Bonjour les pères pédophiles, les pères attoucheurs, violents et abandonniques !

Allocution de Philippe Veysset, Président du Collectif La Grue jaune, prononcée à l’occasion de la troisième Marche pour l’égalité parentale à Paris

La grue jaune

Philippe Veysset (© D.R.)

Philippe Veysset (© D.R.)

Bonjour les pères pédophiles, les pères attoucheurs, violents et abandonniques !

Bonjour les mères indignes, brutales et possessives !

Bonjour les enfants-personnes qui, librement, choisissent de ne plus voir leur papa !

Librement c’est-à-dire : après avoir été soigneusement et minutieusement manipulés et instrumentalisés, et donc niés comme personne !

Et d’abord : bonjour les victimes d’un système devenu machine à fabriquer de la souffrance et à broyer les parents !

Quel bonheur de se retrouver ensemble après une année où les actions se sont clairsemées et où les déchirements ou tiraillements entre associations, hélas, ne se sont guère apaisés.

Tout à l’heure, espérons-le, nos amis de Père Enfant Mère nous rejoindront et notre famille sera au complet, le bonheur sera alors total.

Pourquoi sommes-nous rassemblés aujourd’hui ? Nous sommes rassemblés aujourd’hui, papas et mamans, jeunes et moins jeunes, parents et enfants, d’abord parce que nous éprouvons tous le même sentiment d’injustice et de révolte face à une machine judiciaire devenue folle.

État de la situation

Le problème central de la machinerie judiciaire, c’est l’incompétence. Les juges, les avocats, ces juristes en mal de gains faciles et de reconnaissance sociale, ne disposent pas de la compétence requise pour démêler l’écheveau des responsabilités d’une séparation familiale, ni distribuer les responsabilités quant à l’éducation à venir de l’enfant.

Elles et ils n’en disposent pas parce qu’elles et ils ne souhaitent pas en disposer. À la base de toute formation, de toute acquisition de compétence, il y a un pacte éducatif entre celui qui forme et celui qui est formé. Il fait ici défaut. Les personnes préfèrent les moyens répressifs, le rapport de force où elles peuvent faire la démonstration – infantile peut-être – de leur pouvoir. Il y a un fantastique ego judiciaire qui sous couvert d’autorité de la chose jugée et de sauvegarde de l’autorité morale, refuse obstinément de se remettre en question.

Lorsque l’erreur est avérée, les personnes préfèrent, dans une fuite en avant souvent fatale à l’enfant, et qui flatte sans retenue la vanité du parent gardien, bâtir l’image d’un père violent ou attoucheur, d’un père délinquant, d’un père coupable au fond d’avoir donné la vie (au cours d’un acte sexuel lui-même répréhensible ?).

Accusation et, souvent, condamnation de pères innocents ou de pères provoqués par l’iniquité d’une première enquête, d’une première décision, à commettre un geste transgressif, exonération d’une mère construite comme un sainte icône quelle que soit l’ampleur de ses propres délits, telles sont les conséquences directes de l’incapacité du personnel judiciaire à se mettre en cause.

Comment des personnes qui souffrent d’une telle incompétence seraient-elles à même d’évaluer la compétence éducative d’autrui ?

Nous touchons au deuxième problème : celui du racisme judiciaire. Il faut le dire clairement : il y a des discriminations racistes dans une majorité de décisions de justice. Des critères biologiques prévalent.

Certes, le biologique a sa noblesse mais lorsqu’il devient le seul ressort pour juger d’un enjeu éducatif, ce n’est plus que de l’infantilisme. Le droit du ventre est la négation même du droit comme acte consensuel, comme acte de culture.

Il s’agit d’un acte de racisme primaire. Dans le racisme ordinaire, on gomme les différences individuelles, trop nombreuses – ouille, ouille ouille mon cerveau ! – et on creuse par compensation les différences entre les groupes qu’on oppose les uns aux autres : il y a les blancs, les jaunes, les noirs, les arabes, les juifs, les roms, etc. Mais ici, c’est bien plus simple ! Il n’y en a que deux : le vilain monsieur et la gentille madame ! Ainsi le fantasme raciste prend-il chair.

