Présidentielles 2017 : Marine Le Pen et l’égalité parentale

Marine Le Pen (© Foto-AG Gymnasium Melle)

Candidate à la présidence de la république, Marine Le Pen a répondu aujourd’hui à quatre associations de pères séparés de leurs enfants qui l’interrogeaient sur le thème de l’égalité parentale.

Toutes choses égales par ailleurs, cette réponse est particulièrement importante puisque la vie de son auteur est profondément marquée par le divorce. Ses parents, Jean-Marie et Pierrette, se sont séparés en 1984 alors que Marine avait dix-sept ans.

« La cellule familiale […] éclate un mercredi de septembre 1984. [Sa sœur] Yann lui annonce : “Maman est partie.”

« L’univers de Marine s’écroule : “Je vais passer des semaines, des mois à attendre. En vain.” Au lieu de la voir, elle va entendre sa mère “dire des horreurs sur son mari” dans tous les médias. Elle prend alors la plume pour demander au juge d’accorder le droit de garde à son père. “Le Menhir” et ses filles se soudent définitivement contre le reste du monde. »

Martin (Julien), Thierry (Maël), « Marine Le Pen, l’enfance de la “fille du diable” », Le Nouvel Observateur, 8 janvier 2012.

Playboy, nº 23, juillet 1987Le divorce est finalement prononcé le 18 mars 1987. L’événement est très médiatisé, notamment lorsque le magazine Playboy (nº 23, juillet 1987) publie des photographies de Pierrette Le Pen nue. La jeune Marine le vit bien sûr très mal et qualifie alors sa mère de « décharge publique » : « Une mère, c’est un jardin secret, pas une décharge publique » (Paris Match, nº 1988, 3 juillet 1987).

À la une de Paris Match, nº 1988, 3 juillet 1987

À la une de Paris Match, nº 1988, 3 juillet 1987

 

En juin 1997, Marine Le Pen épouse Franck Chauffroy. Trois enfants sont nés de ce mariage : Jehanne en 1998, et des jumeaux, Louis et Mathilde, en 1999. Marine divorce en avril 2000, puis se remarie en décembre 2002 avec Éric Iorio, dont elle divorce également en juin 2006. Depuis 2009, elle a pour compagnon Louis Aliot, lui-même divorcé et père de deux enfants (vivant avec leur mère à Toulouse).

C’est dire si la candidate du Front national à la prochaine élection présidentielle est une spécialiste du sujet ! Son courrier est d’autant plus décevant, bien qu’il ne puisse susciter d’étonnement quand on se souvient des déclarations de Florian Philippot, vice-président du Front national, après le coup d’éclat de notre camarade Serge Charnay à Nantes en février 2013 :

« Pères séparés : le FN dénonce une précipitation hasardeuse du gouvernement

« Le FN a critiqué mardi un “chantage médiatique” du père séparé de son enfant qui a manifesté sur une grue à Nantes et une “précipitation hasardeuse” du gouvernement dans ce dossier.

« “Le gouvernement a-t-il eu raison de recevoir les associations de pères divorcés dans la foulée de cette initiative ?” a demandé I-Télé au responsable Florian Philippot, vice-président du Front national. “Non, je ne crois pas. Cette opération grue est tout de même curieuse”, a-t-il répondu. “Ça ressemble à une sorte de chantage médiatique, je n’aime pas beaucoup ça ».

« La présidente du FN Marine Le Pen “n’a pas été reçue par Jean-Marc Ayrault sur la guerre au Mali, pas reçue par Manuel Valls sur la réforme des élections”, a observé M. Philippot. “Peut-être faudrait-il qu’elle monte dans une grue pour être écoutée, entendue, reçue.”

« “Il y a une précipitation du gouvernement qui me semble hasardeuse et pas conforme à nos principes républicains. On ne fait pas de chantage comme ça sur le gouvernement”, selon l’élu frontiste.

« Pour lui, les pères divorcés “se sont trouvé un bien mauvais ambassadeur”.

« La législation actuelle lui paraît “assez équilibrée” , “les problèmes des familles sont souvent ailleurs” et “il faut privilégier pour les couples divorcés les résolutions à l’amiable” qui, à ses yeux, ne passent pas par la garde alternée.

« Serge Charnay, un père séparé retranché depuis vendredi sur une grue de Nantes pour réclamer le droit de voir son fils, en est descendu lundi après une réunion à Paris entre la ministre de la Justice Christiane Taubira et des associations de défense des droits des pères. »

AFP, 19 février 2013.

Reconnaissant « qu’il existe un déséquilibre lié aux décisions de justice sur l’attribution de la garde » et que « de fait, trop souvent, beaucoup de pères se retrouvent éloignés de leurs enfants », celle qui se targue d’avoir « élevé seule trois enfants » n’en pense pas moins qu’« inscrire la garde partagée comme solution par défaut dans la loi ne [lui] paraît pas nécessairement la bonne solution ». Rappelons en passant que la notion de « garde » a disparu du vocabulaire juridique français avec la loi nº 87-570 du 22 juillet 1987 sur l’exercice de l’autorité parentale, dite « loi Malhuret ». Il est fort dommage qu’une « candidate à la présidence de la République », avocate de formation, l’ignore.

« Mener des actions de formation et de sensibilisation auprès des juges » est sans aucun doute une nécessité, et urgente, mais restera un vœu pieux si la loi ne fixe aucun cadre et laisse le juge aux affaires familiales « souverain dans sa décision », euphémisme bien connu pour évoquer l’arbitraire des magistrats. Comment un juge pourra-t-il « déterminer ce qui convient le mieux » à un enfant dont il ne connaît rien si « l’intérêt supérieur de l’enfant » n’est nulle part défini ?

Enfin, si Marine Le Pen s’engage à « [donner] au système judiciaire plus de moyens » afin, entre autres choses, « que les juges aient le temps nécessaire pour étudier les dossiers », elle se garde bien de préciser le coût de cette mesure, les ressources budgétaires afférentes, et le temps requis pour sa mise en œuvre…

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