Question sur les conséquences de divorces suite à des mariages franco-allemands

Journal officiel de la République française, édition « Débats parlementaires – Assemblée nationale », nº 15 A.N. (Q), 9 avril 2019

Wonner (Martine), question écrite nº 8941 à la ministre de la Justice sur les conséquences de divorces suite à des mariages franco-allemands [Journal officiel de la République française, édition « Débats parlementaires – Assemblée nationale », nº 23 A.N. (Q), 5 juin 2018, pp. 4670-4671].

Martine Wonner (D.R.)

Martine Wonner (D.R.)

Mme Martine Wonner appelle l’attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur le sort de certains parents français se retrouvant privés de leurs enfants à la suite d’un divorce. Sur les quelques 50 000 mariages franco-allemands par an, un tiers en effet s’achève par un divorce et des décisions de justice sur la garde des enfants du couple. Malgré de nombreuses décisions de tribunaux français en sens inverse, les juridictions allemandes attribuent quasi systématiquement l’autorité parentale au parent allemand résidant sur le territoire allemand. En Allemagne intervient alors le Jugendamt, service social allemand d’aide à l’enfance, qui viole les droits les plus élémentaires et les conventions internationales en procédant à un enlèvement d’enfant. Enlèvement qui se trouve légitimé a posteriori avec la complicité de la justice allemande au nom de « l’intérêt supérieur de l’enfant ». Le parent français se retrouve également dans bien de nombreux cas interdit d’entrer sur le territoire allemand, par l’intermédiaire de mandats d’arrêt nationaux émis à leur encontre. Une commission parlementaire franco-allemande de médiation, qui a cessé ses activités en 2005 à l’initiative de l’Allemagne, avait été mise en place pour tenter de résoudre cette situation. 13 ans plus tard, des parents français se trouvent encore privés de leurs enfants. En conséquence, elle lui demande quelles sont les actions du Gouvernement quant aux moyens à mettre en œuvre pour empêcher ces drames familiaux.


Réponse du ministère de la Justice publiée dans le Journal officiel de la République française, édition « Débats parlementaires – Assemblée nationale », nº 15 A.N. (Q), 9 avril 2019, p. 3293.

Nicole Belloubet (© Guillaume Paumier)

Nicole Belloubet (© Guillaume Paumier)

Les situations de séparation parentale dans le cas de couples bi-nationaux sont particulièrement sensibles. En effet, à la complexité des situations humaines s’ajoutent celle des questions juridiques, notamment en ce qui concerne la détermination de la juridiction compétente ou celle de la loi applicable. Les services de l’État français n’ignorent pas que certains parents se plaignent d’une discrimination résultant de l’application de la loi allemande par les juridictions allemandes et de l’intervention, dans le cadre des procédures se déroulant en Allemagne, des services sociaux allemands (« Jugendamt », Office de la Jeunesse). À ce sujet, le Parlement européen a d’ailleurs récemment adopté une résolution sur le rôle du « Jugendamt » dans les litiges familiaux transfrontières (résolution 2018/2856 du 29 novembre 2018). Les problématiques en lien avec les couples mixtes franco-allemands ont donc été évoquées lors de réunions dédiées rassemblant les ministères en charge de la justice et des affaires étrangères français et allemand en 2011 et 2014. Il en a été conclu qu’il n’existait pas de législation ou de pratiques manifestement contraires aux droits des parents étrangers en Allemagne. Néanmoins, ces situations font l’objet d’un suivi attentif du ministère de la justice. Il ne saurait évidemment être question d’influer sur le fonctionnement de la justice d’un État étranger souverain, ou d’intervenir dans le cours des procédures judiciaires. Mais les instruments juridiques existants en matière familiale, à savoir la convention [de] La Haye du 25 octobre 1980 sur les aspects civils de l’enlèvement international d’enfants et le règlement européen CE 2201/2003 du 27 novembre 2003, sont quotidiennement mobilisés pour apporter aux parents français tout le soutien possible. L’autorité centrale française désignée par la mise en œuvre de ces conventions peut ainsi être saisie dans le cadre de litiges transfrontaliers, afin notamment de fournir des informations générales concernant le droit allemand, tenter de lever les obstacles rencontrés dans l’application des conventions, et faire des demandes de coopération à son homologue allemande. La présence d’un magistrat de liaison français en poste en Allemagne et inversement permet également de favoriser l’entraide judiciaire internationale entre nos deux pays. Enfin, sur un plan pédagogique, un projet de brochure explicative des droits de la famille français et allemands, destiné à faciliter la compréhension mutuelle des systèmes de droit des deux États pour les couples binationaux, est actuellement en cours d’élaboration.


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