Bien sûr, de temps à autre, pour se donner bonne conscience, ou quand l’affaire est médiatisée, on sacrifie une mère, une femme, sur l’autel de l’égalité républicaine ou d’un faux-semblant de justice. Mais cela ne va jamais plus loin. Poudre aux yeux !

La Constitution de notre France, en son préambule et en son article 2, réprouve les discriminations selon le genre, le décret Marchandeau les combattent. Pourquoi y a-t-il aujourd’hui si peu d’élus dans nos rangs, si peu qu’il n’y en a aucun ? Dans le combat d’amendement qui s’annonce à la rentrée et plus tard, il faudra bien que les représentants du peuple prennent, elles et eux aussi, leur responsabilité.

Incompétence et racisme sont les deux mamelles de la justice. Le lait en est bien amer.

On voit… des enfants qui grandissent avec des contacts si espacés avec leur papa qu’ils le reconnaissent à peine quand ils le revoient ! Passé l’âge de dix-huit ans, 40 % des enfants du divorce ne voient plus jamais leur papa. Le petit garçon est privé de modèle et un Œdipe durable s’instaure ; quant à la fillette, elle n’aura pas d’objet libidinal sous les yeux et sa représentation du masculin sera marquée au coin d’une déficience durable, voire pérenne, occasionnant toujours plus de divorces… Comment, dans de telles conditions, se construire une image de soi satisfaisante, un visage ?

Est-ce que je mens ?

On voit… des beaux-pères violents dont les méfaits restent impunis et qui se trouvent dotés – pour une période parfois si brève – de pouvoirs incroyables sur l’enfant.

Est-ce que je mens ?

On voit… des pères dont, après vingt-six ou vingt-sept délits de non-représentation d’enfant, le droit de visite et d’hébergement est supprimé ! Ou bien, comme on vient de le voir à Orléans, qui sont incarcérés parce qu’ils se révoltent contre cet état de fait. « Je n’arrive pas à faire respecter votre droit de visite, autant vous le supprimer ! » déclarera une magistrate courageuse.

Est-ce que je mens ?

On voit des mères qui soustraient leur enfant à l’autre parent par un éloignement géographique volontaire ou des non-représentations d’enfant réitérées, et ne sont jamais inquiétées, ou sont condamnées à des peines très légères, tandis qu’un père qui commet le même délit en prend pour vingt ans de prison ferme, comme on vient de le voir dans le Calvados.

Est-ce que je mens ?

On voit… des enfants abusivement placés et qui se retrouvent victimes d’abus sexuels ou de maltraitance de la part de leurs parents non-biologiques et parfois même tombent dans des réseaux pédophiles, parfois à leur tour couverts par l’institution judiciaire. Les disparues de l’Yonne, ce n’est pas si vieux. L’affaire de Zandvoort non plus. Ramené à de justes proportions, le lien biologique est gage d’affection et de tendresse à l’égard de l’enfant.

Est-ce que je mens ?

On voit… des crimes de viol commis dans la famille du parent gardien couverts par une justice complice qui n’hésite pas à réexposer l’enfant aux risques de flétrissure… pour faire souffrir l’autre parent.

Est-ce que je mens ?

On voit… des pièces détruites par des juges pour enfant ou par des juges de la famille lorsqu’elles n’ont pas l’heur de plaire. De tels actes, réprimés par le code pénal dans son article 432-15, ne le sont hélas que par lui, qui reste lettre morte, car les procédures de régulation interne ne fonctionnent pas.

On voit… des avocat(e)s diffamer « la partie adverse » sans que l’autre avocat en réfère au Conseil de l’Ordre, laissant flétrir la dignité de son client. Confrère, consœur d’abord ! Institution prime ! Quant au code de déontologie… son étendard flotte au vent comme au mât d’un bateau ivre.

Les irrégularités sur le droit abondent. Le contradictoire est souvent violé. Des pièces essentielles sont communiquées à la partie adverse cinq minutes avant l’audience, parfois par la magistrate ou le magistrat eux-mêmes ! Or, selon l’adage, « la forme est gardienne des libertés ».

