’est pourquoi le Gouvernement a mis en place en 2018 des tarifs harmonisés, afin de garantir un financement équitable à prestations égales, ce qui a entraîné un objectif de baisse des charges pour les établissements situés au-dessus du tarif plafond. L’arrêté du 2 mai 2018, fixant les tarifs plafonds prévus au deuxième alinéa de l’article L. 314-4 du code de l’action sociale et des familles applicable aux établissements mentionnés au 8º du I de l’article L. 312-1 du même code au titre de l’année 2018, fixe les tarifs applicables aux groupes homogènes d’activité et de missions (GHAM) par place autorisée et financée. Enfin, dans le cadre de la stratégie nationale de prévention et de lutte contre la pauvreté, 20 millions d’euros sont employés en 2019 en faveur de mesures d’hébergement ou d’accompagnement vers le logement. 10 millions d’euros sont notamment mobilisés pour abonder en 2019 les dotations des CHRS dont le projet d’établissement entre en cohérence avec les priorités de la stratégie et qui accueillent l’un des publics suivants : familles, notamment monoparentales, sortants d’institution, femmes victimes de violence. L’ensemble de ces projets portés par l’État montre sa détermination à trouver une solution à toutes les personnes à la rue.


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