Question sur les déplacements illicites d’enfants français

Journal officiel de la République française, édition « Débats parlementaires – Sénat », nº 17 S (Q), 25 avril 2019

Deromedi (Jacky), Question écrite nº 8462 au ministre de l’Europe et des affaires étrangères sur les déplacements illicites d’enfants français [Journal officiel de la République française, édition « Débats parlementaires – Sénat », nº 3 S (Q), 17 janvier 2019, p. 221].

Jacky Deromedi (© D.R.)

Jacky Deromedi (© D.R.)

Mme Jacky Deromedi attire l’attention de M. le ministre de l’Europe et des affaires étrangères sur les difficultés rencontrées par les parents français d’enfants franco-japonais emmenés par leurs conjoints japonais au Japon et dont ils ne parviennent pas à retrouver la garde ou auxquels est dénié un droit de visite. Les associations de parents français estiment que la ratification par le Japon de la convention de La Haye du 25 octobre 1980 sur les aspects civils de l’enlèvement international d’enfants en 2014 n’a pas changé la situation. Pire, cette convention serait maintenant utilisée pour « légaliser » des déplacements illicites. Les parents qui tentent de protéger leurs enfants de ces déplacements illicites au Japon tentent d’engager des actions civiles ou pénales devant des juges français qui ne sont pas correctement informés de la non-réciprocité dans l’application de cette convention par le Japon. Ces associations estiment que le nombre estimé d’enfants franco-japonais enlevés est important, bien au-delà de la dizaine évoquée dans les relations diplomatiques. Les parents victimes doivent supporter un coût financier énorme pour des procédures qui, du fait de leur conception, n’aboutiront pas à la réunification. Au-delà du coût financier, les dégâts affectifs et moraux sont considérables. Elle lui demande, en conséquence, de bien vouloir lui faire connaître quelles démarches le Gouvernement entend effectuer auprès des autorités japonaises afin de faire avancer cette question si douloureuse pour les familles.


Réponse du Ministère de l’Europe et des affaires étrangères publiée dans le Journal officiel de la République française, édition « Débats parlementaires – Sénat », nº 17 S (Q), 25 avril 2019, p. 2281.

Jean-Yves Le Drian (© Pymouss)

Jean-Yves Le Drian (© Pymouss)

En France, c’est le ministère de la justice (bureau du droit de l’union, du droit international privé et de l’entraide judiciaire – BDIP) qui a été désigné comme autorité centrale chargée de la mise en œuvre de la Convention de La Haye du 25 octobre 1980 sur les aspects civils de l’enlèvement international d’enfants. Dans les cas qui relèvent de cette convention, le ministère de l’Europe et des affaires étrangères intervient en soutien de l’action du ministère de la justice et accompagne les parents, au titre de la protection consulaire, lorsqu’ils en font la demande. La convention de La Haye de 1980 s’applique lorsqu’un enfant a été déplacé illicitement de la France vers un pays tiers contractant ou lorsqu’un parent ayant sa résidence dans un autre pays que celui de l’enfant souhaite voir reconnus ou respectés ses droits de visite et d’hébergement. Depuis l’entrée en vigueur au Japon le 1er avril 2014 de la convention de La Haye du 25 octobre 1980, l’autorité centrale française a saisi l’autorité centrale japonaise d’un total de onze dossiers (dont sept concernant des déplacements illicites d’enfants et quatre relatifs à des droits de visite et d’hébergement). Plusieurs de ces cas sont aujourd’hui clôturés. À ce jour, un dossier de déplacement illicite d’enfants et un dossier concernant des droits de visite et d’hébergement restent en cours de traitement. Les autres cas – à savoir les déplacements illicites d’enfants intervenus avant l’entrée en vigueur de la convention, les déplacements d’enfants à l’intérieur du territoire japonais sans dimension d’extranéité ou les conflits familiaux relatifs à des difficultés d’exercice des droits de visite et d’hébergement entre parents résidant au Japon – ne relèvent pas de la Convention de La Haye de 1980. Dans les deux derniers cas, ce sont les juridictions japonaises qui sont compétentes pour statuer sur le fond, en raison de la résidence habituelle au Japon. Les services de ce ministère apportent alors leur soutien au parent victime au titre de la protection consulaire telle que prévue par la convention de Vienne sur les relations consulaires du 24 avril 1963. Ainsi, une liste de notoriété des avocats spécialisés en droit de la famille peut lui être communiquée et une tentative de prise de contact avec l’autre parent peut être initiée dans l’objectif de faciliter une reprise de la communication et de solliciter son accord pour organiser une visite consulaire au domicile de l’enfant et ainsi s’enquérir de ses conditions de vie matérielles. La médiation reste en effet souvent la voie à privilégier pour le parent victime, tout particulièrement au Japon où des moyens importants d’aide à la médiation ont été mis en place, via le ministère de la Justice. En France, la Cellule de médiation familiale internationale (hébergée au sein de l’autorité centrale) peut apporter son concours en vue de favoriser un accord amiable entre les deux parents. Chaque situation est naturellement unique et, au-delà des parents, ce ministère a à cœur de préserver l’intérêt supérieur des enfants. Toutefois, il convient de rappeler que les autorités françaises ne sont pas compétentes pour faire exécuter une décision française sur le territoire japonais. Les parents souhaitant faire reconnaître et exécuter une décision de justice française au Japon, doivent donc procéder, avec l’aide d’un avocat, à l’exequatur de cette décision au Japon. Enfin, une réflexion spécifique aux affaires de conflits familiaux au Japon est actuellement menée par le ministère de l’Europe et des affaires étrangères afin d’explorer les possibilités de faciliter la résolution de ces situations douloureuses en lien avec les autorités japonaises, et ce dans l’intérêt supérieur des enfants.


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