Est-ce que je mens ?

Des recours hiérarchiques sont transmis à l’intéressé(e), les faux témoignages d’experts ou de policiers ne sont pas rares. Les inactions policières et judiciaires, même lorsque l’intégrité physique ou morale de l’enfant est menacée, sont légion. Des morts d’enfant, des lésions définitives, peuvent s’ensuivre. Les affaires Mona, Angèle et tant d’autres où le père avait effectué les signalements requis, sont là pour le rappeler. Des expertises permettant d’innocenter les pères sont écartées.

Est-ce que je mens ?

Des juges volent et font disparaître les dossiers, avec un infantilisme consommé, ils s’amusent en jonglant avec les audiencements, les enquêtes.

Des auditions d’enfant sont programmées sans que l’autre parent ait été averti, des avocats d’enfant, parfois très partiaux, sont commis sans que l’autre parent soit informé.

Est-ce que je mens ?

La manipulation de l’enfant n’est plus seulement le fait d’un parent malveillant mais de l’institution elle-même. Nous devons ici parler du traumatisme le plus profond que subit l’enfant du divorce, plus profond encore que celui occasionné par la dislocation de la cellule familiale : l’aliénation parentale. C’est un syndrome pathologique, isolé par Gardner en 1985, il y a trente ans. Par un lent travail de conditionnement qui, d’un bout à l’autre, nie l’autonomie de l’enfant et son droit à se construire, celui-ci voit son imago paternelle détruite et se voit « phagocyté » par l’autre parent, qui révèle au passage ses propres carences identitaires. Les vrais problèmes commencent lorsque l’institution judiciaire entérine ces pratiques, les valide et les encourage. Or bien des expertises honnêtes l’attestent, elle les encourage.

Est-ce que je mens ?

Et je n’ai pas parlé du démembrement de la justice par les intérêts privés : même lorsque la faculté de se dispenser d’un avocat est ouverte au justiciable par la loi, le juge sanctionne ce dernier voire, le cas n’est pas rare, déclare explicitement qu’il aurait dû prendre un avocat ! Et que dire des réseaux associatifs ou de facto qui ont, depuis des décennies, désarticulé le service public de la justice : réseaux maçonnique, pédophile, lesbien… Inutile d’entrer dans les thèses du Front national pour dénoncer les trafics d’influence qu’ils occasionnent. Il suffit d’être républicain et démocrate ! Passe-droit, protections, favoritisme, latitudinarisme dans l’interprétation des textes de loi… La plupart du temps, les membres de ces réseaux souffrent d’une surestimation de soi qui leur été léguée par la première figure d’attachement, c’est-à-dire, je me vois contraint de le dire, par leur mère.

Face à ces graves dérives ou exactions, le recours à des procédés internes de régulation échoue dans une immense majorité de cas : les prises à partie tombent à l’eau, les récusations aussi sont rejetées sous des prétextes futiles ou oiseux, voire absurdes.

Quant au Conseil supérieur de la magistrature, il suffit de se rendre sur son site pour apprendre qu’en 2011, sur 476 saisines, une seule a été accueillie – encore s’agissait-il d’un juge contestant l’action d’un autre – et en 2013, sur 272 (car forcément, entre-temps, le nombre a décru), 5 seulement ont été accueillies.

Lorsqu’il est recouru à d’autres institutions, on se heurte au sacro-saint principe constitutionnel de séparation des pouvoirs qui pourtant, suppose bien l’existence d’un pouvoir, d’un pouvoir donc qui ne soit pas automatiquement neutralisé par un autre. Du reste, le droit de grâce, les lois d’amnistie prouvent bien que la séparation des pouvoirs a ses limites.

Il ne reste donc que la rue, dernier espace de liberté ! En n’oubliant pas que l’opinion, très majoritairement, nous soutient, à 86 % selon une enquête effectuée il y a à peine deux ans.

Ébauches de solution

Alors, que faire ? Devons-nous nous asseoir au bord de la route et regarder passer la machine infernale ?

Reprenons d’abord, synthétiquement, l’analyse de la situation.

D’un côté, il est incontestable que la situation est mauvaise et même, très mauvaise :

  • Côté institution judiciaire, elle est catastrophique. Au terme de ce qui précède et forme encore, hélas, un tableau très incomplet, il n’est pas faux de parler de prévarication.
  • Les pouvoirs publics sont très judiciarisés, y compris la Présidence de la République.
  • Côté Parlement, quelques individualités, de droite ou de gauche, se sont déclarées en faveur de l’égalité parentale. Elles se comptent sur les doigts de la main.
  • Sociologiquement enfin, l’investissement – légitime bien sûr – du marché du travail par les femmes depuis (et grâce à) la Guerre n’a pas été balancé par un investissement de la sphère privée et domestique par les hommes.

Mais d’un autre côté, il y a bien des raisons d’espérer :

Évidemment, cette aventure de la paternité et de l’égalité parentale est aussi pour la plupart d’entre nous une aventure intérieure, ce qui la rend difficile, et parfois douloureuse.

Nous devons aller dans deux directions au moins.

Au plan légal, nous réclamons trois choses :

  • La première est l’inscription de l’égalité parentale dans la loi. Certes le principe d’égalité est inscrit au fronton de nos institutions républicaines et démocratiques : écoles, mairies… mais à l’évidence, cela ne suffit pas, ne suffit plus.
    Nous demandons que la déclinaison parentale du principe d’égalité soit inscrite dans la loi, qu’il soit écrit noir sur blanc qu’un père a autant de droits qu’une mère.
  • La deuxième est la résidence alternée de plein droit dès lors qu’un parent en forme la demande et que l’autre ne s’y oppose pas pour lui-même (c’est-à-dire en se jugeant lui-même incapable d’éduquer son enfant). La loi du 4 mars 2002 (loi Royal) doit trouver à s’appliquer dans bien plus que 16 % des cas, comme c’est le cas aujourd’hui. La résidence alternée, entendue comme parité de temps passé chez chacun des deux parents, doit devenir le principe de droit commun.
  • Enfin, pour appliquer le nouveau dispositif légal, nous demandons une déjudiciarisation du traitement des différends familiaux au profit de médiateurs familiaux formés, dont l’intervention serait obligatoire. Ces médiateurs existent déjà puisqu’une loi du 8 février 1995, les a portés sur les fonts baptismaux, il y a plus de vingt ans… Mais du fait des pressions exercées par le lobby des avocats sur des juges qu’il faut bien qualifier de dociles, elle n’est appliquée que dans… 2,5 % des cas !
    Nous rejoignons ici le modèle appliqué par un juge allemand de Cochem, le juge Rudolf, qui refusait de rendre une décision tant que les parents séparants ne s’étaient pas mis d’accord, par le truchement d’un médiateur, sur un régime de garde de l’enfant. Après bien des ennuis avec sa hiérarchie, il avait fini par obtenir gain de cause.
    Cette déjudiciarisation pourrait faire l’objet d’une loi organique.

Dans un tel contexte, que devient le juge ? Disparaît-il ? Il lui reste tout l’aspect du règlement des contestations relatives à la liquidation de la communauté et des biens, souvent épineux, même si, sur ce plan, l’intervention des notaires pourrait suffire, comme un projet de loi espagnol le suggère actuellement. Le problème des « plumages » et loin d’être négligeable et nous pensons qu’en cette matière le système judiciaire reste expert.

Et en cas de pépin ? diront certain(e)s (parent vraiment dangereux…). Nous pensons qu’il y en aura bien moins dès lors que le personnel de justice aura été écarté de la décision quant à l’enfant. En cas de litige persistant, nous proposons, sous l’égide des collectivités territoriales et dans l’esprit de ce qu’on nomme en droit la « symétrie des formes », l’intervention d’un arbitre de l’égalité parentale institué par la loi. Un exposé détaillé de cette proposition se trouve dans les huit propositions de la Grue jaune, qui figurent sur notre site.

D’autres enfin, diront que nous n’allons pas assez loin.

Pourquoi ne pas achever l’œuvre de 89, s’écrient-ils, et élire les juges, des juges qui seraient responsabilisés par leur possible non-réélection, comme ça existe déjà en Suisse ou aux États-Unis ? Pourquoi, déjà, ne pas les responsabiliser civilement et pénalement ?

Nous ne sommes évidemment pas hostiles à ces hypothèses mais il nous paraît préférable de commencer par des choses simples et l’urgence aujourd’hui, non seulement pour les parents et les enfants mais peut-être pour la France, est d’instaurer un service public garantissant à tous une justice impartiale dans l’intérêt de l’enfant, que les institutions ont, avec et après les parents, pour mission de protéger.

C’est dans ce contexte qu’il convient d’évaluer la proposition de loi APIE. Bien des polémiques ont eu lieu ces derniers jours. On nous a reproché d’être des collaborateurs du gouvernement, de défendre un texte exécrable, etc.

Nous sommes conscients des faiblesses, voire des lacunes de ce texte et même de ses trahisons par rapport à la belle promesse de 2013. Au sein même du texte, l’ordre des articles, leur teneur, bref le dispositif légal est à angle droit avec l’exposé des motifs, si alléchant et dans lequel la dignité des pères est reconnue, rétablie.

C’est une loi schizophrène !

Pour être (un peu) plus précis, disons que trois dispositions nous semblent intéressantes : la double domiciliation de l’enfant, bien qu’elle n’ait de portée que symbolique, est toujours bonne à prendre ; la contraventionalisation des délits de non-représentation d’enfant est bonne en principe mais constitue, en cas de non-paiement, un vrai « nid à contentieux » (comme par hasard…) sans compter que, fort étrangement, la représentation de l’enfant est couplée avec le versement de la pension alimentaire. Or la pension alimentaire disparaît, en général, en cas de résidence alternée… Il vaudrait mieux, ici, constituer un système d’amende en crédit de temps.

L’obligation de demander à l’autre parent son accord en cas de déménagement « au loin » est également un vrai « nid à contentieux » et risque d’être retoquée par le Conseil constitutionnel, comme atteinte à la liberté fondamentale d’aller et venir. Mieux vaut en ce cas prévoir que le parent qui reste garde l’enfant.

Enfin, le mandat éducatif donné au beau-père ne laisse pas d’inquiéter…

Face à ces quelques éléments positifs, aucune de nos revendications n’est accueillie :

  • L’égalité parentale n’est pas affirmée.
  • La résidence alternée n’est pas promue. Le terme même n’en est pas prononcé.
  • Les pouvoirs du juge sont renforcés et les médiateurs quasi-éjectés (lorsqu’elle est décidée, la médiation est prise en charge par l’État !).

Autant dire qu’un énorme travail de lobbying nous attend pour parvenir à amender cette loi. Avons-nous les moyens de le mener ? Oui, si nous serrons nos rangs ! Sinon…

Mais la solution n’est pas que légale et même, serais-je tenté d’ajouter, elle n’est pas d’abord légale.

Ce qu’il faut aujourd’hui, c’est redéfinir le métier de parent, c’est parentifier et surtout responsabiliser les parents.

Deux regards qui se croisent et « s’entendent » sur le don de la vie, deux paroles qui s’échangent dans la demi-clarté du soir, quelques gouttes de sperme dans la nuit… Est-ce cela seulement être parent, est-ce cela seulement être père ? Est-ce simplement cela ?

Si ce n’était que cela, ne serait-ce pas déjà beaucoup ? La sexualité, tant niée par la magistrate ou le magistrat – au travers du fantasme d’un enfant sans père – est un acte profondément humain. À peine n’y a-t-il chez l’animal, non doté d’une peau et donc, d’une sensibilité, que des saillies.

Car ces regards, ces paroles qui s’échangent, ces corps qui s’unissent dans l’obscurité d’une nuit complice, peut-être dans une union fugitive et sans lendemain, suffisent à sceller un pacte de parentalité que rien, pas même la fantastique gesticulation judiciaire, ne saurait rompre ou briser.

Aimer, procréer sont des actes de culture autant que de nature, des actes humains et même des actes constitutifs de notre humanité.

Dès l’origine, le rôle du père est crucial dans la construction de l’enfant. Il n’a pas seulement, pour l’enfant des deux sexes, une fonction séparative d’avec la mère. Il est aussi, pour le garçon et par les vertus du mimétisme, le modèle et l’introducteur dans la vie et, pour la fillette, le premier objet libidinal, le premier objet d’amour.

Chez l’enfant, il y a au départ, fusion entre le masculin (ou le féminin) et le paternel. Mais précisément, c’est selon la manière dont cette fusion est ensuite résorbée que se construit un organisme psychique équilibré ou pas. Et les innombrables amalgames et con-fusions, chez les juges, mais aussi chez les ultra-féministes ou les mères possessives, entre homme et père, femme et mère montrent que, trop souvent, cette dé-fusion ne s’est pas opérée correctement, voire pas opérée du tout ! « Vous êtes pour les pères ? Alors vous êtes sûrement masculiniste, voire misogyne ! »

De la même manière, est-ce vraiment à partir de la matrice, de la grossesse, aussi désagréable qu’elle ait pu être, est-ce vraiment à partir de cela qu’une maternité digne et efficace doive se construire ? Les mères aussi doivent trouver leur voie et les sirènes judiciaires ne doivent pas les détourner de cette recherche.

Et l’enfant ? Qu’est-il ? Bien avant d’être un « mineur de dix-huit ans » ou un héritier en ligne directe, il est un être en construction qui a droit à la double protection de ses parents et des institutions. Il est une promesse d’avenir, mais une promesse qui doit être tenue hors de toute projection parentale.

Qu’est-ce qu’un enfant ? La réponse est simple : c’est un enfant. Avant même d’être une « personne » dont l’avis devrait être soi-disant déterminant, ce qui l’adultise (et alors qu’il est copieusement manipulé par des personnels judiciaires dont on a souligné les infantilismes), c’est un enfant, un être tout de dépendance et de fragilité.

Il est difficile d’aimer un enfant tant qu’on n’a pas réfléchi sur la nature du désir d’enfant chez l’« adulte ». N’est-ce pas d’abord pour échapper à la mort, pour s’immortaliser, qu’on a un enfant, un être à sa semblance ? En laissant un enfant derrière moi, je ne mourrai jamais ! Mais, en ce cas, l’enfant ne me renvoie-t-il pas l’image de ma mort (ou de ma lâcheté)… ? Il n’est pas facile, il n’est pas toujours simple d’aimer un enfant. Mais là encore, un processus approprié de parentification rend possible un amour purifié.

Et dès lors que ce processus a abouti, le parental peut et doit survivre au naufrage du conjugal. Les mères qui instrumentalisent l’enfant pour « frapper » l’autre parent par son moyen, ou pire « se font faire un enfant » en ayant déjà projeté une séparation, « juste pour garder un souvenir » de leur compagnon, doivent y songer et y réfléchir ! La Justice aussi ! Le secrétariat d’État à la Famille aussi !

Finalement, il faut s’entendre avec l’autre parent, c’est cela seul qui compte. Nous, pères et parfois mères séparés ou divorcés, devons nous stimuler entre nous pour renouer à tout prix un dialogue parental interrompu par la rupture conjugale et aussi par l’amalgame – hélas ancien – entre parental et conjugal.

C’est pourquoi, lors de notre prochaine assemblée générale, le 26 septembre prochain, et à l’instigation d’un de nos militants, Pierre Cunat, nous examinerons la création d’un prix visant à récompenser le parent qui a fourni les efforts les plus méritoires pour renouer les fils du dialogue avec l’autre parent, par-delà l’espace et le temps.

À présent, il est temps de marcher vers le Sénat et d’y déposer auprès de son président, M. Gérard Larcher, nos propositions d’amendement pour la proposition de loi 1925 APIE.

En avant le droit de l’enfant à ses deux parents !

3e marche pour l’égalité parentale

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